samedi 5 avril 2014

Vive notre liberté retrouvée !

Noël Mamère   

"Ce que nous n’avons pu faire par le sommet, nous allons essayer de le réussir par la base. L’heure est au combat et aux luttes de terrain. Pour que vive l’écologie qui doit retrouver tout son sens et sa dignité."
 
Après vingt-deux mois de participation difficile au gouvernement de Jean-Marc Ayrault, de déconvenues, de mauvais coups encaissés en silence, nos deux ex-ministres écologistes ont donc décidé de ne pas faire partie de l’équipe Valls.
Ils ne partagent pas la ligne politique qu’il incarne, considérée comme la réponse « inadéquate » à la déculottée du PS aux municipales. À la souffrance exprimée par nombre d’électeurs, le président de la République a donc choisi le plus à droite du PS, social-libéral et autoritaire.
Une réponse à côté de la plaque qui risque de virer au cauchemar dans les mois qui viennent. Une équipe dans laquelle les écologistes n’ont rien à faire.
Cécile Duflot et Pascal Canfin ont eu raison de quitter cette galère. Du sommet de l’Etat, ils ont regardé le plancher des vaches et se sont aperçus que les écologistes retrouvaient la confiance des électeurs chaque fois qu’ils se présentaient sous leurs couleurs.
Nous sommes en effet la seule composante de la gauche à avoir aussi bien résisté à l’effondrement du socialisme municipal. Dois-je ici rappeler la belle victoire de Grenoble, les bons résultats de Nantes, Paris, Rennes, Lille… ?

Incarner une alternative à la gauche productiviste

Plutôt que de chercher des prétextes et des arrangements pour justifier notre présence au gouvernement - ce que veulent encore une bonne partie de cadres d’EELV, qui semblent n’avoir rien compris à la situation – nous devons maintenant nous ressourcer dans notre autonomie, retrouver notre liberté pour incarner une alternative à la gauche productiviste.
Car c’est bien de cela qu’il s’agit : d’un problème culturel entre les écologistes et la vieille gauche, devenu problème politique tant nos deux visions du monde sont éloignées.
Qu’avons-nous à faire avec un Montebourg, futur poids lourd de ce gouvernement, qui relançait la question des gaz de schiste dès mardi matin ? Comment l’un ou l’une des nôtres pourrait-il siéger au côté d’Anne Lauvergeon, ancienne patronne d’Areva et VRP du nucléaire ?
Comment croire aux promesses de transition énergétique quand le dernier rapport remis à la commission chargée de la préparation de la loi « oublie » les promesses de réduction de 75 % à 50 % du nucléaire ? Pourquoi avoir reporté, sine die, le troisième appel à projet sur les transports collectifs alors que les pics de pollution se multiplient ?
Affolé par la défection de Cécile Duflot et de Pascal Canfin, le nouveau Premier ministre a passé son mardi à essayer « d’acheter » les écologistes, en leur promettant tout et n’importe quoi pour justifier d’une caution verte dont il a tant besoin.
À l’heure où j’écris ces lignes, je ne sais si le subterfuge a fonctionné, mais je peux confirmer ici que la tentation est grande chez quelques-uns de nos parlementaires de céder aux sirènes de Matignon et de l’Elysée.
Après les déclarations de Cécile Duflot et de Pascal Canfin - accusés par ces mêmes parlementaires gourmands de s’être prononcés trop vite –, ce serait une faute politique que de céder.
Au passage, nous touchons là les limites d’une Cinquième République pervertie par la dérive présidentialiste où l’on se donne moins de vingt-quatre heures pour discuter avec ses partenaires des grandes orientations politiques du gouvernement. Faute d’une dose sérieuse de proportionnelle, à l’instar de l’Allemagne, nous sommes condamnés aux petits marchandages plutôt qu’aux réelles négociations politiques. Où sont les promesses d’une Sixième République ?

On ne construit pas de bonnes alliances sur des malentendus

Nous ne voulons pas du pacte de responsabilité, en l’état, nous ne sommes pas d’accord avec les 50 milliards d’économie qui pourraient être massivement investis dans la transition énergétique, créatrice d’emplois et d’innovation ; nous ne savons pas ce que sera ce « pacte de solidarité », sorti du chapeau après la déroute électorale...
Comme le disait en son temps Martine Aubry, la meilleure ennemie de François Hollande, « quand c’est flou, c’est qu’il y a un loup ». Et nous ne pouvons pas nous contenter de ce flou qui mine la société et tue la gauche.
Aujourd’hui, nous payons au prix fort les « oublis » et les silences de notre accord passé avec les socialistes en novembre 2011. On ne construit pas de bonnes alliances sur des malentendus.

Ce que nous n’avons pu faire par le sommet, nous allons essayer de le réussir par la base. L’heure est au combat et aux luttes de terrain. Pour que vive l’écologie qui doit retrouver tout son sens et sa dignité.

Photo : lepoint.fr

reporterre.net

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