On les disait perdus pour la cause,
lessivés, en voie de disparition, égarés par désespoir dans le délire
FN. Et les voilà, soudain ragaillardis, qui repiquent au front des
luttes sociales avec une vigueur qu’on ne leur soupçonnait plus !
Dix raffineries sur dix
bloquées, dockers, postiers, cheminots, ouvriers du transport aérien,
sortant des limbes où les médias pensaient les avoir cantonnés, pour
aller secouer les plumes à un pouvoir décontenancé et se rappeler au bon
souvenir d’une opinion éberluée. Vous avez dit 36 ? Vous avez dit 68 ?
On avait dit il y a quelque temps que si la #NuitDebout parvenait à rallier les ouvriers, ça ferait mal. C’est fait.
En face, forcément, ça tente de réagir. Mais de manière si
téléphonée, si caricaturale, si stupidissime, que c’en est à pisser de
rire : « Minoritaires ! Pas légitimes !… » Pourquoi pas
« terroristes ! » pendant qu’on y est ?
Comme tout un chacun, je fais moi aussi partie des « usagers pris en
otages ». Mais je peux vous dire qu’en ce qui me concerne le syndrome de
Stockholm (empathie, voire franche sympathie des otages pour leurs
ravisseurs) fonctionne à plein.
Une dernière chose : j’ai souvent dit — et je ne le regrette pas dans
le contexte d’alors — pis que pendre de la CGT. Or voilà la vieille
centrale syndicale qui pilote ce mouvement d’insurrection ouvrière
radicale de main de maître. Allez-y, les gars, il est des situations où
j’adore qu’on me donne tort.
Photo : Le Havre : 2000 dockers rejoignent étudiants et lycéens pour une manifestation contre la loi El Khomri.
Le Yéti
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