jeudi 25 juin 2009

Poème sans titre

par Eric Meyleuc


Extrait de Mots-Miroirs : au cœur des maux


© Œuvre de Liliana Porter
Assis derrière l’une des fenêtres-observatoires
du bus encore en arrêt
qui me mènera
à l’heure dite
jusqu’à...
un garçon
tout seul
qui joue son destin
avec un ballon
sur un bout de trottoir
précaire morceau d’espace délimité
par les murs des immeubles
les parterres buissonnants
et le trottoir
lui même délimité
par la chaussée et ses voitures
Solitude indifférente
dimensions invisibles
aux passants impassibles et aux bruits ambiants des voitures
qui traversent ce territoire bien éphémère
Qu’attend-il
s’il attend jamais quelque chose ou quelqu’un
ne fait-t-il
que passer à tabac son ballon
pour y passer ses nerfs ou ses angoisses naissantes
Devant la vision d’horreur que lui offre le monde
se croit-il
sur un stade de foot
rêvant que quelqu’un lui renvoie le ballon
souhaite-t-il
que son ballon aille mourir à sa place
sous les voitures qui s’arrêtent au milieu de la chaussée
cessant ainsi de rebondir
simple corps ballotté par son inertie

© Œuvre de Liliana Porter
Le ballon s’est arrêté
le garçon va ramasser l’objet du délit
Coupable
d’avoir franchi la limite permise
il se presse de rejoindre son espace de jeu solitaire
dans le plus grand désintéressement
Les limites sont redéfinies comme avant
avec
cependant
la connaissance
grâce à son ballon
qu’elles peuvent être franchies
mais à quel prix ?
Il reprend son tir de ballon qui
lui revient dessus

Nouvelle tentative
mais de quoi ?
quelle frontière veut-il franchir au juste ?
abattre les limites insidieuses de l’enfance
qui l’enferme
et dont il ne peut s’échapper
s’évader
que par un fort degré d’abstraction
qui
mine de rien
met son ballon en péril

Sur fond transparent
conjectures amères en rétro-projection
d’une mise en péril jamais déclenchée...

... dans l’attente du départ...

Le bus démarre
et le garçon s’évanouit
dans les échos du souvenir

2002

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