Europalestine
"Pourquoi donner l’alerte quand on interroge des Juifs a l’aide de
méthodes douteuses, alors que personne ne dit mot quand on interroge des
Arabes avec les mêmes méthodes ?", c’est la question posée dans Haaretz
par Zvi Bar’el. Nous reproduisons textuellement son texte dans le
quotidien israélien.
"Une énorme tempête de poussière s’est élevée, à la suite de
l’interrogatoire de cinq mineurs juifs, soupçonnés du meurtre d’ Aisha
Rabi, mère de huit enfants, du village cisjordanien de Bidya. Une chose
est certaine : le pays s’inquiète beaucoup, mais pas du meurtre – on a
l’habitude. Il s’agit de la façon dont on a interrogé les suspects.
Comment se fait-il qu’on ne permette pas aux détenus – pourtant mineurs –
de consulter leur avocat ? Peut-être qu’on les a aussi secoués,
attachés ensemble comme des bananes, ou giflés une fois ou deux. Ah, mon
dieu !
Qu’on se souvienne bien de ce qu’a enduré l’un des mineurs, quand on
l’a interrogé sur l’attaque à la bombe incendiaire, à Douma. Quel
horrible tour joué par des inspecteurs de police, déguisés en criminels,
tellement horrible que le juge, sous le choc, a annulé sa confession,
du fait qu’elle aurait pu être obtenue par des méthodes inhumaines.
Punition sévère administrée à des Palestiniens mais la pierre change si ce sont des des Juifs qui la jettent
Comme on s’y attendait, la fanfare moralisante se met à sonner. Mais
pourquoi donne-t-on l’alerte quand on interroge des Juifs par des
méthodes douteuses, alors que personne ne dit mot quand on interroge des
Arabes par les mêmes méthodes ? Une pierre jetée par un assassin juif
est-elle plus sacrée que celle d’un assassin arabe ? Preuve de plus de
l’existence de l’Apartheid. Que règne l’égalité ! Ce qu’on peut infliger
aux Arabes durant un interrogatoire, peut être fait aux Juifs. Un pays
moral ne peut utiliser deux poids, deux mesures.
Le problème est là : l’égalité face à un policier, un inspecteur de
police ou un juge n’est réelle que si la loi est appliquée uniformément.
Lorsque la famille d’une Arabe qu’on a assassinée, pourra recevoir une
réparation de la part de l’État, au même titre que la famille d’une
Juive qu’on a assassinée ; lorsque le vol d’une terre en Israël ou dans
les territoires palestiniens est jugé être un crime identique ; lorsque
les Palestiniens pourront voter et se faire élire à la Knesset... on
pourra alors protester contre l’injustice concernant la différence entre
les interrogatoires.
Même ceux qui brandissent l’étendard de l’égalité en ce qui concerne
les enquêtes, rejettent la notion d’égalité totale, par crainte de la
création d’un Etat binational. Ils préfèrent choisir, parmi les
nombreuses formes de discriminations, les seules qui leur conviennent.
Dans le meilleur des cas, ils se soucient de la réputation des
services de sécurité. En réalité, ils sont préoccupés par le fait que,
si de jeunes colons établis dans le territoire palestinien, sont
interrogés sous la torture, ce genre d’action pourrait bien s’étendre de
l’État occupé à l’État légitime.
Dilemme absurde : Le plus précieux pour eux ? La pureté de la morale
juive ou le principe de l’égalité de la maltraitance, qui effacerait ce
qui a terni leur réputation ? Il est clair que ces deux questions n’ont,
d’emblée, aucun fondement. On ne devrait interroger personne sous la
torture, en particulier si le crime a déjà été commis.
Il est trop facile aux protecteurs des suspects de rejeter la
responsabilité morale sur les interrogateurs. Cela leur permet de ne pas
tenir compte du fait que la nature de l’interrogatoire est tout
simplement le fruit pourri de dizaines d’années, au cours desquelles ils
ont façonné et établi la différence entre les victimes. L’assassinat
d’une Palestinienne, de même que celui de centaines d’enfants pendant
l’opération "Bordure protectrice", et les douzaines d’enfants tués
lorsqu’ils protestaient devant la clôture qui les emprisonne à Gaza, ne
provoquent d’habitude qu’un simple soupir. On a enquêté sérieusement,
seulement sur quelques cas de meurtres de Palestiniens, tandis que le
meurtre de Juifs, en particulier si ce sont des colons, est une affaire
d’État, au-dessus de la loi.
Le choc et la colère véritables ne sont pas le résultat de la nature
de l’interrogatoire, ni du déni des droits des suspects, mais celui de
l’impossibilité de comparer le terrorisme juif au terrorisme arabe,
d’égaler les deux sortes de terrorisme.
Il y a même pire : L’ampleur de
la rage, si on compare les victimes, dans les cas où les Palestiniens
pourraient être innocents.
Ce n’est pas le syndrome de l’Apartheid que
l’on découvre dans les salles d’interrogatoire qui devrait nous
choquer, mais le choc de découvrir ceux qui sont incapables de marier
ces deux mots : « TERRORISME JUIF ».
(Traduit par Chantal C. Pour CAPJPO-EuroPalestine)
Source : Haaretz. Zvi Bar’el - 9 janvier 2019 -
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire