« La limite du capital c'est le capital lui-même » (K.Marx)
Lorsqu’ils ont commencé à parler de la crise, beaucoup de grands penseurs, d’hommes politiques de gauche comme de droite, la main sur le cœur et largement relayés par les médias, ont parlé de crise financière. On assistait à l'effondrement des grandes places financières prises au piège d'une spéculation effrénée, dont les montants - plus de 25 milliards de dollars partis en fumée - atteignaient des sommets inconnus jusqu'alors.
Aujourd'hui un constat s'impose : la crise, dite financière, a cédé sa place à une crise du système capitaliste dans son ensemble. De par le monde, pas un jour sans que l'on n'apprenne de nouvelles catastrophes annonçant que des pans entiers de l'industrie sont ou vont être liquidés. Des millions de travailleurs et leurs familles basculent dans la précarité. Rien de ce qui fonde une civilisation moderne et qui se mesure à ses droits – droit à la santé, à l’éducation, la culture, le droit à la retraite, au travail – n’est épargné. Un système en crise dont la survie exige une déclaration de guerre permanente aux travailleurs pour abaisser le coût de leur force de travail. Les moyens économiques de cette guerre sont « les réformes » qui entraînent la destruction des services publics et des emplois. La voie politique qu’emprunte cette guerre économique est celle de la remise en cause de la souveraineté nationale, organisées par les institutions supranationales (FMI, OTAN, ALCA, Union européenne, etc.) et qui s’appellent « régionalisation » et autres « statut d’autonomie ».
Des instruments spéculatifs sophistiqués sont élaborés, pour faciliter à l'extrême la constitution des bulles spéculatives. Leur finalité ? Élargir toujours plus les champs de spéculation pour les capitaux. Et nos apprentis sorciers de penser : à quoi bon investir dans le secteur productif, si bas, quand par un simple « click », des fortunes colossales peuvent se créer qui, librement, survolent les peuples affamés et viennent à leur tour, enfler de manière illimitée ces bulles.
Oui. « La limite du capital c'est le capital lui-même ».
L'UBS, au cœur de la plus grande orgie spéculative de l'histoire du monde...

En 2001, sur la base de taux d'intérêt (indice du loyer de l'argent) très bas, la Réserve fédérale américaine (FED) va créer les conditions de la plus grande orgie spéculative de l'histoire des USA et du monde. Cette situation consiste à pousser, par tous les moyens, l’endettement des ménages les plus modestes des États-Unis. A titre de comparaison, pour l'achat d'une maison dans les années 80 on exigeait 70% de fonds propres. En 2007 ce même fond atteint près de 0% pour un nouveau propriétaire sur 5, qui obtient jusqu'à 100% de son financement.
Très rapidement la dette hypothécaire des ménages américains passe de 5530 milliards de dollars à 11000 milliards de dollars. S'y ajoutent les investissements spéculatifs dans l'immobilier qui gonflent artificiellement leurs prix (40% des maisons). A partir de 2002, l'industrie de la titrisation de la dette hypothécaire se met en place à Wall Street. Les banques d'affaires aux USA et, parmi elles l'UBS, créent de la « pâte à dette » qu'elles vendent en masse à toute la planète. La chaîne entre le propriétaire et l'acheteur de sa dette sous forme de titres boursiers devient de plus en plus longue et opaque à mesure que se superposent les couches de titrisation, le tout avec la complicité des agences de notation (Standard & Poors, Moody's et Fick) dont les banques constituent le principal client. Dans cette orgie spéculative, l'UBS Investissement Bank, filiale de l'UBS aux Etats-Unis, jouera un rôle de premier plan. Pour ce faire elle y emploiera jusqu'à 36000 personnes, engageant à prix d'or les traders phares de la finance payés, au minimum, 50 millions de dollars par an. Mieux encore, en 2005, l'UBS créera, à l'intérieur de la banque, le Dillon Read Capital Management (DRMC), un fonds spéculatif chargé d'exploiter les stratégies les plus sophistiquées destinées à générer un maximum de profits sur le marché très convoité du crédit immobilier. Ainsi l'UBS mène deux activités similaires dans deux unités parallèles et concurrentes. Comme toutes les autres institutions financières, elle aura massivement recours à l'effet de levier qui consiste à acheter des paquets de titres sans avoir à fournir l'intégralité du capital pour...continuer à spéculer. Ce qui a permis à l'UBS d'investir 60 fois ses fonds propres, l'effet de levier le plus élevé de tout le secteur bancaire !
...et de son effondrement !
Entre 2003 et 2006, les taux des hypothèques subprime, indexés sur ceux de la FED, passent de 1% à 5,25%. Plus de 2 500 000 d'américains sont dans l’incapacité d'honorer ces taux hypothécaires punitifs (reformulés au double ou au triple des conditions initiales). Ils risquent de perdre - ou ont déjà perdu - leur maison et se retrouvent dépouillés de toutes leurs économies. Pour rappel, les moins solvables d'entre eux ont des taux ajustables qui, extrêmement bas au départ, montent rapidement de 50% à 100% au bout de 2 ans...
Le marché immobilier se retourne, la baisse des prix des maisons ne permet plus aux emprunteurs de se refinancer, les acheteurs d'hypothèques titrisées disparaissent et, d'un coup, les agences de notations rétrogradent des montagnes de titres. Les banques se retrouvent avec des papiers sans valeur aucune. D'un bout à l'autre de la planète, banques, les fonds spéculatifs, les assureurs se retrouvent en dépôt de bilan. Jour après jour, on peut voir chaque fois plus de pays, ceux dits « émergents » - et dont on espérait, on ne sait d’où, qu'ils fourniraient un rempart à la crise ! - mais aussi d'autres tels l'Islande, la Pologne, la Hongrie, les Balkans, etc., viennent demander de l'aide au FMI. Brusquement, les investisseurs ont disparu et, avec eux, l'argent des crédits. Les retraités qui, dans le cadre des mesures de déréglementation-mondialisation, ont vu leurs économies englouties de force dans la sphère spéculative, ont tout perdu.
En Suisse l’UBS s’en est bien sortie pour le moment, le gouvernement fédéral appuyé par une majorité du parlement a décidé de racheter les « avoirs toxiques » de l’UBS pour un montant de 64 milliards de francs suisses. Une paille, alors que pour les assurances sociales, les débats sont interminables et conduisent généralement à des décisions « d’économies » et de restrictions formulées sur le dos des salariés et des retraités ! Tandis qu’elle engrange quelques 14 milliard de bénéfices pour 2008, l’UBS entend dégraisser et licencie plus de 2’500 employés rien qu’en Suisse. Depuis le début de cette crise, on peut estimer à quelques 10’000 les emplois qui ont été supprimés.
C’est ainsi, et ainsi seulement, c’est à dire en détruisant la force de travail, les producteurs, que le système capitaliste entend s’en sortir.
Moraliser le capitalisme ? Autant vouloir rendre un tigre végétarien !
Invité à l'émission « A vous de juger » (26/03/2009), on pouvait entendre Dominique Strauss-Kahn, à la fois membre du Parti socialiste français et président du FMI, dire, mot pour mot, la chose suivante.
« ...Il y a une sorte de charrette de foin pleine d'essence, ça s'est allumé avec les subprime mais cela aurait pu se produire ailleurs ». Une manière tacite d’admettre que oui, la spéculation a gangréné tous les secteurs de l'économie mondiale. Mais à combien le FMI évalue-t-il les actifs toxiques pourris détenus par les banquiers ? « Au début de la crise, à 1000 milliards de dollars mais les banques en difficulté ont cessé d'approvisionner les entreprises qui à leur tour se sont trouvées en difficulté et leur dette n'est plus remboursable non plus ce qui augmente la masse d'actifs pourris qui aujourd'hui atteignent 2200 à 2300 milliards et ça augmente parce que plus on traine plus ça va coûter cher ». Les travailleurs apprécieront... Précisément, même pas un mois après cette interview, et selon la dernière estimation du FMI publiée ce 22 avril, on évaluerait ces titres illiquides à 4025 milliards de dollars...Et ça augmente ! Et que propose le FMI pour sortir de la crise ? «La chose la plus importante c'est le nettoyage des banques. Tant qu'on ne le fait pas on n'en sort pas ! C'est bien la difficulté politique.» Et le moyen pour y parvenir ? «La relance budgétaire et ça fera de la dette publique, c'est sûr. Après il faudra mettre en place des instruments pour éponger les problèmes de la dette dans les années qui viennent...». Relance budgétaire ? C'est précisément la décision principale de G20 qui appelle à « recapitaliser les institutions financières » en leur versant 5000 milliards de dollars. Et où vont-ils les trouver, tous ces milliards, sinon dans les poches de nos services publics, en tailladant les budgets de l'école, de la Poste, de l'assurance invalidité, la santé, du rail etc. Et on nous parle de moralisation du capitalisme ? Autant essayer de rendre un tigre végétarien. Mais si Strauss-Kahn ne peut éviter d’évoquer « la difficulté politique », c'est qu’il sait lire les chiffres du sondage SOFRES, imprimés sur fond d'écran pendant son interview, montrant que 64% des français veulent se révolter. Il y a loin de la coupe aux lèvres, M. Strauss-Kahn.
Les travailleurs ne sont pas responsables de la crise. « La crise, c’est eux. La solution, c’est nous ! » Notre responsabilité est de répondre à la guerre que le capital a engagé contre le travail. Voilà pourquoi nous, militants du mouvement ouvrier, syndicalistes, dans le respect des positions de chacun, vous invitons à rejoindre le combat dans les comités pour l'unité.
Que la discussion s’engage !
Genève –Journal « Politique ouvrière »
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