samedi 8 avril 2017

L’UE proteste vivement contre les démolitions de maisons palestiniennes en Zone C, et avertit que cela conduira à un « transfert forcé »

Barak Ravid    

Une rencontre de routine entre le directeur du ministère israélien des Affaires étrangères et les envoyés de l’UE la semaine dernière a été transformée en protestation par les États européens contre le projet d’Israël de démolir un village bédouin.

L’Union européenne a exigé qu’Israël cesse de démolir les maisons des Palestiniens en Zone C en Cisjordanie, et particulièrement s’agissant du village bédouin de Khan al-Ahmar proche de la colonie Ma’aleh Adumim car cela entraînerait un transfert forcé de ses habitants et constituerait une violation de la Convention de Genève.
Selon les diplomates israéliens et européens, ce message sévère, au nom de tous les membres de l’UE, a été adressé la semaine dernière par l’ambassadeur de l’UE en Israël, Lars Faaborg-Andersen, au nouveau directeur-général du ministère des Affaires étrangères d’Israël, Yuval Rotem.
Les diplomates israéliens et européens ont déclaré que, la semaine dernière, Rotem avait tenu sa première réunion avec les ambassadeurs de tous les États membres de l’UE en Israël. La réunion, qui s’est tenue à l’Hôtel Dan à Tel Aviv, devait être une réunion d’informations de routine avec les envoyés de l’UE, mais qu’elle s’est transformée, au moins au départ, en une confrontation sur la politique du gouvernement en Zone C, où Israël exerce un contrôle civil et sécurité total.
Immédiatement après le début de la rencontre, Faaborg-Andersen a annoncé qu’il profitait de la réunion pour envoyer un message qui avait été approuvé par la commission Sécurité et Diplomatie de l’UE, dans laquelle tous les 28 États membres sont représentés. Le document, obtenu par Haaretz, est rédigé en termes vigoureux et qualifie Israël de « puissance occupante ».
« La mise en œuvre de mesures d’exécution telles que les transferts forcés, les expulsions, les démolitions et confiscations de maisons et de biens humanitaires (notamment financés par l’UE) et l’entrave à la fourniture de l’aide humanitaire, sont contraires aux obligations d’Israël en vertu du droit international, y compris et en particulier des dispositions spécifiques de la IVe Convention de Genève… et causent des souffrances aux Palestiniens ordinaires », affirme le document qui a été lu à voix haute par Faaborg-Andersen lors de la réunion.
« Nous demandons par conséquent à Israël, en tant que puissance occupante, de remplir ses obligations vis-à-vis de la population palestinienne en Zone C, de cesser totalement les démolitions et confiscations, et de laisser un plein accès à l’aide militaire. Nous demandons instamment à Israël d’accélérer les agréments aux plans directeurs palestiniens, de cesser les transferts forcés de la population et les démolitions des logements et infrastructures des Palestiniens ; de simplifier les procédures administratives pour l’obtention du permis de construire, d’assurer l’accès à l’eau, et de répondre aux besoins humanitaires ».

Selon les diplomates : une atmosphère très tendue

Selon les diplomates présents, Rotem a été déconcerté par le message. L’atmosphère était très tendue et Rotem a cyniquement remarqué, « Quelle merveilleuse façon de commencer une première rencontre avec le directeur-général du ministère des Affaires étrangères ». Le porte-parole du ministère, Emmanuel Nahshon, a confirmé la remise de la protestation et du document par les ambassadeurs européens, mais il a déclaré aussi que la rencontre elle-même avait été conduite de façon professionnelle.
L’UE et ses États membres ont exprimé leurs préoccupations concernant la politique israélienne en Zone C depuis quelques temps. Néanmoins, cette protestation avait lieu dans le contexte de la remise d’une notification pour la démolition de toutes les 42 maisons de Khan al-Ahmar, village situé dans la zone stratégique appelée E1 qui relie Ma’ale Adumin à Jérusalem. L’UE craint que la démolition de ce village n’augure la construction d’une nouvelle colonie de peuplement sur le site.
Les habitants de Khan al-Amar vivent dans des structures temporaires sans aucunes commodités. Les Bédouins ici et dans les régions environnantes sont parmi les groupes les plus pauvres de Cisjordanie. Bien que toutes les structures du village aient été montées illégalement, l’Administration civile fermait les yeux depuis des années. Le village est le site de « l’école de pneus », une structure faite de vieux pneus qui enseigne à des centaines d’élèves de plusieurs villages bédouins non reconnus de la région. L’école, construite avec un financement italien, est devenue un symbole de la lutte des Bédouins contre la démolition du village.
Alfano Angelino, ministre des Affaires étrangères d’Italie, venu en Israël il y a deux semaines, a soulevé la question de la démolition de ce village lors de sa rencontre avec le Premier ministre Benjamin Netanyahu. Alfano a demandé au Premier ministre de réexaminer la démolition, mais sa requête a été catégoriquement rejetée. « Tout comme nous n’avons pas approuvé la construction illégale d’Amona par les Juifs, nous n’autoriserons pas davantage de constructions illégales par les Palestiniens » a dit Netanyhu.
La lettre lue par Faaborg-Andersen lors de la rencontre avec Rotem faisait mention spécifiquement de Khan al-Ahmar, ne serait-ce que parce que l’Italie et certains autres pays avaient contribué au financement des structures prévues pour la démolition.
« Environ 140 réfugiés palestiniens qui vivent dans la communauté depuis les années 1950 risqueraient un transfert forcé » a déclaré Faaborg-Andersen en lisant le texte. « En outre, 170 élèves de l’école de Khan al-Ahmar, qui dessert aussi les communautés environnantes, seraient laissés sans accès à l’enseignement. Nous demandons instamment à Israël de n’entreprendre aucune démolition dans la communauté.

L’UE et les États membres de l’UE sont unis dans l’opinion que la Zone C est d’une importance cruciale pour la viabilité d’un futur État palestinien ».

Source :  Haaretz
Traduction : JPP. 

aurdip.fr 

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