jeudi 21 février 2019

Fin du mois, fin du monde : mêmes coupables !


Jean-Luc Mélenchon

Nous avons une date de ralliement général. Les gilets jaunes appellent à une manifestation aux Champs-Élysées le 16 mars prochain.

Ce sera l’anniversaire du quatrième mois plein de l’insurrection. Et la fin du grand débat. Le même jour aura lieu la manif climat. « Fin du monde, fin du mois : mêmes coupables ». Nous serons donc tous dans la rue ce jour-là massivement, pacifiquement, mais dans une détermination totale. On espère la jonction des deux cortèges et sinon on se répartira pour le mieux. En toute hypothèse, la capitale connaîtra ainsi un jour de paroxysme de l’engagement politique sur des sujets qui exigent la fin du système économique dans lequel nous vivons.
Pour le reste, je ne commente pas les commentaires médiatiques sur la treizième journée de mobilisation des gilets jaunes. Cela serait répétitif. Il y a maintenant plus de trois mois que le parti médiatique affirme que « le mouvement s’essouffle » et il a repris son refrain sans vergogne. Et cela alors même que Le Figaro commence par parler d’une foule impressionnante sur les Champs-Élysées. Ce que prouvent toutes les photos. Mon analyse, c’est que les outils de riposte du régime, par contre, s’essoufflent. Ni les violences répressives, ni les violences judiciaires orchestrées par Nicole Belloubet, ni la mobilisation forcenée de la hargne médiatique ne sont parvenues à rien.
Certes, la magistrature reste absolument sans état d’âme et applique à la chaîne les consignes de répression. Mais dans la police et même dans les rédactions, des voix s’élèvent contre la sale besogne qui est exigée des petits soldats du régime. Les plateaux de chroniqueurs finissent eux même par craquer. Ainsi quand, sur CNnews, une potiche de plateau qui avait traité nos 7 millions d’électeurs « d’abrutis », traite de « lèpre » les gilets jaunes et que soudain son vis-à-vis excédé lui reproche sa radicalisation vers l’extrême droite. De l’impensable il y a dix semaines de cela !
Partout, dans chaque secteur, chacun va au bout de lui-même sous le regards des autres. Et s’il y a usure la plus marquante et la plus lourde de conséquence est celle du régime et de ses appareils. Trois mois de gilets jaunes ont fonctionné comme une école politique concrète de très grande ampleur. C’est pourquoi la minimisation du nombre des manifestants n’a aucune importance, ni les articles mensongers ni le dénigrement permanent dont nous faisons l’objet. Tout cela n’atteint et ne concerne qu’une toute petite fraction de la population déjà acquise à la dérive autoritaire du régime. Elle reste confite de peurs, de convenances, et d’intérêts matériels égoïstes ? Et alors ?
Par contre, plusieurs millions de personnes apprennent jour après jour tout ce que cela signifie. Cette école comble un vide qui avait duré près de vingt ans dans le très grand nombre. Des millions de gens ne sont plus les mêmes. Le système, ses figures de proue, les héros de la réussite financière encensés depuis les années 2000 sont dorénavant les noms propres de ce que l’immense majorité du pays déteste. Le processus de révolution citoyenne se nourrit des moyens que ses adversaires déploient contre lui.
Par contre, l’instrumentalisation grossière de la lutte contre l’antisémitisme pose un grave problème. Elle affaiblit en effet la lutte qu’il faut mener sans trêve contre le racisme dont l’antisémitisme est une forme spécifiquement grave au regard de l’Histoire. Il est temps donc ici de noter noir sur blanc : non le mouvement des gilets jaunes n’est pas antisémite. Il y a dans la population des manifestants la même proportion d’antisémites que dans le reste de la société. Non, la France insoumise ne comporte dans ses rangs aucun antisémite pour la raison simple qu’on ne peut être raciste et membre d’un mouvement dont toute la vision philosophique est basé sur l’égalité des êtres humains.
La manipulation politicienne du PS et des macronistes pour assigner la France insoumise à l’antisémitisme est dans la lignée générale de l’irresponsabilité de ces deux partis qui, pour faire de la récupération électorale, sont prêts à tout sans honneur et sans pudeur. Le Parti socialiste fait un mauvais calcul que son histoire devrait lui interdire de faire. Il y a déjà trop d’antisémites : inutile d’en inventer en croyant en tirer profit électoral. Quant aux macronistes, leur calcul est que, puisque le grand débat n’a pas réussi à dissoudre le mouvement des gilets jaunes, la calomnie et la peur peuvent réussir à le marginaliser. Tout cela est irresponsable car cela ne convainc de rien d’autres que de ce que la lutte contre l’antisémitisme pourrait bien être le faux nez d’une opération de basse politique au service d’un clan. Cela au moment où plus que jamais il faut renforcer les digues, convaincre, alerter avec pédagogie et respect pour l’intelligence de ceux qui voient ce spectacle.
La situation en Europe, la percée des groupes d’ultra extrême droite en France sur la scène publique mettent à l’ordre du jour la nécessité d’une extrême vigilance dans le choix des moyens d’action pour combattre le mal.

Le PS et les macronistes jouent avec le feu. Peut-être quelqu’un peut-il le leur dire.

Jean-Luc Mélenchon 

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