Plus un voyou sévit, plus, au fil du temps, ses actions paraissent
anodines, comme naturelles et attendues. Il en est de même pour les nouvelles
confiscations d’avoirs que les Etats-Unis viennent de décider. Cette fois les victimes sont
des personnalités du Sud Soudan. Le président Barack Obama vient de lancer une série de « sanctions »
contre des personnes aussi bien parmi les rebelles qu’au sein du gouvernement au
Soudan du Sud.
Le motif, vous l’avez bien sûr deviné :
violations des droits de l’homme et menaces contre les efforts de paix. Pour ce
qui est des violations des droits de l’Homme, il n’est plus besoin de disserter
là-dessus, tout peut être mis dedans, sauf les tueries de masse provoquées, en
vue de mettre en place la Démocratie, par des missiles sortis tout droit des usines américaines. Quant aux
menaces contre la paix, il suffit de répondre « Oui » là où il fallait répondre
« Non » à un représentant de l’ONU, ou inversement, pour être un dangereux
malfaisant menaçant la sérénité des américains, et donc la paix dans le
monde.
Il n’y a pas si longtemps, on osait encore
évoquer l’illégalité des sanctions prise en dehors du cadre de l’ONU. On disait
même que cela équivalait à une déclaration de guerre. Aujourd’hui, parler d’illégalité des sanctions
unilatérales n’a plus aucun sens. C’est même le contraire qui est en train de se
mettre en place. À force de sanctionner à droite et à gauche, suivis par les
habituels supplétifs, et cela en parfaite illégalité, les Etats-Unis ont fini
par instituer, de facto, une situation mondiale dans laquelle toutes les
sanctions qu’ils décident, quelle que soit leur nature, est légitime et normale.
Ils vont même jusqu’à prétendre qu’elles sont faites pour faire respecter la
légalité.
Washington peut ainsi bloquer les ressources d’un
pays, lui couper les vivres, confisquer ses avoirs, menacer ses dirigeants,
etc… Il est tout aussi prompt à faire appel à la légalité internationale si un
autre pays s’avisait de faire quoi que ce soit qui puisse, de près ou de loin,
ressembler à ce qu’il fait. On a vu récemment un Obama au grand cœur menacer la
Russie si elle utilisait le gaz et son prix comme moyens de pression, alors que
dans le même temps, il est en train d’œuvrer pour utiliser ce même gaz pour
tenter d’étrangler l’économie russe. « Nous nous battons, mais il est illégal de
vous défendre ». Tel est le crédo des Etats-Unis.
Devenues une arme suprême, les sanctions
affaiblissent l’adversaire, c’est certain, jusqu’à le mettre KO debout, tout en
renforçant toujours plus les Etats-Unis. Mais il y a un effet collatéral
inattendu. L’Europe, toujours empressée à suivre par obéissance aveugle au nom
d’une alliance très asymétrique, en est une victime majeure. Dans la mesure où
toute sanction n’est prise que dans la seule perspective des intérêts de
l’économie américaine, l’Europe ne peut qu’en pâtir, un pays après l’autre. Si
elle s’affaiblit de plus en plus, au point de n’être plus que l’ombre
nostalgique de ce qu’elle fut par le passé, cela est dû en grande partie à
toutes ces sanctions et tous ces embargos qu’elle se croit obligée d’appliquer
sur ordre de Washington contre ses propres intérêts.
Sans L’Europe, les sanctions étasuniennes ne
pèsent pas lourd et se transformeraient vite en auto-flagellation. On constate,
curieusement, qu’aux Etats-Unis, toutes les sanctions sont débattues et votées
par les élus. Et que pas une seule sanction appliquée par les européens n’a
été soumise aux parlements nationaux. Comme si le parlement suprême se
trouvait au Capitole. Ce n’est plus une alliance, c’est de la soumission. Une
soumission d’esclave docile au service d’un maître à qui tout profite. Dans les
anciens pays colonisés, au moins, il y avait, ici ou là, quelques révoltes.
Dans
l’ancienne Union Soviétique, aussi, on trouvait toujours quelques
dissidents qui tentaient de fuir des conditions qu’ils n’acceptaient pas. Rien
de tout ça dans l’Europe d’aujourd’hui. Elle me rappelle la fable de la Fontaine « Le loup et le chien ». À cette différence près
que l’Europe serait encore plus grasse si elle se libérait de son collier.
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