Charles Sannat
Avant de démarrer, je vous souhaite à toutes et tous, à chacune et à
chacun, à celles et ceux qui me lisent, une bonne année, car au fond,
c’est le bonheur que nous cherchons tous.
Relisez cette phrase. Et
après, écoutez la dialectique de notre ministre de l’Intérieur et de nos
mamamouchis du gouvernement. Cela devrait vous faire sourire, car c’est
leurs éléments de langage systématiquement répétés.
Je vous
souhaite donc du fond du cœur une année où votre santé, la plus solide
possible, vous permettra de mener à bien vos projets. Je nous souhaite
collectivement de savoir retrouver le chemin de la concorde nationale et
la voie pour guérir notre pays. Nous sentons tous de façon plus ou
moins claire les pulsions terribles de violence qui tiraillent et
déchirent notre France. Nous savons tous, hélas, que c’est assez mal
parti.
Vous connaissez certainement la chanson, « 69, année
érotique »… Je n’ai pas pu m’empêcher d’adapter ce titre pour l’année
2019, qui s’annonce, pour rester sobre et pudique, pour le moins…
erratique.
Il n’y a pas de violence légitime !
Vous
avez sans doute tous en tête ces images où un désormais boxeur célèbre
français repousse à lui seul et à la force de ses poings quelques
gendarmes mobiles dépassés, après d’ailleurs en avoir tabassé un au sol.
Vous
avez sans doute moins en tête les images de toutes ces têtes défigurées
par des tirs de flash-ball en plein milieu des visages au mépris de
toutes les règles d’engagement et d’utilisation de la force.
Alors, aujourd’hui, et pour bien démarrer l’année, je souhaitais remettre l’église au milieu du village.
Il n’y a aucune violence légitime, et cela est évidemment valable pour nos forces de l’ordre.
Il n’y a que des violences indispensables, et cela n’a rien à voir.
Nous
sommes tous d’accord sur le fait d’exercer une violence indispensable
pour arrêter un terroriste en train de massacrer des innocents. Il n’y a
pas franchement de débat dans un tel cas. Ici, la violence n’est pas «
légitime ». Elle est indispensable.
Elle est indispensable pour préserver « plus » de vies !
Parler
de violence « légitime » de la part d’un État sur son propre peuple
légitime justement quelque chose qui n’est en aucun cas… légitime. C’est
la raison pour laquelle je préfère parler de violence indispensable.
Le
critère de violence indispensable est d’ailleurs, au fond, celui qui
est retenu par notre justice dans les histoires de légitime défense.
La violence était-elle indispensable pour préserver la vie de ma famille par exemple ?
Certains
peuvent considérer qu’il est légitime de « flinguer » le cambrioleur
qui fuit sur un scooter en pleine rue, et qui est déjà à 50 mètres et ne
représente plus une menace.
Je ne juge pas. Je « philosophe ».
Je
dis donc que si certains peuvent juger que l’abattre est « légitime »,
on peut aussi juger que la violence n’est pas « indispensable » à la
préservation de la vie puisque l’agression a « cessé ».
Se demander à chaque violence si elle est indispensable permet d’éviter justement les abus.
Ceux aussi bien des citoyens que des forces de l’ordre.
L’effet « foule », énervement ou testostérone est valable pour les « bleus » comme pour les « jaunes ».
Ce
commandant de police qui frappe à plusieurs reprises un jeune homme
désarmé, qui n’offre aucune résistance, de manière complètement
hallucinante, n’exerce aucune violence indispensable. Puis, il
recommence à plusieurs reprises. À chaque fois, d’autres policiers
viendront s’interposer (légitimement) pour faire cesser ces agressions.
Peu importe ce qui se passe avant.
La
violence des forces de l’ordre n’est pas une vengeance. Elle ne doit
jamais l’être. Aucun tabassage ne peut être justifié et n’est
justifiable.
C’est parce que la violence des policiers est indispensable qu’elle est acceptable et acceptée par tous les citoyens. Tout ce qui déroge à cette règle de bon sens sèmera les germes de violences futures encore plus grandes dont nous serons collectivement tous les victimes.
C’est parce que la violence des policiers est indispensable qu’elle est acceptable et acceptée par tous les citoyens. Tout ce qui déroge à cette règle de bon sens sèmera les germes de violences futures encore plus grandes dont nous serons collectivement tous les victimes.
La réalité d’un mouvement comme celui des
gilets jaunes pose évidemment le problème de la violence, mais quand on
pose le sujet de la violence, il n’est jamais le fait, ou très rarement,
d’un camp, mais généralement la conséquence d’un terrible cercle
vicieux.
Les violences se répondent entre elles. Elles s’agrègent.
Se complètent. S’amplifient. Nous ne sommes pas ici, avec les gilets
jaunes, dans le cadre de la violence liée à une délinquance de droit
commun, ce qui ne veut pas dire que cette violence soit justifiable.
Ces
violences vont se répondre de plus en plus rapidement et de plus en
plus fortement. Cela d’autant plus que manifestement, les ordres donnés
aux forces de l’ordre sont à la limite des règles démocratiques. Il est,
à cet égard, indispensable de rappeler à chacun, gilets jaunes comme
gilets bleus, que l’on est toujours jugé individuellement.
La responsabilité individuelle prend une tournure très différente quand soufflent les grands vents.
Il
n’y a rien à espérer ni à attendre d’une répression de plus en plus
forte. De plus en plus aveugle. De plus en plus arbitraire.
Le
métier de nos gendarmes et de nos policiers est de donner du temps pour
que la réponse politique puisse s’exprimer dans un cadre de maintien de
l’ordre et d’ordre maintenu. Pas de permettre le maintien au pouvoir de
certains au détriment d’autres. Nuance complexe, certes, mais nuance
indispensable.
Dit autrement, les forces de l’ordre sont au
service de la République et de l’État, pas l’outil de quelques
représentants, fussent-ils élus, désignés par ceux qui ont été élus ou
encore hauts fonctionnaires.
En dépassant certaines limites, les
forces de l’ordre prennent le risque de passer, dans l’esprit des
citoyens, du statut de police à celui de milice patronale ou
oligarchique. Croyez-moi, c’est une dérive qui, si elle se poursuit,
sera terrible de conséquence pour tout le monde. Pourquoi ?
Parce
que la violence exercée des gilets bleus sur les gilets jaunes, devenant
« illégitime » dans la mesure où elle ne sera plus au service du
peuple, mais de la protection d’une petite caste honnie, ouvrira la
porte à toutes les outrances d’un côté comme de l’autre.
Pour
résumer, c’est parce qu’une violence est indispensable qu’elle est
légitime et donc acceptable. Pas parce qu’elle exercée par un homme
habillé en bleu au nom de l’État.
La France est un vieux pays, une
vieille nation comme le disait si bien Dominique de Villepin. Beaucoup
ont encore, dans l’inconscient collectif, une « certaine vision de la
France » et de ce qui y est possible ou impossible.
Il n’y aura de réponse réelle et durable que politique et démocratique
Depuis
le départ, j’explique qu’il n’y aura de réponse que démocratique, en
rendant au peuple le pouvoir qu’il réclame légitimement, car
contrairement à la violence qui n’est jamais légitime, mais parfois
indispensable, la souveraineté et le droit des peuples à disposer
d’eux-mêmes sont évidemment ce qu’il y a de plus légitime.
Cette
demande est d’ailleurs tellement légitime qu’elle est gravée dans à peu
près toutes les Déclarations des droits de l’homme ou constitutions de
pays dits « démocratiques ».
Je persiste dans mon analyse qui
consiste également à dire que nous ne sommes pas dans une jacquerie
fiscale, bien que les taxes soient le point de départ de la révolte,
mais dans un mouvement profondément révolutionnaire par essence et par
nature et qui vise une réappropriation du pouvoir par le peuple et pour
le peuple, ce qui, disons-le sans ambiguïté, est un vrai sujet.
Malgré
les cris d’orfraie de nos politiciens qui hurlent que c’est la
République qui est attaquée, mon analyse est très différente sur ce
point précis. La République n’est pas attaquée. Les manifestants
entonnent l’hymne de la République, brandissent son étendard. La
République n’est pas rejetée. Ce sont les représentants et les
mamamouchis actuels qui provoquent un rejet terrible. En voici la
raison.
Le fond du sujet, c’est qu’évidemment les peuples
européens subissent depuis plus de 10 ans maintenant des successions
ininterrompues de dénis de démocratie.
Des élites « éclairées » se
sont arrogé le droit de penser pour tous et de faire la politique
qu’ils souhaitent contre les peuples qu’ils sont censés représenter.
On
ne peut pas éternellement mener une politique contre son propre peuple
sans qu’il n’y ait, à un moment donné, de conséquences désagréables.
Cela
fait des années que vous pouvez trouver en fin de chacun de mes éditos
cette citation de JFK : « À vouloir étouffer les révolutions pacifiques,
on rend inévitables les révolutions violentes ».
Cela n’est pas
un hasard. Le chemin que nous empruntons ne peut nous mener qu’à cette
alternative. Ce n’est pas faute de prévenir et d’alerter depuis des
années et des années. Je suis évidemment favorable aux révolutions
pacifiques pour éviter à tout prix les révolutions violentes. Hélas,
pour cela, il faut que ceux qui dirigent anticipent, comprennent et
acceptent pacifiquement de remettre une partie de leur pouvoir… Nous
n’en prenons malheureusement pas franchement le chemin.
Pour sortir réellement de la crise, la réponse est politique.
La vision est politique.
La solution est une adaptation et une modernisation de notre superstructure à notre infrastructure.
La vision est politique.
La solution est une adaptation et une modernisation de notre superstructure à notre infrastructure.
Sans
réponses concrètes et réelles, alors notre pays sera contraint de subir
ces montées de violences qui deviendront de plus en plus fortes.
À
cet égard, le cas de la Grèce est édifiant. Même le « gauchiste »
Tsipras finira par faire la politique exigée par Bruxelles contre la
population grecque qui souffre depuis maintenant plus de 10 ans.
Tout vient de la crise de 2008 !
Enfin,
non, cela vient d’avant, et les causes sont multiples, mais
l’étincelle, c’est évidemment la crise des subprimes de 2007 et 2008.
Nous
sommes en 2019, et nous sommes sensiblement dans la même situation,
mais… en pire. Nous avons accumulé encore plus de dettes, encore plus de
déséquilibres, encore plus de difficultés et les mêmes causes
produisent généralement des effets assez identiques.
La FED monte
ses taux, malgré les hurlements de Donald Trump, qui voit très bien
l’effondrement économique poindre le bout de son nez et la chute des
marchés boursiers en raison justement de la politique de la FED.
Avant chaque crise, les banques centrales montent les taux. Les banques centrales déclenchent volontairement les crises.
La FED a décidé de le faire à nouveau. Elle monte donc ses taux, et on voit bien que les marchés souffrent déjà.
La probabilité de crise économique majeure pour 2019 est donc très élevée.
La
Macronie risque donc d’être confrontée rapidement à un contexte
économique très détérioré (alors qu’il n’est déjà pas fondamentalement
brillant) au moment même où le gouvernement veut « accélérer » ses «
réformes » pour les rendre plus « radicales », comme le dit le pauvre
Griveaux, évacué en urgence de son Palais avant une rencontre directe
avec la radicalité des gilets jaunes. Réformes explosives des retraites,
et encore plus de l’indemnisation du chômage !!
Le chômage, déjà très élevé, va monter avec la nouvelle crise. Les indemnités vont baisser.
Les effets seront terribles. Cette politique, incompréhensible.
Sans oublier le prélèvement à la source qui va s’avérer une nouvelle source d’emmerdements pour le gouvernement.
En
clair, l’année 2019 s’annonce au mieux erratique, au pire…
révolutionnaire ! N’oublions pas que les révolutions sont toujours le
fait d’une infime minorité.
Au fait, bonne année !!! J’en profite pour adresser un immense merci aux abonnés à la lettre STRATEGIES. Mon indépendance est assurée par vous mes chers lecteurs. Alors du fond du cœur, recevez toute ma gratitude.
« Ceci est un article ‘presslib’, c’est-à-dire libre de reproduction
en tout ou en partie à condition que le présent alinéa soit reproduit à
sa suite. Insolentiae.com est le site sur lequel Charles Sannat
s’exprime quotidiennement et livre un décryptage impertinent et sans
concession de l’actualité économique. Merci de visiter mon site. Vous
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