La
première chose à souhaiter est que Théo récupère, sans séquelles. Il a
été grièvement blessé, et après ces violences, il a été vite pris en
charge médicalement, mais ce sont des soins lourds.
La deuxième chose à souhaiter que les politiques se taisent.
Ils ne savent rien de plus de l’affaire, et qu’ils nous parlent donc de
la confortation des services publics de la police et de la justice. En
temps de disette budgétaire, ça nous intéresserait.
Ceci dit…
Théo a-t-il été victime de violences policières ?
Franchement,
et avec tout respect dû à la présomption d’innocence, ce n’est quand
même pas trop contestable. Quatre gardiens de la paix face à ce jeune
homme sans arme, éducateur, pour arriver à ce résultat, médicalement
établi… Et outre les violences intimes, il y a eu bien d’autres coups.
Une disproportion et beaucoup d’énervement de la part de cette équipe,
avec un comportement non-professionnel de la part d’une brigade spécialisée. Et ajoutons les insultes racistes.
Les violences étaient-elles volontaires ?
À
l’évidence les violences sont volontaires. L’alternative serait des
violences involontaires, par imprudence ou négligence, et ce n’est pas
le cas. Le travail est difficile,
mais ce n’est pas un critère : tout travail est difficile, à part
relire un discours par semaine à la maison, pour 8 000 € par mois.
L’intention
n’est pas générale, mais liée à un geste. La question de savoir si
l’intromission de la matraque dans l’anus était elle aussi volontaire ou
non.
Pourquoi le juge a-t-il prononcé une mise en examen pour viol ?
Il
faut lui demander car c’est le seul à savoir. Il est celui qui a le
mieux étudié le dossier, et il a pris sa décision contre l’avis du
procureur. Cette analyse personnelle souligne la gravité du dossier :
les violences volontaires sont un délit, alors que le viol est un crime.
Mais attention : que, pour les policiers d’Aulnay ou Fillon de
Sablé-sur-Sarthe, la mise en examen (Code de procédure pénale, art. 80-1)
est un droit de la défense. Les charges atteignent un niveau tel que la
justice doit permettre aux personnes concernées de se défendre, en
devenant partie au procès, avec l’assistance d’un avocat.
Pour
aider au plein développement de l’enquête, le juge peut être tenté
d’ouvrir l'instruction dans le cadre infractionnel le plus large. Cela
ne préjuge pas de ce que sera le résultat des ses investigations et,
encore moins, du jugement s’il y a ensuite renvoi devant une
juridiction.
Comment apprécier la réalité de l’acte de viol ?
Plus
que d’ « appréciation », il faut parler de preuve. L’introduction
intentionnelle d’une matraque télescopique dans l’anus est un viol (Code pénal, art. 222-23).
La seule interrogation est le critère intentionnel, c’est-à-dire la
volonté de pénétrer sexuellement la victime. Théo, très calme, a fait
des déclarations circonstanciées et accusatrices, mais les policiers
contestent l’intention, et l’IGPN aussi.
Alors, c’est parole de l’un contre parole de l’autre ?
Non,
cette formule renvoie à une approche simplificatrice du travail
judiciaire. Le viol est un crime, et une telle affaire bénéficie du mode
d’instruction le plus élaboré qui soit. Aussi, que ne personne se
trompe : cela va prendre beaucoup de temps, réunir le plus grand nombre
d'indices matériels.
Le
juge va d’abord chercher à établir la réalité des faits, instant après
instant. A priori, l’enquête dispose de plusieurs vidéos, dont certaines
longues d’environ sept minutes. Il y aura une exploitation détaillée,
image par image pour la phase cruciale.
Au
titre des éléments objectifs, le juge va ordonner une expertise
médicale. Le dossier doit déjà permettre de disposer de beaucoup de
renseignements, avec les constatations médicales et le bilan opératoire.
Mais avant de tirer des conclusions, la justice doit se faire éclairer
par la science des médecins. Il faut prévoir un premier collège
d’experts, puis selon toute vraisemblance, une contre-expertise. Cela va
occasionner de longs délais, ce d’autant plus qu’il faudra attendre la
guérison de Théo, ce que l’on souhaite, ou la stabilisation des
séquelles.
Le juge a ordonné des expertises psychologiques et des enquêtes de personnalité.
Après avoir analysé l’ensemble de ces données, le juge va procéder à des auditions détaillées des policiers et de Théo - qui décrit une scène de viol
– puis à des confrontations. La scène a eu lieu devant de nombreux
témoins, qu’il faut chercher à identifier, et qui peuvent apporter des
éléments éclairants.
En définitive ?
Si
le juge instruction estime qu’il y a suffisamment d’éléments
accusatoires, après les réquisitions du procureur, il saisira le
tribunal correctionnel s’il ne retient que les violences, ou la cour
d’assises, si l’accusation de viol est formée. Et ce sera à la
juridiction de jugement de trancher.
Il faut prévoir plusieurs années.
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