mardi 21 mars 2017

Le chemin vers la paix

Majed Bamya


– Monsieur, pouvez vous m’indiquer le chemin vers la paix ? 

Vous allez me trouver excessif, mais j’ai l’impression de marcher depuis un siècle sans me rapprocher de la destination.
– Oui bien sûr, vous devez passer par Gaza la rebelle, en dépit des bombardements, mais gare de vous trouvez bloquer par le siège qu’elle endure.
Vous remontez la côte jusqu’à Saint Jean d’Acre qui pensait avoir vaincu son siège et rendu anachronique ses murailles, mais elle est en proie à un siège de l’intérieur, fait de discrimination et de ségrégation.
De là, un coup d’œil vers le nord vous permettra d’observer les rêves dérisoires des réfugiés d’un retour toujours plus lointain scintillant dans une nuit qui se refuse à héberger de telles étoiles. La légende dit que, tout au long de votre chemin, les camps de réfugiés vous serviront de repères, si leur éclat survit aux assassins.
Personnellement, je ne fais pas confiance aux légendes.
C’est comme les miracles, ils n’engagent que ceux qui veulent y croire. Je conseille le chemin passant par Nazareth, pour ne pas perdre la foi si la vôtre a survécu jusqu’à là.
De là, vous prenez le chemin jusqu’à Qalqilya, emmurée, vous descendez vers Jénine qui garde quelques traces de son siège meurtrier ; oui je sais que de sièges et que de souffrances
De là, les choses sont simples, à quelques centaines de barrages militaires et des centaines de milliers de colons près. Il vous suffit de demander où se trouve Hébron, c’est facile à reconnaître, c’est là que l’apartheid avance à visage découvert.
Il est présent partout ailleurs mais il ne s’exprime nulle part avec la même arrogance.
Vous allez ensuite à Bethléem, sœur jumelle de Jérusalem, maintenant séparée d’elle. Le mur de nouveau vous y attendra, ne vous y attardez pas, admirez plutôt les collines de Battir… tant que vous en avez l’occasion.
Et puis vous voilà à Jérusalem, ville trois fois Sainte.
La diversité qui est l’essence même de ce lieu, à l’image de cette terre, est devenu une damnation. Et alors si les mitraillettes profanent la sainteté des lieux et de l’humain qu’ils hébergent, ne soyez pas trop sensibles. Et alors si les personnes voient leurs maisons être démolies devant leurs yeux, et si à leur place apparaissent de nouveaux habitants, s’empressant de construire sur leurs ruines et leurs tombes des immeubles sans racines.
Vous voyez, la paix se trouve là, à vol d’oiseau du miracle. Et franchement, si quelques décennies d’injustices, d’exil, de déni de droits, d’oppression et si quelques murs, barrages militaires, colonies, sièges et bombardements vous empêchent d’y arriver c’est que vous ne désirez pas vraiment y arriver à la paix, n’est ce pas ?

 Majed Bamya est un diplomate palestinien, directeur du département des Traités internationaux du Ministère des Affaires étrangères de l’Autorité palestinienne.

Il a publié le texte ci-dessus sur sa page Facebook le 13 mars 2017.

Pour la Palestine

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