Jean-Luc Mélenchon
Nous avons une date de ralliement général. Les gilets jaunes
appellent à une manifestation aux Champs-Élysées le 16 mars prochain.
Ce
sera l’anniversaire du quatrième mois plein de l’insurrection. Et la
fin du grand débat. Le même jour aura lieu la manif climat. « Fin du
monde, fin du mois : mêmes coupables ». Nous serons donc tous dans la
rue ce jour-là massivement, pacifiquement, mais dans une détermination
totale. On espère la jonction des deux cortèges et sinon on se répartira
pour le mieux. En toute hypothèse, la capitale connaîtra ainsi un jour
de paroxysme de l’engagement politique sur des sujets qui exigent la fin
du système économique dans lequel nous vivons.
Pour le reste, je ne commente pas les commentaires médiatiques sur la
treizième journée de mobilisation des gilets jaunes. Cela serait
répétitif. Il y a maintenant plus de trois mois que le parti médiatique
affirme que « le mouvement s’essouffle » et il a repris son refrain sans
vergogne. Et cela alors même que Le Figaro commence par parler
d’une foule impressionnante sur les Champs-Élysées. Ce que prouvent
toutes les photos. Mon analyse, c’est que les outils de riposte du
régime, par contre, s’essoufflent. Ni les violences répressives, ni les
violences judiciaires orchestrées par Nicole Belloubet, ni la
mobilisation forcenée de la hargne médiatique ne sont parvenues à rien.
Certes, la magistrature reste absolument sans état d’âme et applique à
la chaîne les consignes de répression. Mais dans la police et même dans
les rédactions, des voix s’élèvent contre la sale besogne qui est
exigée des petits soldats du régime. Les plateaux de chroniqueurs
finissent eux même par craquer. Ainsi quand, sur CNnews, une potiche de
plateau qui avait traité nos 7 millions d’électeurs « d’abrutis »,
traite de « lèpre » les gilets jaunes et que soudain son vis-à-vis excédé lui reproche sa radicalisation vers l’extrême droite. De l’impensable il y a dix semaines de cela !
Partout, dans chaque secteur, chacun va au bout de lui-même sous le
regards des autres. Et s’il y a usure la plus marquante et la plus
lourde de conséquence est celle du régime et de ses appareils. Trois
mois de gilets jaunes ont fonctionné comme une école politique concrète
de très grande ampleur. C’est pourquoi la minimisation du nombre des
manifestants n’a aucune importance, ni les articles mensongers ni le
dénigrement permanent dont nous faisons l’objet. Tout cela n’atteint et
ne concerne qu’une toute petite fraction de la population déjà acquise à
la dérive autoritaire du régime. Elle reste confite de peurs, de
convenances, et d’intérêts matériels égoïstes ? Et alors ?
Par contre, plusieurs millions de personnes apprennent jour après
jour tout ce que cela signifie. Cette école comble un vide qui avait
duré près de vingt ans dans le très grand nombre. Des millions de gens
ne sont plus les mêmes. Le système, ses figures de proue, les héros de la
réussite financière encensés depuis les années 2000 sont dorénavant les
noms propres de ce que l’immense majorité du pays déteste. Le processus
de révolution citoyenne se nourrit des moyens que ses adversaires
déploient contre lui.
Par contre, l’instrumentalisation grossière de la lutte contre l’antisémitisme
pose un grave problème. Elle affaiblit en effet la lutte qu’il faut
mener sans trêve contre le racisme dont l’antisémitisme est une forme
spécifiquement grave au regard de l’Histoire. Il est temps donc ici de
noter noir sur blanc : non le mouvement des gilets jaunes n’est pas
antisémite. Il y a dans la population des manifestants la même
proportion d’antisémites que dans le reste de la société. Non, la France
insoumise ne comporte dans ses rangs aucun antisémite pour la raison
simple qu’on ne peut être raciste et membre d’un mouvement dont toute la
vision philosophique est basé sur l’égalité des êtres humains.
La manipulation politicienne du PS et des macronistes pour assigner
la France insoumise à l’antisémitisme est dans la lignée générale de
l’irresponsabilité de ces deux partis qui, pour faire de la récupération
électorale, sont prêts à tout sans honneur et sans pudeur. Le Parti
socialiste fait un mauvais calcul que son histoire devrait lui interdire
de faire. Il y a déjà trop d’antisémites : inutile d’en inventer en
croyant en tirer profit électoral. Quant aux macronistes, leur calcul
est que, puisque le grand débat n’a pas réussi à dissoudre le mouvement
des gilets jaunes, la calomnie et la peur peuvent réussir à le
marginaliser. Tout cela est irresponsable car cela ne convainc de rien
d’autres que de ce que la lutte contre l’antisémitisme pourrait bien
être le faux nez d’une opération de basse politique au service d’un
clan. Cela au moment où plus que jamais il faut renforcer les digues,
convaincre, alerter avec pédagogie et respect pour l’intelligence de
ceux qui voient ce spectacle.
La situation en Europe, la percée des groupes d’ultra extrême droite en
France sur la scène publique mettent à l’ordre du jour la nécessité
d’une extrême vigilance dans le choix des moyens d’action pour combattre
le mal.
Le PS et les macronistes jouent avec le feu. Peut-être
quelqu’un peut-il le leur dire.
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