samedi 25 septembre 2021

Primaire écolo : vert et rouge ?

Antoine Manessis

Les primaires des Ecologistes s'achèveront le week-end prochain mais le premier tour est déjà intéressant quant aux courants qui traversent cette mouvance politique. 

Rappelons d'abord l'incontestable lucidité dont a fait preuve la première écologie politique mettant en avant des problématiques qui étaient passées sous les radars des organisations et partis de gauche. On se souvient de René Dumont, premier candidat écolo, avec un verre d'eau pour expliquer avec des mots simples combien cette ressource est précieuse et en péril.

On a vu aussi ce mouvement phagocyté par des arrivistes néo-libéraux comme Cohn-Bendit, Jean-Vincent Placé pour ne citer que les plus caricaturaux et sans parler de ceux qui, comme François de Rugy (et ses homards) ou Barbara Pompili ou encore Nicolas Hulot, ont rallié la Macronie. 

Aujourd'hui les primaires ont permis l'émergence de quatre candidats dont le score est très proche soit autour de 20%. Ces candidats portent des sensibilités différentes. Tous dépassent le cadre d'EELV.

Yannick Jadot (27%) représente une écologie d'accompagnement, ne mettant pas en cause l'économie de marché et susceptible, comme les Grünen allemands, d'alliance variable (à gauche et à droite). Un positionnement centriste qu'il pense le plus rassembleur. Verdir le capitalisme en somme.

Sandrine Rousseau (25%) se revendique plus "radicale". Son éco-féminisme, sa dénonciation du racisme, des violences policières, sa volonté de refuser "les demi-mesures" ont rencontré un large écho malgré la campagne de dénigrement dont elle a été la cible de la part des chiens de garde médiatiques. Nettement plus à gauche que ses concurrents, ses thématiques se retrouvent dans les préoccupations de la jeunesse (étude publiée par The Lancet). On peut espérer une entente à laquelle elle ne ferme pas la porte entre elle et JL Mélenchon. 

Delphine  Batho (22%) vient du PS. Et elle en garde certains traits, comme ses références à des "valeurs républicaines" très abstraites et une laïcité toute aussi fumeuse. Elle défend "l'ordre républicain" sans qu'on sache si elle pense comme Valls ou Cazeneuve. Elle ne veut pas du voile qui est le résultat dit-elle "d'une pression sur les femmes" mais elle veut exercer elle-même une pression sur les femmes pour en interdire ou, en tous les cas, en limiter l'usage. Sur le plan plus environnemental, elle s'est prononcée clairement pour la décroissance. Pas de consigne de vote pour le 2e tour de la primaire.

Eric Piolle (22%) maire de Grenoble a voulu définir une troisième voix rassemblant dans "un arc humaniste" les écolos, les socialistes, les communistes et les Insoumis. Il espère une dynamique autour de Noël où s'imposerait, comme force la plus rassembleuse de "son arc humaniste", l'écologie politique.  À Grenoble il est vrai qu'il est parvenu pour son premier mandat à unir les écolos et les Insoumis et à rallier le PCF à l'occasion de son second mandat. Reste que, même à Grenoble, il se heurte à l'opposition d'un PS très droitier. Lui non plus n'a pas donné de consigne de vote.

Le deuxième tour de la primaire qui rassemble 120.000 votants aura des conséquences sur la suite de la campagne: Jadot et son "écologie de gouvernement" a le soutien des médias "main stream", Rousseau et son "écologie de gauche, sociale et radicale" peut créer la surprise.

Reste, évidemment, que la question principale n'est pas l'avenir du parti écolo mais les réponses que les forces politiques apportent aux questions soulevées par l'écologie. Très clairement, sans perspective anti-capitaliste il n'y a pas de solutions à la question écologique qui est devenu un axe central d'un possible et souhaitable rassemblement des forces populaires, prolétaires et classes moyennes. Il devrait être évident que l'écologie est un enjeu social massif et que les inégalités sont à l'oeuvre dans ce domaine comme dans les autres. Par exemple le changement climatique est intrinsèquement lié aux inégalités économiques : dans le monde les 10% les plus riches sont responsables de 52% de la pollution, les 70% les plus pauvres de 7%. Et qu'en est-il de la capacité à répondre au changement climatique ? 91 % des agriculteurs aux États-Unis ont une assurance-récolte qui couvre leurs pertes en cas de phénomène météorologique extrême, ils ne sont que 15 % en Inde, 10 % en Chine et tout au plus 1 % au Malawi et dans la plupart des pays à faibles revenus. (chiffres rapport Oxfam).

Dans ce domaine aussi il apparait que le candidat de l'Union Populaire, Jean-Luc Mélenchon, est celui qui intègre le mieux la dimension écologique au combat émancipateur, sans en minimiser l'importance et en la plaçant dans un processus global contre tous les effets du capitalocène et du capitalisme.

Antoine Manessis

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