dimanche 27 mai 2012

Libertés : Les étudiant(e)s du Québec nous parlent au creux de l’oreille

Gilles Devers

Pour casser le mouvement de protestation des étudiant(e)s, le gouvernement québécois a adopté en urgence, ce 18 mai, une loi obligeant à une déclaration préalable pour stoute manifestation de plus de 50 personnes. S’en est suivie une levée de boucliers dans toute la société, et les étudiant(e)s ont engagé un recours pour contester la constitutionnalité de cette loi.

québec,liberté de manifestation,liberté d'expressionLe débat est intéressant pour le Québec… et pour la France, car c’est ce régime de déclaration préalable que nous connaissons, et ce depuis le décret-loi du 23 octobre 1935 « portant réglementation des mesures relatives au renforcement du maintien de l'ordre public ».
Selon l’article 1 de ce texte, "sont soumis à l'obligation d'une déclaration préalable, tous cortèges, défilés et rassemblements de personnes, et, d'une façon générale, toutes manifestations sur la voie publique".
Les Québécois se rebellent contre cette loi, alors que nous nous accommodons bêtement d’un régime encore plus restrictif, hérité de la période la plus troublée de la société française. On perd tout dans ses fers, comme disait l’ami Rousseau, même le désir de s’en libérer. N'oublions jamais que les plus belles libertés ont commencé dans la rue.

L’histoire de la Loi 78 

Au Québec, le mouvement de contestation étudiant portant sur le montant des droits d’inscription, a dérivé en conflit social majeur. En mars 300 000 des 400 000 étudiants étaient en grève. Le gouvernement a répliqué par une loi – la Loi 78 du 18 mai 2012 – qui remet en cause la liberté de manifester. Le conflit s’est déplacé, devenant un débat sur les libertés. Les associations étudiantes, appuyées par 70 organisations syndicales, sociales, environnementales et communautaires, ont déposé hier deux requêtes devant la Cour supérieure du District de Montréal.
La première vise à obtenir la suspension de l'application de certaines dispositions de la loi en l’attente d’une décision sur le fond. Elle devrait être examinée pour une première audience ce mercredi.
La deuxième a pour objet de faire invalider la loi dans son ensemble, les requérants l'estimant inconstitutionnelle et violant les principes du droit international tel que définis par le Pacte des droits civils et politiques de 1966. L’audience est fixée 3 juillet.
Léo Bureau-Blouin, le porte-parole de la Fédération Etudiante Collégiale du Québec (FECQ), a trouvé le bon ton : « Il s'agit de la plus grande affaire constitutionnelle de l'histoire du Québec par le nombre de parties demanderesses et de personnes concernées, soit 1,5 million de Québécois. Nous n'instrumentalisons pas le système de justice. Nous sommes inquiets de voir le gouvernement s'attaquer à des droits fondamentaux ».
La loi impose de donner un avis huit heures avant la tenue d'une manifestation d'au moins 50 personnes, interdit les manifestations spontanées, et prévoit des sanctions financières lourdes. Les étudiants estiment qu’une série de dispositions de cette loi visent en fait à permettre à la police de gérer discrétionnairement les manifestations et la liberté d’expression, de telle sorte que ces libertés sont constitutionnellement atteintes. Ils soulignent le processus d’adoption de la loi qui vise effectivement à les priver du seul moyen d'action réel pour exprimer leurs revendications et obtenir un soutien. Léo Bureau-Blouin ajoute : « Le gouvernement connaît nos moyens. Il a fait la loi sur mesure pour détruire les associations étudiantes, particulièrement celles qui sont qui sont combatives ».
D’ici là, les étudiant font leur compte pour voir s'ils pourront payer les amendes... La mobilisation, comme le moral, semblent au beau fixe car un tel mouvement repose sur des ressorts puissants qui dépassent, et de loin, la question des droits d’inscription à l’université. Le Barreau a estimé la loi inacceptable de la loi et les étudiants ont le soutien de 45 professeurs de droit. Plus de 500 avocats se sont portés bénévoles pour aider les étudiants.
Le gouvernement Charest a confié sa défense au ministre des Transports (d’allégresse ?), Pierre Moreau, qui ne se montre pas impressionné par le caractère massif du recours : « J'ai plaidé assez longtemps pour savoir que ce qui est important ce n'est pas le nombre de demandeurs, c'est la qualité des représentations. Le gouvernement n'a pas préparé la loi sur le coin d'une table, on a des constitutionnalistes, des légistes qui pensent que la loi va résister ».

Les textes de référence

Les textes de références sont d’une rédaction très sobre.
- Charte québécoise des Droits et Libertés de la personne
Article 3 : « Toute personne est titulaire des libertés fondamentales telles la liberté de conscience, la liberté de religion, la liberté d’opinion, la liberté d’expression, la liberté de réunion pacifique et la liberté d’association ».
- Charte canadienne des droits et liberté
Article 2. Chacun a les libertés fondamentales suivantes :
a) liberté de conscience et de religion;
b) liberté de pensée, de croyance, d'opinion et d'expression, y compris la liberté de la presse et des autres moyens de communication;
c) liberté de réunion pacifique;
d) liberté d'association.

Alors cette requête ?

Voici le texte de la requête argumentant la négation de la liberté de réunion pacifique et de la liberté d’expression. La totalité du texte ici.

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