Victor Ayoli
Son « plan » va être révélé sous peu. Il semble vouloir imposer un retour aux bases. Y arrivera-t-il ? C’est pas de la tarte !
Un enfant
sur cinq ne maîtrise pas la lecture et donc l’écriture. C’est un constat
d’échec terrible. Un grand nombre de nos enfants ne savent plus lire,
plus compter, et donc plus penser. Le système éducatif français, qui fut
un des meilleurs du monde, est maintenant non seulement montré par Pisa
comme dépassé, mais surtout, et c’est bien pire, inefficace. La faute à
qui ? La faute à quoi ? Des bonnes intentions qui foirent, des systèmes
d’apprentissage et des programmes qui changent à chaque ministre de
l’enseignement, une priorité donnée à la compétition entre élèves mais
aussi entre établissements, un abandon de l’excellence au profit du
privé et surtout une partie importante de la population scolaire laissée
sur le côté.
Résultat,
l’école a cessé d’être le moteur de l’ascenseur social. Ceux qui sont
nés avec une cuillère d’argent dans la bouche demeureront en haut, ceux
qui sont nés dans la rue y resteront. Inégalité ! Avec en embuscade le
privé qui rêve d’un enseignement essentiellement concurrentiel, avec des
établissements gavés de pognon par les entreprises, débauchant les
meilleurs professeurs du public, et fabriquant à la chaîne des
« premiers de la classe » stéréotypés, formatés pour le système
ultralibéral.
Sans
oublier les écoles confessionnelles… Celles-ci n’ont pour vocation
d’ouvrir l’esprit de leurs élèves, mais de les enfoncer dans le moule de
leur idéologie. Il y a celles qui sont « sous contrat », aidées par
l’État et, en compensation, tenues d’appliquer des programmes conformes à
ceux de l’Éducation nationale. Et puis il y a les autres, les
« établissements privés hors contrat » dont le développement a de quoi
inquiéter. S’ils restent marginaux, ils sont en progression constante,
surtout dans le primaire. Selon le ministère, il existe aujourd’hui un
peu plus d’un millier d’établissements, tous niveaux confondus. Les
profils sont très variés. On compte environ 300 établissements
confessionnels : quelque 160 catholiques, 50 juifs, 40 musulmans et
30 protestants. Certains vivotent en attendant de signer un contrat avec
l’État (possible au bout de cinq ans en principe). D’autres tiennent
par-dessus tout à garder leur autonomie grâce à leur statut de hors
contrat.
Les
deux tiers de ces structures n’ont aucune appartenance religieuse. Une
grande partie propose des pédagogies alternatives, type Montessori ou
Steiner, pour les « déçus » du système scolaire classique. D’autres
visent des publics spécifiques, comme les enfants bilingues, venant de
milieux favorisés, avec des parents en mesure de payer des frais de
scolarité élevés.
Les
établissements hors contrat ne reçoivent pas un centime d’argent public,
à la différence du privé sous contrat dont la rémunération des
enseignants est prise en charge par l’État. Les hors contrat ont une
gestion totalement autonome, embauchent qui ils souhaitent, sans
condition de diplôme. Ils ne sont pas tenus de suivre les programmes
officiels, mais l’État, au nom du droit à l’éducation de chaque enfant,
veille à ce que le socle de connaissance soit acquis.
En France,
la liberté d’enseignement est érigée au rang de liberté fondamentale, la
plus élevée dans la hiérarchie des normes. N’importe qui, à condition
d’être titulaire du bac, d’avoir plus de 21 ans et un casier judiciaire
vierge, peut ouvrir un établissement scolaire. C’est aujourd’hui plus facile d’ouvrir une école qu’un bar, un restaurant ou un salon de coiffure !
Il fut un
temps où l’école publique, gratuite et obligatoire assurait l’égalité
des chances, en tout cas l’égalité dans l’obtention des savoirs de base.
Ceci à travers ces formidables « hussards de la République » qu’étaient
les instituteurs, respectés car respectables. Ce temps est révolu. Les
profs sont mal payés, mal formés, de moins en moins motivés.
Les élèves
ne se rendent plus compte de la chance qu’ils ont, de pouvoir acquérir
un enseignement gratos. Ils s’en foutent, crachent à la gueule des
profs, ont perdu la notion de l’effort en constatant que même les
diplômes ne sont plus un rempart contre le chomdu, et que diler du chit
rapporte plus que marner en classe… Mais pour aimer l’école, encore
faut-il qu’on leur en donne envie ! Pour que les élèves aiment l’école,
encore faut-il éveiller leur curiosité, encore faut-il qu’ils sachent
pourquoi ils y vont, leur donner des perspectives autres que des classes
poubelles s’ils ont le malheur de lâcher prise.
Quant aux parents d’élèves, au lieu d’être des auxiliaires des profs, ils en sont souvent les adversaires.
Blanquer,
inquiet du niveau pas très réjouissant des élèves, veut mettre lui aussi
son nom sur une énième réforme en revenant aux bases.
Bon courage à lui. Parce qu'il est bien lourd à exciter le « mammouth »…
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire