Esther Tolosa
Depuis le 3 Juin, Macron a ouvert la possibilité d’un retour, au moins partiel, des mesures composant la réforme des retraites en se disant prêt à prendre « des décisions difficiles » avant la fin du quinquennat tout en précisant que la réforme ne peut pas « être reprise en l’état ».
Alors que Bruno Le Maire, ministre de l’économie, indique que cette réforme reste « une priorité » pour le gouvernement, la piste qui semble se dessiner est celle de [repousser l’âge de départ à la retraite de 62ans à 64 ans > https://www.revolutionpermanente.fr/Reforme-des-retraites-2-0-Le-gouvernement-veut-faire-passer-l-age-de-depart-a-la-retraite-a-64-ans].
La question du retour de la réforme des retraites a évidemment suscité diverses réactions, notamment au sein de la macronie et du patronat. Si l’ensemble du gouvernement et des grands patrons sont, bien entendu, favorable à la réforme, les positions divergent sur le moment choisi par Macron pour la relancer. La bourgeoisie et le gouvernement ont peur de réveiller la colère d’importants secteurs du mouvement ouvrier et de remettre dans la rue des centaines de milliers de travailleurs comme ce fût le cas à l’hiver 2019 où une grève historique avait bloqué le pays. Ainsi, le Medef doute de la capacité politique du gouvernement à réimpulser la réforme d’ici les élections de 2022. Le syndicat des patrons recommande d’attendre les présidentielles pour rouvrir la parenthèse de la réforme des retraites, mise à l’arrêt par la crise sanitaire, et ils ne sont pas les seuls…
En effet, Laurent Berger, secrétaire général de la CFDT, a annoncé ce lundi 14 juin sur Public Sénat que « sur les retraites il faudra repartir de zéro et il n’y a pas de voie de passage avant l’élection présidentielle de 2022 ». Il a ajouté qu’il fallait chercher à éviter de « pourrir l’automne des uns et des autres »...
En effet, selon le numéro un du syndicat, aujourd’hui il n’y a « pas de place pour un débat apaisé autour de la question des retraites » et « tout reste trop compliqué à construire », c’est pourquoi il préconise que cette question « inflammable » soit « arbitrée à la présidentielle ». Alors même que c’est un face à face Macron-Le Pen qui se profile, Laurent Berger appelle, dans cette même interview, à battre le RN « quel que soit le candidat ». Dès lors, son soutien au gouvernement actuel, à qui il va même jusqu’à donner des conseils électoraux, est à peine masqué. En effet, le secrétaire général de la CFDT cherche à éviter que « toute une partie de la population soit vent debout » en expliquant que d’ici la présidentielle la fenêtre de tir pour réformer les retraites est trop serrée et ne « pourrait être qu’une mesure d’âge », ce qui risque d’entraîner une nouvelle explosion sociale.
Berger a donc enfilé son costume de conseiller du gouvernement et de Macron, à l’instar du MEDEF ou d’un baron de la macronie comme Richard Ferrand qui « considère que ce n’est pas le bon moment et qu’il est préférable de se concentrer sur la relance de notre économie, plutôt que de risquer de remettre des millions de Français dans la rue ». Comme trop souvent, les directions syndicales préfèrent donc conseiller le gouvernement sur la meilleure manière de faire passer ses réformes antisociales plutôt que de lutter résolument contre.
Depuis le retrait de l’âge pivot en janvier 2020, la CFDT a totalement capitulé en considérant dès lors la réforme acceptable et elle trahissait ainsi sa base majoritairement en grève autour du mot d’ordre retrait total. Aujourd’hui, Laurent Berger continue de légitimer une réforme scandaleuse et rappelle son attachement au système à point. Ainsi, il est évident que la logique de la CFDT, consistant à attendre les présidentielles pour rouvrir le dossier des retraites et tenter de peser dans la farce du dialogue social, est une logique conciliatrice qui va dans le sens du projet de casse sociale du gouvernement. Dès lors, ce qui apparaît c’est que Berger se place en conseiller de Macron pour assurer sa réélection face à Le Pen et lui offrir une assise démocratique suffisante pour enfin mener jusqu’au bout son projet de réforme des retraites.
Dès lors, face à la menace de futures offensives anti sociales, comme la réforme des retraites, mais également contre les attaques patronales qui continuent avec les licenciements et les suppressions d’emplois, il est plus urgent que jamais pour notre camp social de s’organiser pour imposer l’abandon total de cette réforme...
... mais plus largement pour lutter contre l’agenda néo-libéral de la bourgeoisie, et cela passe d’ores et déjà par une pression de la base sur les directions syndicales pour s’assurer qu’elles ne capitulent pas une énième fois.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire