jeudi 5 novembre 2009

Claude Lévi-Strauss

par Florence Issac


L’anthropologue Claude Lévi-Strauss est décédé et c’est une page qui se tourne, un gouffre immense qui se creuse. Soudainement le paysage des penseurs du monde entier est défiguré pareil à un parc où trônait un chêne plusieurs fois centenaire que l’on croyait éternel. La mort est donc venue nous enlever cet homme de génie dans la nuit de samedi à dimanche. L’académicien est décédé à l’âge de 100 ans. L’information est arrivée de la présidence de l’École des Hautes études en sciences sociales et de son éditeur Plon.

Né à Bruxelles dans les derniers jours du mois de novembre 1908, dans un monde où les colonies étaient encore nombreuses et où le rapport entre les populations étaient souvent une histoire de domination, Claude Lévi-Strauss a changé notre perception du monde en jetant les bases de l’anthropologie moderne et influencé des générations de chercheurs. Il a proposé une appréhension nouvelle des mécanismes socio-culturels, en appliquant l’analyse structurale aux sciences humaines. Ce fut un pas de géant….

Son autobiographie intellectuelle, "Tristes Tropiques", paru en 1955, publié dans la collection de Jean Malaurie, lui vaut d’élargir le cercle de ses lecteurs et d’atteindre un public moins expert et plus populaire. L’ouvrage est considéré à juste titre comme l’un des livres majeurs du XXe siècle comme l’ont pu l’être L’étranger de Camus, La modification de Butor ou Le petit prince de Saint Exupéry.

Professeur au Collège de France de 1959 à 1982, il est le premier anthropologue élu à l’Académie française en mai 1973, au fauteuil d’Henri de Montherlant. Son élection suscite quelques polémiques au sein de l’Institution. Respectant la tradition, il fait l’éloge de son prédécesseur, la réponse est donnée par Roger Caillois qui, profitant de cette opportunité, lance « une série de flèches empoisonnées » sur la méthode et les présupposés scientifiques de Claude Lévi-Strauss qui l’avait choisi pour répondre à son discours de réception.

En juin 2006, il avait reçu un hommage appuyé de Jacques Chirac, alors président de la République, lors de l’inauguration du musée parisien du Quai Branly dédié aux arts premiers.

Claude Lévi-Strauss se rendait encore aux séances hebdomadaires de l’Académie française après cette date. Mais plusieurs chutes l’avaient contraint à fortement limiter par la suite ses déplacements.

Son 100è anniversaire, le 28 novembre 2008, avait donné une multitude d’hommages divers et variés, auxquels il n’avait pas souhaité s’associer. Modestie ? Pudeur ? Le président Nicolas Sarkozy lui avait rendu visite à son domicile en fin de journée pour "lui rendre un hommage chaleureux et lui dire la reconnaissance de toute la Nation". Un communiqué de L’Elysée avait alors fait savoir que Claude Lévi-Strauss s’était "montré très attentif" et avait "dialogué avec le président de la République". De quoi avaient-ils pu s’entretenir ? Nul ne peut le dire…

En tout cas, je ne peux que vous inviter à replonger dans les livres de Claude Levi-Strauss, cela en vaut la peine et à l’heure où le gouvernement français ouvre le débat sur qu’est-ce qu’être Français, le lire donne des éléments de réponse. Avant d’être d’une nationalité, nous sommes avant tout des hommes, des hommes avec leurs différences et leurs constances, des hommes que Claude Levi-Srauss a su si bien étudier et éclairer de ses connaissances…


Florence Issac

http://www.lechappeebelle.net

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