Nous
allons essayer de rester rationnels cinq minutes, et je compte sur
votre aide, car je pose une question simple, qui nous intéresse tous :
après deux ans de guerre, pourquoi Daech n’est-il pas encore éradiqué ?
On parle de 20.000 à 30.000 combattants.
Si
j’ai bien suivi, Daech est combattu par le monde entier depuis deux
ans. Donc, les mecs ont à leur trousse l’OTAN – les Etats-Unis en tête
–, la Russie et ses alliés, le monde sunnite, et le monde chiite. Aucun
allié, ils sont en autarcie diplomatique et militaire. En termes de
rapport de forces, c’est du 99,9 contre 0,01 %. Daech recule, c’est sûr,
et sur place des soldats jouent leur peau. Alors, respect, mais quand
même, il y a des questions sérieuses qui se posent.
Daech
dirige un territoire en lambeaux, sans frontières, sans structure
d’Etat fiable, avec une administration balbutiante, de nombreux
combattants étrangers, pour des territoires – et des populations –
disparates. Au point de vue militaire, ils ont des combattants
courageux, voire allumés, mais pas d’aviation, une défense anti-aérienne
embryonnaire, un retard colossal dans la technologie, notamment pour le
renseignement et un armement qui doit avoir de sérieux problèmes
d’après-vente et d’entretien. Au jour le jour, les forces de la
coalition occidentale d’une part, et l’armée russe d’autre part, qui
contrôlent l’espace aérien de Daech, tirent des milliers de photos qui
permettent de suivre la présence et l’action des troupes de Daech, de
Mossoul à Raqqa. Pour en faire quoi ?
La
guerre coûte cher ? Certes, mais celle-ci bien moins que celles
conduites contre le Vietnam, l’Afghanistan ou l’Irak. Et vu la
composition de cette immense coalition, qui inclut les pays les plus
riches, dont nos amis saoudiens et qataris, il y a de la monnaie,
beaucoup et pas loin.
L’incapacité
de troupes étrangères pour reconquérir des territoires essentiellement
sunnites ? C’est un problème sérieux, vu le bilan là-bas. Après leurs
actions désastreuses au Moyen-Orient, on ne voit pas les yankees
accueillis à bras ouverts… Ni les Iraniens, du fait de
l’instrumentalisation religieuse du conflit, et parce que la guerre
Iran/Irak a à peine une génération. Ni les dirigeants des pays sunnites
de la région, qui ont renoncé au patriotisme arabe et à la solidarité
internationale, devenus des marionnettes dans la main des occidentaux.
Oui, il va falloir faire de la vraie politique, pour créer l’adhésion
populaire, mais qui s’en préoccupe ? Est-il vraiment impossible de tenir
un discours juste et crédible à l’égard des populations du califat ?
Impossible de se parler à ces familles, qui au minimum, ne peuvent pas beaucoup miser sur Daech pour donner un avenir à leurs enfants ?
Voilà.
Voilà l’équation de cette guerre « impossible à gagner », alors qu’elle
est le « défi de notre temps, avec la volonté de détruire notre
civilisation… ». Deux ans à 99,9 contre à 0,01, pour quel résultat
réel ?
Alors,
la question se dédouble : quels intérêts pour des responsables
politiques qui jouent leur avenir à court terme, en instrumentalisant
les enjeux de Daech, contre l’intérêt de leurs peuples, et contre
l’intérêt de nos amis qui, là-bas, subissent l’ordre de Daech ?
C’est une question.
Aujourd’hui,
nous n’avons ni toutes les cartes, ni le dessous des cartes. Mais un
jour où l’autre, les informations seront rendues disponibles, avec des
comptes à demander.
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