François Cocq
La semaine dernière, je relatais ici
comment la politique de M. Macron apparaît désormais aux yeux du grand
nombre sous une forme nouvelle : elle n’est plus seulement vue comme
socialement injuste et moralement cynique, elle est aussi, et finalement
peut-être avant tout, inefficace.
C’est une chose de l’analyser et de
le prévoir en amont. C’en est une pour les gens que de pouvoir le
constater. Or désormais, tant dans le champ de la politique nationale,
et notamment dans son volet économique, que dans celui de la politique
internationale, la politique du président se trouve dans des impasses.
L’INSEE annonçait donc fin mai que la croissance du produit intérieur
brut (PIB) avait été limitée à 0,2% au premier trimestre, plus faible
progressions depuis l’automne 2016. Après quatre trimestre de hausse
entre 0.7% et 0.8% en 2017, c’était là ce que les commentateurs à la
solde du pouvoir devaient pourtant se résoudre à qualifier de
« ralentissement brutal ». En cause ? L’atonie de la consommation des
ménages bien sûr (+0.1%), mais aussi, et il faut le souligner car la
contradiction avec les promesses et objectifs de M. Macron s’avère
flagrante, celle de l’investissement des entreprises (+0.1% au premier
trimestre 2018 contre +1,7% fin 2017 !). La politique présidentielle
plombe donc les ménages, mais cela, chacun mis à part les plus riches
s’en était aperçu. On s’aperçoit qu’elle plonge par contre en retour
l’ensemble du pays dans l’expectative, crée un climat de désordre et
n’offre donc aucune garantie aux entreprises pour qu’elles puissent
raisonnablement se tourner vers l’avenir.
Cette semaine, ce sont les chiffres de l’emploi qui viennent
confirmer cette tendance. Sur les trois premiers mois de l’année, 48.800
nouveaux postes ont été créés selon l’Insee, un chiffre en net
ralentissement par rapport à la fin de l’année 2017. C’est là plus de
deux fois moins de créations que lors du trimestre précédent. Autrement
dit la politique de M. Macron commence à se décliner dans le champ du
réel et force est de constater qu’elle crée des ravages.
Sur la scène internationale, M. Macron ne rencontre pas plus de
succès. Sa danse du ventre devant Mme Merkel est restée sans effet pour
l’orientation de la construction européenne. Et voilà que ce week-end, M. Macron a fait passer la France à côté de l’occasion qui s’offrait à
elle de se placer en fer de lance d’un ordre international pour répondre
à M. Trump. Enfermé dans son « multilatéralisme », M. Macron a dû se
résoudre à entendre le président américain plaider pour le retour de la
Russie à la table des discussions, et plus encore à se trouver à la
remorque à la fois du Canada qui a osé défier M. Trump mais aussi de Mme
Merkel qui a pu l’envoyer dans les cordes en ayant déjà réorienté son
modèle économique vers l’est de l’Europe et l’Asie pour garantir les
excédents commerciaux qui sont au coeur de sa politique économique.
Bref, au moment-même où l’Empire se voyait ébranlé et où le monde entre
en phase d’instabilité, la France non seulement n’avait pas son mot à
dire mais qui plus est restée embourbée dans le multilatéralisme
théorisé par son président et auquel ce pathétique sommet du G7 donnait
pourtant le coup de grâce. L’Empire se désagrège et tout conduit à
penser que transition ne se fera pas sans casse. Et c’est pourtant dans
ce contexte que la France s’éclipse de la scène internationale et
abandonne la tâche qui devrait être la sienne de porter la légitimité du
seul cadre d’action qui vaille, celui d’un ordre international basé sur
l’ONU et réunissant toutes les parties prenantes.
Des militants sincères de LREM, des parlementaires du groupe à
l’Assemblée nationale, jusqu’aux économistes de la campagne de M. Macron
prennent conscience de l’impasse dans laquelle s’enferme par dogmatisme
la politique de M. Macron. Deux phénomènes s’entrechoquent alors :
d’un côté ceux qui regardent avec lucidité les résultats de cette
politique et en appellent pudiquement à un « rééquilibrage » ; de
l’autre ceux qui ont désormais la sensation d’avoir été floué pendant la
campagne. Car si jusqu’à présent M. Macron s’est réfugié dans le fait
de dire qu’il faisait ce qu’il avait annoncé – quand bien même nombre de
mesures ont été en cours de route sorties du chapeau – l’engagement
présidentiel ne tient plus car il présupposait à la fois le retour d’une
dynamique économique et la restauration de l’image de la France sur la
scène internationale. Deux domaines sur lesquels M. Macron est
incontestablement en échec.
C’est donc un moment de bascule important qui s’opère. Tardivement
diront certains. Peu importe, il fallait qu’il émane d’une réalité
palpable pour les gens. Nous y voilà. Et M. Macron peut bien jouer la
montre pour essayer d’atteindre ce qu’il croit être le refuge médiatique
de la coupe du monde de football, une vérité qui se révèle d’elle-même
ne pourra plus être à l’avenir masquée.
L’An II de la macronie commence
donc sous d’autres auspices.
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