lundi 1 juillet 2013

Au nom d'une culture de l'humanité supérieure

Ahmed Halfaoui                            

L'affaire de la " Femen " tunisienne prend de l'ampleur. La jeune Amina Souib a assuré sa notoriété et sa célébrité est faite pour un certain temps. La répression qui l'a frappée, en plus d'être indue par rapport à un geste qui aurait pu être perçu avec plus de sérénité et sans le déploiement de l'instance judiciaire, a été contre- productive pour les autorités.

À l'affût pour tout ce qui concerne les Arabes et assimilés, la presse occidentale y a trouvé matière à s'alimenter. Les Femen, aussi, se sont vues offrir une " cause " à défendre et s'agitent frénétiquement au grand bonheur des médias. Elles ont commencé par envoyer trois des leurs rejoindre Amina en prison, dans une opération commando, dont elles savaient l'issue et le bénéfice qu'elles allaient en tirer. Un beau coup de promotion de la marque ! La Tunisie est sous les feux de la rampe, même le président des Etats-Unis, en visite à Berlin, est interpellé par des filles aux seins nus : " Obama help FEMEN ! ". Rien que ça ! C'est tout juste s'il n'a pas été sollicité d'envoyer ses Gi's faire rendre gorge au gouvernement tunisien. François Hollande, le président français, doit se rendre en Tunisie en juillet, une lettre lui a été écrite par un groupe de personnalités, qui contient ce passsage : " Au moment où il foulera le sol de Tunis (…) nous lui demandons de garder en tête quatre visages et prénoms. Amina, Pauline, Joséphine et Marguerite. Une Tunisienne, une Allemande et deux Françaises. "
La cause des femmes de nos contrées, surgit dans le débat et nos féministes sont, au départ, plutôt gênées aux entournures par la nouvelle donne. Elles ne savent quoi penser de ce " sextrémisme " censé les émanciper. L'incarcération d'Amina de même compliquait l'attitude à avoir. Sortir les seins à l'air, pour exprimer la complexité du statut social de la femme, est une forme d'expression inattendue, même en Occident ou, ceci dit, le geste est sévèrement réprimé (jusqu'à un an d'emprisonnement et 1 200 euros d'amende pour ce qui est de la France). Mais elles comprennent vite les enjeux. " Le féminisme dans le monde musulman n'est pas né avec la création d'une page Facebook, mais il est apparu dès les années vingt en Egypte " nous dit Saïda Ounissi chercheuse à Paris, dans un article où elle expose le préjudice fait au combat des Tunisiennes, réduites à des victimes en attente du salut venu d'ailleurs. Soumia Salhi, figure algérienne de ce combat, est plus incisive. Pour elle, les Femen "caressent dans le sens du poil la société de la pornographie, de la prostitution de masse ... elles n'ont aucune solidarité avec les Tunisiennes mais plutôt du mépris ! Pétries de leurs certitudes, elles piétinent l'environnement des " indigènes" au nom d'une culture de l'humanité supérieure!! C'est ce rapport société civilisée / société barbare qu'on veut nous inculquer pour légitimer la recolonisation en cours. Le féminisme n'a rien à voir avec ça ! "

Une synthèse implacable de lucidité, quand nous savons comment la lutte " contre le terrorisme " en Afghanistan, a utilisé le sort fait aux femmes par les Talibans et ce qui en a réellement été après la chute de ces derniers.

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