lundi 30 avril 2018

Représailles occidentales en Syrie : le fiasco d’un très mauvais coup de com’


Pierrick Tillet

À mesure que l’on découvre ce qui s’est passé (ou non passé) à Douma et lors de l’intervention menée en représailles par l’axe américano-anglo-français, il s’avère que cette dernière intervention n’a été qu’une très mauvaise opération de communication uniquement destinée à abuser l’opinion publique des trois pays incriminés.

Probablement aucune attaque chimique à Douma, pas plus par l’armée syrienne que par les rebelles

Le premier constat, en attendant la conclusion finale de l’OIAC (Organisation pour l’interdiction des armes chimiques), c’est qu’il y a fort peu de chances qu’il y ait réellement eu une attaque chimique à Douma, que ce soit par les forces gouvernementales syriennes, ou même par les assiégés islamistes tentés par une provocation pour échapper à la nasse qui se refermait sur eux. En tout cas pas suffisamment pour justifier une action de représailles occidentale.
Les premiers journalistes occidentaux à pénétrer dans Douma, comme le reporter Robert Fisk qui a pu y circuler librement, sans aucun garde-chiourme à ses basques, ont pu constater l’absence de traces d’une telle attaque, tant dans les tunnels qui abritaient les rebelles et les habitants des bombardements syriens et russes, que dans l’unique clinique de la ville. Bien plus, tous les témoignages recueillis, par le reporter britannique mais aussi par bien d’autres de ses confrères, niaient la réalité d’une telle attaque, quand ils ne s’en gaussaient pas en parlant de montage grossier.
Reste le document publié à charges par le ministère français de la Défense pour tenter de nier ce qui apparaît de plus en plus comme une évidence. Le problème de ce document – que j’ai lu et vous engage à lire – est qu’il ne contient que de vagues supputations très approximatives, basées sur l’examen de documents audiovisuels circulant sur les réseaux sociaux et produits pour la plupart par les douteux Casques blancs, ces membres obscurs d’une organisation pseudo-humanitaire qui choisissent toujours de quitter les champs de bataille, à Alep comme dans la Ghouta, en empruntant les mêmes bus que les rescapés des milices islamistes.

Le fiasco de l’opération de représailles

Si, en l’état actuel de l’enquête internationale menée par l’OIAC sur place, rien ne justifiait une action punitive précipitée, de toute façon illégale dans tous les cas de figure sans mandat de l’ONU, que dire de l’incroyable fiasco de l’équipée menée par le trio américano-anglo-français ? Déjà, désigner à l’avance à l’ennemi les cibles choisies et prévenir prudemment le plus redoutable d’entre eux (la Russie) qu’il n’était pas visé en dit long sur la sûreté en soi et l’autorité des intervenants. La seule explication charitable de leur coup de force foireux est qu’ils ont juste cherché redorer leur blason auprès de leurs opinions publiques respectives.
Las, les trois Zorros ont tiré selon leurs informations 103 missiles, mais il apparaît déjà que plus de la moitié d’entre eux (71, disent les Russes) auraient été interceptés, détruits ou même capturés intacts au grand bénéfice de Moscou. Et que dire des ratés de l’armée française avec les échecs successifs d’un avion Rafale (contraint de larguer son missile Scalp défaillant en haute mer) et des deux frégates françaises préposées qui échouèrent à tirer leurs tout nouveaux “Missiles de croisière navale” (MdCN) scotchés dans leurs lanceurs ? Seul un navire de réserve parvint à sauver un honneur tricolore bien entamé en tirant ses envoyant trois malheureux engins.
Pour couronner le tout, il apparaît – mais est-ce une surprise ? – que le complexe de Barzeh détruit par les bombardements occidentaux ne recelait pas le moindre programme d’armement chimique syrien prétexté par ses assaillants pour justifier leurs objectifs. C’est en tout cas la conclusion de Robert Fisk qui put là encore librement circuler parmi les décombres, mais aussi celle des inspecteurs de l’OIAC arrivés sur place.
À ce niveau de fiasco, on ne sait si les trois vengeurs occidentaux parviendront à manipuler suffisamment leurs opinions publiques pour maquiller l’étendue des dégâts subis par eux, mais il y a fort à parier qu’ils n’ont certainement pas réussi à impressionner leurs adversaires d’en face. J’en connais même un qui doit bien rigoler à Moscou, et d’autres qui n’en pensent certainement pas moins à Pékin ou à Téhéran. 

On parle beaucoup aujourd’hui d’un risque de troisième guerre mondiale, mais sauf à tomber dans un apocalypse nucléaire définitif, on voit mal, après de tels “exploits”, l’équipe des justiciers occidentaux parvenir indemne en phase finale d’un tel conflit.

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