Amira Haas

Les Palestiniens se retrouvent obligés de louer la terre des colons vu la
pénurie de la terre et de l’eau provoquée par la politique israélienne dans la
Vallée du Jourdain et à cause des restrictions concernant la commercialisation
de leurs produits.
Cette transaction va à l’encontre même des règles émises par le Conseil
Régional de la Vallée du Jourdain et le Département des Colonies de
l’Organisation Sioniste Mondiale qui en pratique détient la majorité des terres
agricoles de l’état dans la vallée du Jourdain. Les règlements émis par ce
Conseil interdisent de louer la terre à d’autres citoyens. Mais cette terre
agricole est la terre qu’Israël a confisquée par différents moyens aux
Palestiniens, puis attribuée à des colons dans la vallée du Jourdain.
Le journal Haaretz a interrogé en différents endroits de la Vallée du
Jourdain une dizaine de Palestiniens qui louent la terre d’un certain nombre de
colonies. Quelques uns d’entre eux ont d’abord caché le fait qu’ils louaient et
disaient qu’ils étaient employés auprès des Israéliens qui possédaient la
terre.
Nombre d’entre eux ont dit que cette pratique existait depuis les années 90,
quand Israël a institué les permis pour voyager, qui ont limité leurs
déplacements. Cette politique s’est étendue dans les années 2000 avec la clôture
du marché du travail israélien pour la majorité des résidents de Cisjordanie. La
taille des terres louées aux Palestiniens oscille de quelques dunams à des
centaines de dunams.
Certains des locataires sont des citoyens israéliens, juifs et arabes, qui
embauchent des travailleurs palestiniens de la Vallée du Jourdain. Dans certains
cas, surtout si le terrain loué n’est pas grand, la transaction est faite sans
signer aucun document. Il y a aussi des contrats moins nombreux entre colons
juifs et Palestiniens de la Vallée du Jourdain.
Dror Etkes, qui enquête sur la politique israélienne d’expropriation de la
terre en Cisjordanie, est en train de finir un projet de cartographie et de
description de l’agriculture israélienne en Cisjordanie. Il dit qu’il a réussi à
inventorier environ 6000 dunams (approximativement 600 hectares) loués par les
Israéliens aux Palestiniens, ou si non à leurs représentants, dans la Vallée du
Jourdain. Etkes estime qu’il y en a en réalité beaucoup plus.
L’« Administration civile », c’est à dire l’Armée israélienne dans les
territoires occupés, a dit qu’elle n’était pas au courant de cette affaire.
Leader des colons : « Pas entendu parler de ça ».
Le président du Comité agricole du Conseil régional de la vallée du Jourdain,
Zvi Avner, a déclaré au journal Haaretz que personnellement il n’était pas au
courant de ces colons qui loueraient la terre aux Palestiniens. « Peut-être que
ça se passe ici ou là dans la périphérie », a-t-il dit. Avner a affirmé que les
terres des colonies dans la vallée du Jourdain étaient des terres de l’état.
Dans quelques cas les locataires sont résidents dans une communauté loin de
la terre agricole et dorment dans les champs pendant la semaine. Dans de
nombreux cas la terre louée est loin des colonies elles-mêmes, ce qui facilite
sa location, du point de vue des colons, souligne Etkes.
Tous les locataires ont dit que leurs produits étaient étiquetés comme
« israéliens » et qu’ils n’avaient pas besoin de les transporter vers Israël par
des passages frontaliers lointains, comme ils sont obligés de le faire avec les
produits « palestiniens ». Pour eux ceci signifie un coût beaucoup moins
important. Mais les locataires se plaignent que, dans la plupart des cas, ils font
très peu de bénéfices, et même perdent de l’argent, à cause de la rude
concurrence avec les agriculteurs israéliens qui ont des subventions et une
mécanisation développée.
Les locataires ont informé Etkes et le journal Haaretz qu’ils payent entre 40
et 300 shekels par dunam et par an dans des endroits où il existe une
infrastructure pour l’eau. Le paiement de l’eau est séparé et les Palestiniens
payent les israéliens environ 3 shekels par mètre cube d’eau. Ce prix garantit
un bénéfice pour le propriétaire puisqu’il paye moins cher cette eau qu’il est
sensé utiliser.
Avner, qui est à la tête du Comité agricole depuis 17 ans, a informé le
journal Haaretz que les agriculteurs israéliens dans la Vallée du Jourdain
payent en moyenne 2,10 shekels par mètre cube d’eau. Le quota d’eau pour les
agriculteurs israéliens dans la Vallée du Jourdain est de 42000 mètres cube pour
chaque terrain de 35 dunams, et le prix est échelonné en trois paliers, dont le
premier est de 1,90 shekels pour 50% de l’eau.
Depuis des années Israël contrôle à peu près 77% de la terre dans la vallée
du Jourdain –quelque 125.000 hectares sur 160.000. Ce sont les réserves de terre
naturelles des communautés palestiniennes, que ce soit pour le pâturage ou pour
l’agriculture.
Riche en eau
La Vallée du Jourdain est particulièrement riche en sources. L’Autorité
palestinienne voit cette région comme le futur grenier de l’état palestinien,
une région où ils pourront s’établir et se développer, en suivant l’exemple de
la Jordanie. Mais sous les Accords d’Oslo, Israël continue à contrôler les
ressources en eau de la Cisjordanie : il définit les quotas en eau pour les
palestiniens en utilisant son véto sur toute nouvelle construction de puits par
les palestiniens, et refuse d’approuver la reconstruction des puits qui ont été
détruits.
Une grande partie du forage d’eau d’Israël en Cisjordanie, 69% environ, se
trouve dans la vallée du Jourdain. L’eau de ces puits est utilisée par les
colonies dans la Vallée du Jourdain, sauf pour quelques villages palestiniens
dans le nord et centre de la Vallée du Jourdain où les puits ont été séchés par
le forage israélien et qui maintenant obtiennent un quota de la Compagnie
Nationale des Eaux Mekorot, un quota qui diminue année après année.
Source : http://www.haaretz.com/news/diploma...
(Traduit par Annie et Pedro pour CAPJPO-EuroPalestine)
CAPJPO-EuroPalestine
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