Gérard Filoche
C’est moderne hein, la transition énergétique ? C’est nécessaire de
mettre en oeuvre des énergies renouvelables, n’est ce pas ?
À ce titre,
par exemple, à Arsac en Gironde, à la frontière du Médoc et de la
banlieue bordelaise, le chantier d’une ferme photovoltaïque présente
beaucoup d’intérêt : commencé en juillet, il s’étale sur 160 hectares et
devait être achevé en début d’année 2015.
Mais ce qui n’est pas « moderne », c’est que la société « Solaire
direct » maitre d’ouvrage, prenne en sous-traitance une entreprise
hongroise Olp Tech, elle-même sous-traitante d’une entreprise allemande
Krinner, ce qui aboutit à ce que 31 ouvriers hongrois « détachés » y
travaillaient à des prix défiant toute concurrence. Leur “rémunération”
reposait sur une base quotidienne de 8 heures pour une durée effective
de travail de 11 h 30, 6 jours sur 7 soit un salaire de 2,22 € par heure
effectuée.
Selon le Préfet : « Le fait que des salariés d’autres pays, comme
la Hongrie qui est dans l’Union européenne, viennent chez nous, n’est
pas en soi critiquable. Ce n’est pas ça. C’est le détournement des
règles. Et derrière cela, des prix tirés vers le bas dans tous les
appels d’offres. C’est un dumping social que l’on ne peut pas cautionner ».
Mais qui fait ce dumping social ? En
Hongrie, le montant du Smic mensuel est de 344, 24 euros. En France, il
est de 1 445, 38 euros. Il ne faut pas s’en prendre à “l’Europe” qui,
hélas, est libérale, pas sociale et n’a pas de Smic européen. Mais bel
et bien au fraudeur, là, qui est bien un patron français lequel opère
sciemment un “montage” entre des “sociètés-écrans” hongroise et
allemande pour réduire à un quasi esclavage des salariés qui n’ont pas
le choix.
Monsieur le Préfet, ça, “c’est en soi critiquable” ! Ca s’abrite
derrière la scandaleuse notion de “travailleurs détachés” : la
directive européenne du 16 décembre 1996 précisait bien « que les
États membres de l’Union doivent veiller à ce que les entreprises
garantissent aux travailleurs détachés sur leur territoire les
conditions de travail et d’emploi qui sont fixées dans l’État sur le
territoire duquel le travail est exécuté ». Mais il a été accepté
ensuite que le paiement du salaire brut, des cotisations sociales, soit
aligné, lui, sur le taux des cotisations du pays d’origine. Autrement
dit, la partie sociale du salaire est payée au niveau hongrois,
polonaise, bulgare ou roumain. C’est artificiel et ce n’est pas
contrôlable. Après, il ne reste plus qu’à ne pas compter les heures
supplémentaires. On en arrive à 2,22 euros de l’heure. Ce qui fait qu’en
France, les patrons se ruent sur l’occasion : il y a 350 000
travailleurs détachés – au moins – selon les chiffres officiels du
Ministère du travail. Et c’est avec ça que les “grands majors” du
bâtiment, “nos” Bouygues, Vinci, Eiffage, etc… se font des montagnes
d’or. Ce n’est pas une affaire de mondialisation, sinon à l’envers. Ce
n’est pas une affaire de “crise”. Non c’est une affaire de pillage
cynique, violent et de gros sous.
Parions qu’en plus ils reçoivent le CICE, et qu’ils réclament de
“dé-cadenasser” leur entreprise, qu’ils veulent encore moins de code du
travail, moins de contrôle, qu’ils veulent simplifier leur feuille de
paie, et qu’ils manifestent contre le gouvernement !
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