– Monsieur, pouvez vous m’indiquer le chemin vers la paix ?
Vous allez me trouver excessif, mais j’ai l’impression de marcher depuis un siècle sans me rapprocher de la destination.
– Oui bien sûr, vous devez passer par Gaza la rebelle, en dépit des bombardements, mais gare de vous trouvez bloquer par le siège qu’elle endure.
Vous remontez la côte jusqu’à Saint Jean d’Acre qui
pensait avoir vaincu son siège et rendu anachronique ses murailles, mais
elle est en proie à un siège de l’intérieur, fait de discrimination et
de ségrégation.
De là, un coup d’œil vers le nord vous permettra d’observer les rêves
dérisoires des réfugiés d’un retour toujours plus lointain scintillant
dans une nuit qui se refuse à héberger de telles étoiles. La légende dit
que, tout au long de votre chemin, les camps de réfugiés vous serviront
de repères, si leur éclat survit aux assassins.
Personnellement, je ne fais pas confiance aux légendes.
C’est comme les miracles, ils n’engagent que ceux qui veulent y croire. Je conseille le chemin passant par Nazareth, pour ne pas perdre la foi si la vôtre a survécu jusqu’à là.
De là, vous prenez le chemin jusqu’à Qalqilya, emmurée, vous descendez vers Jénine qui garde quelques traces de son siège meurtrier ; oui je sais que de sièges et que de souffrances
De là, les choses sont simples, à quelques centaines de barrages
militaires et des centaines de milliers de colons près. Il vous suffit
de demander où se trouve Hébron, c’est facile à reconnaître, c’est là que l’apartheid avance à visage découvert.
Il est présent partout ailleurs mais il ne s’exprime nulle part avec la même arrogance.
Vous allez ensuite à Bethléem, sœur jumelle de Jérusalem, maintenant séparée d’elle. Le mur de nouveau vous y attendra, ne vous y attardez pas, admirez plutôt les collines de Battir… tant que vous en avez l’occasion.
Et puis vous voilà à Jérusalem, ville trois fois Sainte.
La diversité qui est l’essence même de ce lieu, à l’image de cette
terre, est devenu une damnation. Et alors si les mitraillettes profanent
la sainteté des lieux et de l’humain qu’ils hébergent, ne soyez pas
trop sensibles. Et alors si les personnes voient leurs maisons être
démolies devant leurs yeux, et si à leur place apparaissent de nouveaux
habitants, s’empressant de construire sur leurs ruines et leurs tombes
des immeubles sans racines.
Vous voyez, la paix se trouve là, à vol d’oiseau du miracle. Et
franchement, si quelques décennies d’injustices, d’exil, de déni de
droits, d’oppression et si quelques murs, barrages militaires, colonies,
sièges et bombardements vous empêchent d’y arriver c’est que vous ne
désirez pas vraiment y arriver à la paix, n’est ce pas ?
Majed Bamya est un diplomate palestinien, directeur
du département des Traités internationaux du Ministère des Affaires
étrangères de l’Autorité palestinienne.
Il a publié le texte ci-dessus sur sa page Facebook le 13 mars 2017.
Pour la Palestine
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