lundi 7 mai 2018

Du 5 au 26 mai, le joli pont de mai


François Cocq

Qui a vécu cette Fête à Macron en est ressorti avec de la joie, du bonheur, de l’allant, mais aussi de la fierté. Ce 5 mai est et restera comme une immense réussite.

Oh, le pari de la mobilisation à cette date n’était pas gagné. Par l’importance de la manifestation bien sûr : 160.000 personnes qui s’égrainent le long des boulevards, emplissant déjà la Bastille tandis que la queue de cortège n’est pas même entrée sur la place de la République, c’est le peuple qui se donne à voir quand la multitude s’érige en force du nombre. C’est un franchissement de seuil quantitatif qui permet à l’ensemble du mouvement initié par les cheminots, les fonctionnaires, les soignants, ceux de chez Carrefour, Air-France, GMS et ailleurs, de continuer à se propager.
Mais ce 5 mai est aussi une grande réussite par l’état d’esprit qui animait celles et ceux qui défilaient. Ceux-là étaient heureux de se retrouver là si nombreux. Déterminés à envoyer un message clair au chef de l’Etat à l’occasion de son premier anniversaire à l’Elysée : nous ne voulons pas de cette politique qui ne sert que la bourse des très riches au détriment de l’intérêt du peuple. Par delà la lutte, par delà les luttes, un état d’esprit commun a émergé en revendication commune : face à la monarchie présidentielle, nous voulons vivre et être traités dignement. En cela, nous refusons d’être cantonnés au rang de citoyens épisodiques et nous portons l’exigence de pouvoir exprimer nos droits civiques entre deux élections : la souveraineté ne se limite ni dans la sphère du droit, ni dans le temps. Voilà par quel biais nous entendons faire valoir nos justes revendications sociales. Ce réceptacle à l’équivalence de nos luttes s’affiche désormais comme une bascule qui retentit jusque dans les mots d’ordre : le traditionnel « Résistance » a par endroits laissé la place au duo plein de souffle et d’avenir « Résistance, Existence ! ».
De la fierté aussi. Chacun-e avait pleinement conscience de la contribution individuelle qu’il apportait par sa seule présence à la construction de la confluence syndico-politico-associative. Bref la libération, dans une forme d’unité et d’entièreté de la citoyenneté, de ce que jusqu’ici chacun-e faisait vivre là dans le syndicat, ailleurs dans l’organisation politique ou associative, mais déjà toujours en tant que membre de la Cité. Désormais, il n’est plus besoin de s’auto- parcelliser en fonction de la casquette ou de l’étiquette, souvent multiple, qu’il est la sienne. Et pouvoir s’exprimer pleinement crée un souffle nouveau qui entraîne.
Laissons aux esprits chagrins et au pouvoir macroniste le soin de disserter sur de prétendues divergences ou dissensions pour mieux masquer leur inquiétude devant l’émergence du phénomène. Chacun-e a pris toute sa part à l’initiative sans barguigner et le résultat en atteste. La France insoumise comme les autres a assumé sa part. Toute sa part. Que n’aurait-on dit si elle avait d’elle-même pris l’initiative ? Que n’aurait-on dit si elle n’avait pas mis la puissance de l’appel populaire qui est le sien au service du 5 mai ou si elle l’avait fait à moitié ? Ne peuvent aujourd’hui y trouver à redire que celles et ceux qui voudraient la voir réduite au silence. Esprits sectaires pour les uns. Intéressés pour les autres. L’ombre macroniste plane.
Car ce 5 mai n’est pas une finalité en soi. Il est un point d’étape vers le 26 mai. Ce jour-là, les graines semées ces derniers mois et qui ont commencé à bourgeonner ce samedi vont enfin pouvoir éclore partout en France à l’appel conjoint des confédérations syndicales, des organisations politiques, des associations, et agréger autour d’elles les citoyen-ne-s qui aspirent à une perspective concrète pour tous. Dès lors, et quelle que soit la suite, celle-ci reprendra où nous l’aurons collectivement amenée, à cette étape nouvelle du rapport citoyen au mouvement politique et social dans son ensemble.

Ce n’est pas le moindre des acquis et des points d’appuis pour les combats qu’ils nous restent à mener. Ah ! Les jolis ponts de mai…

Aucun commentaire: