J’ai lu récemment dans un journal allemand que les classiques des livres pour
enfants étaient réédités avec des corrections conformes au politiquement
correct. On supprime en particulier le mot « nègre ».
Ainsi, dans un épisode de « La Petite Sorcière » de Otfried Preußler, paru en
1957, les enfants jouent à se déguiser : en chinois, en turcs, et en nègres.
L’éditeur veut changer tout cela mais se demande encore comment. Tout
déguisement peut être insultant pour celui qu’on imite, si celui-ci est assez
con pour voir le Ku Klux Klan dans un jeu d’enfants.
La célèbre Fifi Brindacier, Pippi Langstrump en VO suédoise des années 40 et
Pippi Langstrumpf en allemand, ne pourra plus rêver d’être une « princesse
nègre », mais devra se contenter d’être une « princesse des mers du sud ». Si on
garde les illustrations d’origine, on aura une Océanienne dans le texte et une
Africaine sur l’image. Bravo la leçon de Géo pour les gosses !
Michael Ende, l’auteur de « L’Histoire sans fin », a écrit le conte de « Jim
Knopf et Lukas le chauffeur de locomotive ». À l’époque de la vapeur, Lukas
n’arrive jamais à se blanchir complètement de la suie qui couvre son visage, et
Jim Knopf est un « petit nègre ». Michael Ende raconte leur histoire de manière
loufoque en se moquant de tout le monde, sauf justement de ces deux « gueules
noires », isolées dans un monde de blancs. Eh bien, on va aplanir tous les gags,
se livrer à un vrai massacre, pour enlever partout le mot « nègre ».
Et le « Struwwelpeter » de 1845, traduit par Cavanna sous le titre de
« Crasse Tignasse » et dans d’autres versions par « Pierre l’Ebouriffé ». Dans
ce livre, St Nicolas punit trois garnements qui se moquent d’un « petit nègre »
en les trempant dans de l’encre. L’article ne dit pas ce qu’on va en faire. Mais
comme, en plus, c’est écrit en vers, bonjour le respect de la métrique !
Avec mon goût prononcé pour la provoc, je propose que l’on aille plus
loin.
Ainsi, Agatha Christie a écrit « Dix statuettes d’enfants de couleur », Léo
Ferré chantait « Dieu est un Américain d’origine africaine » (Bien du plaisir à
celui qui adaptera la musique !), Picasso a été très influencé par l’art des
mers du sud, Aimé Césaire et Léopold Sédar Senghor ont été les chantres de
l’hommedecouleuritude, ce qui expliquerait pourquoi Césaire a fini assez diminué
pour soutenir Sarkosène Royal. Bien entendu, tout le monde a entendu un jour la
célèbre chanson d’Yves Montand « Mon pote issu des gens du voyage ». (Bien du
plaisir de nouveau pour l’arrangeur musical !)
En réalité, je proposerais plutôt qu’on arrête les conneries.
D’abord, les enfants ne deviennent pas racistes parce qu’il y a le mot « roi
nègre » dans une histoire de déguisement. Ils le deviennent si leurs parents
leur apprennent à détester l’autre pour sa race. Tous les vieux militants
antiracistes ont lu « Tintin au Congo » dans leur enfance. (Pardon ! Les
militants antiracistes « du troisième âge » !)
Il faut arrêter de rendre des mots tabous indépendamment de leur
contexte.
Et surtout, arrêter l’hypocrisie qui va avec. Car ceux qui n’osent pas
prononcer les mots pour dire si quelqu’un est noir, juif, jaune, vieux ou
infirme, ce sont ceux qui sont encore gênés en présence des noirs, des juifs,
des jaunes, des vieux, des infirmes et que sais-je encore.
Moi, je m’en fous d’être vieux, sourd, chauve, petit avec de grandes oreilles
et un peu fou sur les marges. Et je ne suis pas gêné en présence de ceux qui le
sont aussi. Ni en présence de noirs, de juifs et autres homos !
Et je n’ai pas envie de me gêner avec les tartuffes. Montrons leur ce sein
qu’ils ne sauraient voir !
Personnellement, je trouve superbes les beautés noires, et ceux qui y voient
du sexisme et du racisme sont des cons et je les emmerde. Le racisme m’est
étranger, ce qui me permet d’appeler un chat un chat sans que les chats se
sentent insultés (mais les chats sont souvent moins cons que les humains). Et la
Nature est d’accord avec moi, elle qui est quasiment incapable de produire une
métisse moche. (Les dames et les homos seront sans doute du même avis en ce qui
concerne les garçons métis.)
Une fois, j’avais écrit un texte sur le danger de dérive antisémite de
l’anti-sionisme. Quand, la nécessaire critique de Tsahal vire à la haine contre
le boucher kasher du coin chez certains jeunes banlieusards. Une dame très à
gauche a compté le nombre de fois que j’utilisais le mot « juif » dans le texte,
mais sans le lire, et a fini par y voir de l’antisémitisme. Et comme j’évoquais,
en bon germaniste, le danger de voir les Juifs liés pour des générations aux
crimes sionistes comme les Allemands aux crimes nazis, un participant au forum a
soutenu cette dame en me traitant par dessus le marché de « guttural », puisque
germaniste. Bon vieux racisme anti-allemand, qui veut que le « ach », équivalent
de la « jota » espagnole, symbolise la brutalité de tout un peuple, racisme
d’autant plus ridicule que l’un des dialectes germaniques qui utilise le plus ce
son guttural, c’est le yiddish !
Une autre fois, dans mon anti-carrière de prof, je suis passé pour raciste.
Un Marocain bousculait un petit Turc, et quand je lui en ai fait reproche, il
m’a dit : « Mais Monsieur, c’est un Gitan ! ». Pauvre con que j’étais, j’ai
essayé de lui expliquer qu’étant lui-même très typé, il risquait un jour d’être
brimé par des racistes et que ce n’était pas malin de se servir du mot « Gitan »
comme insulte. Il en a conclu que je n’aimais pas les Arabes. Depuis, quand je
raconte qu’on m’a pris pour un raciste parce que j’engueulais un Marocain qui
traitait un Turc de Gitan, les gens rigolent. Je ne sais pas si c’est de
l’humour « d’origine africaine », mais moi, ça me fait rire « asiatique ».
Merde ! Voilà que je m’y mets moi aussi, au politiquement correct.
Décidément, on y passe tous.
Mais vive les Nègres quand-même, nom d’un Gitan !
Et avec maître François, pas Villon mais l’autre, je vous dis merde, à vous,
hypocrites, bigots, vieux matagots, souffreteux bien enflés, torcols, idiots
plus que n’étaient les Goths ou les Ostrogoths, précurseurs des magots, porteurs
de haires, cagots, cafards empantouflés. gueux emmitouflés, frappards
écorniflés, bafoués, enflés, qui allumez les fureurs.
Ce n’est pas parce que Rabelais ignorait l’expression « politiquement
correct » qu’il manquait de vocabulaire. Faut pas croire !


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