Romain Loury
Située sur le site de Lacq, une usine du laboratoire pharmaceutique
Sanofi aurait explosé les valeurs limite d’émission de plusieurs
polluants cancérigènes et reprotoxiques. France Nature Environnement et
la Sepanso vont porter plainte. Un article de notre partenaire, le JDLE.
Révélée par France Info et Mediapart, l’affaire fait déjà du bruit.
D’autant que cette usine, située à Mourenx sur le site de Lacq (ex-plus
grand site gazier de France, dans les Pyrénées Atlantiques), est celle
qui fabrique le valproate, médicament antiépileptique qui aurait
entraîné entre 16 600 et 30 400 cas de troubles du développement
(malformations congénitales, troubles cognitifs, autisme, etc...) chez des
enfants exposés in utero au cours des dernières décennies.
L’usine dispose pourtant de trois tours d’abattement, censées traiter
ses émissions. Or une seule d’entre elles faisait l’objet d’une
surveillance des teneurs en polluants. Ce n’est qu’après avoir équipé
les deux autres tours, sur injonction de la Dreal [i], que le problème est apparu.
Un cancérigène à haute dose
Le bromopropane, solvant chimique au potentiel cancérigène, mutagène
et reprotoxique, y atteignait, en octobre 2017, un taux de 180 000 mg/m3
dans les effluents gazeux, de 380 000 mg/m3 en mars dernier.
Or selon un arrêté préfectoral de
2009, les effluents gazeux de l’usine ne doivent pas dépasser une
teneur de bromopropane de 2 mg/m3. Celles mesurées en octobre étaient
donc 190 000 fois au-dessus !
Éviter la fermeture administrative ?
Outre ces dépassements astronomiques, Sanofi aurait attendu six mois
avant d’informer la Dreal, alors qu’il aurait dû le faire immédiatement,
avancent la Sepanso 64 et France Nature Environnement.
« L’entreprise a pris le temps de s’organiser pour présenter des
solutions d’abattage de ces polluants et donc éviter la fermeture
administrative du site. Pourtant, ces solutions ne permettent pas
d’atteindre les limites déjà fixées et le temps qu’elles soient mises en
place, les salariés et les riverains continueront de respirer un
cocktail toxique », expliquent les associations.
Pas de surexposition selon Sanofi
Sanofi, qui reconnaît ces dépassements, indique dans un communiqué
avoir « diligenté une étude d’impact sanitaire auprès d’un organisme
indépendant qui a conclu que les populations ne sont pas exposées à des
niveaux supérieurs aux seuils fixés par la réglementation française ».
Contacté par le JDLE, le laboratoire n’a pas souhaité préciser
l’identité de l’organisme chargé de cette étude.
« Un plan d’actions a immédiatement été engagé par le site qui a mis
en place une unité de collecte et de traitement des rejets afin de les
réduire significativement. Cette unité est en cours de démarrage »,
ajoute Sanofi.
Un comité de suivi du site se tiendra mercredi 11 juillet en présence
de représentants de Sanofi, de la Dreal et des associations. Contactée
par le JDLE, Solène Demonet, en charge des risques industriels chez FNE,
indique qu’une plainte contre le laboratoire est en cours de rédaction.
En réaction à la polémique, Sanofi a annoncé, dans un communiqué
publié lundi 9 juillet en début de soirée, qu’il décidait « dès
aujourd’hui d’arrêter la production sur le site de Mourenx »,
et « d’opérer les améliorations techniques annoncées et indispensables à
un retour à la normale ».
Le laboratoire « a diligenté une enquête pour
mieux comprendre les causes et l’historique de la situation »,
ajoute-t-il.
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