Ce
n’est pas la Russie qui menace l’Europe, mais les Etats-Unis et ses
alliés de l’Organisation du traité de l’Atlantique nord (OTAN) qui
déstabilisent le monde, estiment Gabriel Galice, Daniele Ganser et Hans
von Sponeck, publié hier dans l’excellent Le Temps.
Gabriel Galice, président de l'Institut international de recherche pour la paix à Genève
Daniele Ganser, historien, auteur de Les armées secrètes de l’OTAN
Hans von Sponeck, ancien Secrétaire général adjoint de l’ONU.
L’OTAN menace notre sécurité
L’OTAN
masse des troupes et des armes aux marches de la Russie. Nous tenons à
exprimer notre inquiétude devant la propagande qui déforme la réalité
des menaces qui pèsent sur la paix. Cette propagande insidieuse fabrique
des ennemis imaginaires pour justifier le surdéveloppement de dépenses
militaires, des conquêtes de territoires ou de « parts de marché », des
prises de contrôle d’approvisionnement énergétique et pour corroder la
démocratie.
Dirigeants russes humiliés
Non,
la Russie n’est pas l’agresseur et ne menace aucunement les Pays
Baltes, la Pologne ou la Suède. À l’implosion de l’URSS et du Pacte de
Varsovie, la bévue stratégique des Etats-Unis et de leurs alliés a été
de ne pas refonder l’architecture internationale de sécurité. Oubliée la
Charte de Paris (1990) qui promettait la paix à l’Europe. Dans son
livre, Le Grand échiquier – l’Amérique et le reste du monde, Zbigniew
Brezinski posait en 1997 la question de savoir s’il fallait intégrer la
Russie dans l’OTAN et dans l’UE. Il finissait par privilégier la
sécurité tactique sur la paix stratégique, non sans prévoir que cela
déclencherait des réactions russes.
Il
préconisait l’intégration de l’Ukraine, l’un des cinq « pivots
géopolitiques » de l’Eurasie, dans l’OTAN et dans l’UE. En 2010, Charles A
Kupchan, Professeur à Georgetown University, proposait d’intégrer les
Russes dans l’OTAN. Oubliant la promesse des USA aux Russes, lors de la
réunification allemande, de ne pas étendre l’OTAN à l’Est, les
Occidentaux n’ont eu de cesse de repousser, d’encercler et d’humilier
les dirigeants russes successifs. Quoi que nous pensions du régime
russe, le principal défaut de Vladimir Poutine (et de bien d’autres pays
du monde), aux yeux des Occidentaux, est de cesser d’acquiescer aux
volontés hégémoniques occidentales.
La CIA en embuscade
Après
l’illégale guerre d’Irak, l’extension du nombre de pays membres de
l’OTAN et l’expansion tous azimuts de son aire d’action, le renversement
du régime de Kadhafi en Libye, puis ce que nous considérons comme un
coup d’Etat en Ukraine organisé et soutenu par les Etats-Unis, auront
été les lignes rouges déclenchant les ripostes russe et chinoise qui
avaient déjà constitué l’Organisation de Coopération de Shanghai après
le premier élargissement de l’OTAN. Il aura fallu les opérations en
Libye et en Ukraine et l’appui de l’occident (dès 2006 selon Time
Magazine du 19 décembre 2006) aux « rebelles » résolus à renverser le
régime syrien, pour que les Russes soutiennent surtout l’autonomie de la
Crimée et interviennent militairement en Syrie.
Tandis
que la CIA a surveillé l’élection présidentielle française de 2012, que
la NSA, espionne partout entreprises, organisations et particuliers, la
mode est d’imputer aux dirigeants russes une ingérence directe dans les
élections américaines, françaises, allemandes.
Les
pays européens renforcent leur alignement sur la politique étrangère
des Etats-Unis, embargo contre la Russie inclusivement. Le Président
François Hollande parachève la réintégration de la France dans le
commandement militaire de l’OTAN, entamée par Nicolas Sarkozy.
Et les pays neutres ?
Et les pays neutres ? La Suède rétablit la conscription, ce au moment de la diffusion sur Arte d’un reportage édifiant intitulé « Guerre froide dans le Grand Nord ».
L’Etat-major suédois manœuvrait naguère de concert avec l’OTAN et les
Etats-Unis, ce à l’insu du gouvernement d’Olof Palme qui préconisait la
détente avec Moscou… et qui en mourut assassiné. L’adhésion de la Suisse
au Partenariat pour la paix (ou PpP) de l’OTAN vaut-elle neutralité ?
William Perry, ex-Secrétaire à la Défense a déclaré : « La différence
entre l’adhésion pleine et entière à L’OTAN et le PpP doit tendre à
devenir plus ténue qu’une feuille de papier ». Des avions suisses
survolent la Baltique aux côtés de chasseurs de l’OTAN.
Non,
l’OTAN, devenue une alliance offensive, n’assure pas notre sécurité.
Misons sur l’Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe
(OSCE), dialoguons avec la Russie et mettons en œuvre les articles 46
et 47 de la Charte de l’ONU, stipulant un comité d’état-major auprès du
Conseil de Sécurité.
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