lundi 17 juillet 2017

Des mûres et des pas vertes

Olivier Cabanel          

La mure à ceci d'étrange est qu’elle peut être verte, et pourtant être mure…
Mais ce n’est pas le seul paradoxe…

En effet, certains, portés par un pessimisme de mauvais aloi, ne voient dans la ronce, porteuse pourtant de mures délicieuses, qu’une plante détestable qui envahit, agresse par ses piquants, et la jugent finalement peu utile, voire nuisible…
Pourtant, en creusant un peu, on pourrait découvrir des aspects positifs aux ronciers.
Ils confirment finalement que la notion « nuisible » a une fois de plus un coup dans l’aile, car les ronces protègent les jeunes arbres.
Des esprits attentifs n’auront pas manqué de remarquer que les ronces s’implantent généralement autour de jeunes arbustes, et disparaissent lorsque ceux-ci ont pris toute la place, protégeant ainsi des prédateurs, chevreuils et compagnie, les arbres naissants, proies faciles des cervidés.
Au-delà de cette utilité, les jeunes feuilles de ronces peuvent permettre la fabrication d’une sorte de thé noir…mais aussi, les tiges desséchées de la ronce, riches en moelle, servent de lieu de nidification à certaines abeilles solitaires, appelées rubicoles.
Finalement le roncier constitue un véritable écosystème à lui tout seul : de nombreuses espèces s’y protègent, s’y nourrissent et si reproduisent. lien
Quittons ces mures noires et sucrées pour le rouge de la colère…et de la pollution, car certains industriels nous en font voir des vertes et des pas mures, comme ces industriels qui continuent, légalement ou pas, de polluer.
Récemment l’entreprise Arcelor Mittal a été soupçonnée d’avoir rejeté illégalement de l’acide en pleine nature, et une enquête est ouverte. lien
Quant au citoyen qui a lancé l’alerte, il regrette maintenant de l’avoir fait, car, non seulement il a perdu son travail, mais il n’en trouve plus.
Sa situation familiale se dégrade, et il a déclaré : « je galère, mes enfants en ont pâti, mon couple a pris un coup. J’aurais dû me taire et continuer ma vie ». lien
Pourtant les gouvernements qui se succèdent affirment tous en chœur, « il faut protéger les lanceurs d’alerte »...
À Gardanne, le scandale continu, le vert a cédé la place au rouge, l’entreprise Altéo continuant à déverser ses boues toxiques dans la belle bleue.
C’est le professeur Henri Augier, président de l’UCL, (l’Union Calanque Littoral) qui lance le cri d’alarme.
Lors de la séance du 6 juillet dernier, le professeur s’indigne que le temps de parole des membres de la CDS (commission du suivi du site) a été limité, et qu'ils ne puissent assurer leur mission en toute indépendance.
Temps de parole inéquitable, en faveur d’Altéo, l’entreprise responsable des rejets toxiques, le préfet écourtant le temps de parole des intervenants hostiles à l’activité néfaste de l’entreprise, donnant la vedette à l’industriel, n’acceptant pas d’entendre l’expertise indépendante réalisée par des scientifiques, mais aussi des riverains, et différents experts.
L’UCL vient donc d’alerter le président de la république, ainsi que le ministre de l’écologie, de cette situation intenable, ce courrier prolongeant les autres actions déjà lancées : Plainte à Bruxelles contre l’Etat français, saisie du parquet national financier, et diffusion d’un document prouvant les fuites en mer générées par la canalisation qui déverse les poisons chimiques d’Altéo. lien
Pour les défenseurs de l’environnement que sont les membres de l’UCL, ce scandale n’a que trop duré, et il faut trouver une solution aux rejets toxiques qui menacent la population, tout en tentant de sauver l’emploi du personnel de l’entreprise, peut-être par la mise en place d’une station d’épuration performante, réclamant qu’aucun délai supplémentaire ne soit accordé au-delà de ces deux ans.
On se souvient que c’est l’ex premier ministre Valls, qui, contestant la décision de sa ministre de l’environnement, Ségolène Royal en l’occurrence, avait autorisé l’entreprise à continuer son activité, malgré la réalité de la pollution dégagée.

Que feront donc le nouveau ministre de l’environnement, et le premier ministre ?
L’avenir nous le dira, car comme aime dire mon vieil ami africain : « l’héritier du léopard hérite aussi de ses taches ».

agoravox.fr

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