jeudi 12 octobre 2017

Reconnaissance du drapeau européen : Macron ou la stratégie de la provocation


François Cocq

M. Macron ne supporte décidément pas l’altérité. Hors sa personne et ses idées, rien ne saurait exister.

Ainsi, au moment même où Jean-Luc Mélenchon prononçait à la tribune de l’Assemblée nationale un discours sur l’Europe qui fera date, le Président de la République tentait de faire diversion en annonçant qu’il ferait reconnaître par la France le drapeau européen lors du prochain conseil européen des 19 et 20 octobre prochains.
Il ne faut pas s’y tromper : il s’agit bien là d’une provocation à l’endroit de Jean-Luc Mélenchon dont le Président ne se cache pas : « Au moment où certains en France ont des débats où on se rétrécit et voudraient enlever le drapeau européen, je veux vous dire que lors du prochain Conseil européen, j’affirmerai officiellement que la France reconnaît le statut de l’hymne européen et du drapeau européen, ce qui ne permettra pas à certains d’enlever le drapeau européen de l’hémicycle français ou de tout autre lieu ».

En choisissant le moment même où Jean-Luc Mélenchon prononçait son discours, M. Macron cherche clairement à faire diversion pour ne pas avoir à répondre sur le fond. On comprend que M. Macron craigne que le transfert de souveraineté qu’il réclame (« Pour la France, le lieu où construire les outils de notre puissance et apporter la juste réponse aux défis qui se présentent, le lieu de notre souveraineté aujourd’hui, c’est l’Europe », discours aux ambassadeurs le 25 août) fasse peu de sens là où Jean-Luc Mélenchon a notamment rappelé la définition historique de la souveraineté, « l’autorité sans partage d’un groupe sur la population qui le compose et le territoire qu’il occupe et la légitimité de cette autorité sans partage, c’est la démocratie », pour mieux la remettre dans les mains du peuple puisque « c’est parce que la Loi est votée par tous qu’elle s’applique à tous. Il n’y a donc de souveraineté que dans le peuple » qui incarne « la puissance de la France qui est liée à la souveraineté de son peuple et pas à son commerce extérieur ou à ses échanges commerciaux ». M. Macron préfère donc créer une polémique médiatique pour court-circuiter le débat et éteindre la voix de Jean-Luc Mélenchon.

La méthode est médiocre. Et bien peu démocratique si l’on y jette un oeil. M. Macron s’apprête en effet à décider seul dans son coin, comme il s’en vante dans ses propos (« j’affirmerai officiellement que la France reconnaît le statut de l’hymne européen et du drapeau européen »), de ce que la Franc juge bon de reconnaître ou non quand, en termes de méthode, la France Insoumise avait au contraire proposé un amendement à l’Assemblée nationale pour permettre le débat sur la place du drapeau européen, chargé historiquement et religieusement, au sein de l’hémicycle.

La méthode est aussi bien peu convenable. Une fois encore, c’est depuis l’étranger, cette fois Francfort, que M. Macron fait des annonces qui concernent notre pays. Les Françaises et les Français mériteraient au moins que ce soit à eux que le Président fasse l’annonce d’un drapeau et d’un hymne qu’ils sont sensés reconnaître.

La méthode est enfin brutale. C’est dans moins de 10 jours que M. Macron entend imposer ces codes nouveaux chargés symboliquement et politiquement. Ce faisant, il cherche à étouffer le débat. Nous aurons pourtant l’occasion de lui rappeler dans les jours à venir pourquoi seulement 16 des 28 pays de l’Union ont reconnu drapeau et hymne européen, que cette reconnaissance a pris la forme de la signature d’une déclaration annexée au  traité de Lisbonne qui était un coup de force institutionnel de l’Union européen contre les peuples qui avaient rejeté le traité constitutionnel européen (TCE) trois ans auparavant. Nous lui rappellerons une fois encore le signifié du drapeau européen, de la vierge Marie et de ses étoiles. Et nous reviendrons sur la place centrale de la souveraineté populaire dont M. Macron fait décidément bien peu de cas lorsqu’il s’agit de donner des gages à ses amis de l’oligarchie bruxelloise.


L’urgence est-elle à une telle reconnaissance quand le pays s’est prononcé comme il l’a fait lors de la présidentielle ?  Autant par ses provocations que par son refus du débat argumenté pour chercher une sortie apaisée et utile pour le pays, M. Macron est un facteur de déséquilibre. Il feint l’affrontement sur la forme pour mieux se soustraire au débat sur le fond. Dans ces conditions, c’est le peuple et c’est La France qui payent le prix de son comportement de matamore.

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