vendredi 26 juin 2009

Toujours avoir les yeux ouverts.

par Abderrahamane Zakad

Quel pays anciennement colonisé n’a pas eu à défendre son indépendance et à se protéger contre les visées et les manigances de ces mêmes pays qui les avaient colonisés.

Quel pays soumis à l’exploitation sans vergogne de ses richesses par les lobbies et les trusts n’a pas eu à les dénoncer, à se battre pour que cessent et l’exploitation des peuples et la destruction de la nature. C’est le cas aujourd’hui du Pérou qui se bat non seulement contre son gouvernement, mais indirectement contre les puissances financières qui régentent le monde.

Rappelons-nous également Cuba qui avait arraché son indépendance puis la préserver et enfin la sauver en 1961 lors de l’agression de la Baie des Cochons.
C’était, là aussi, une libération contre les intérêts sordides de multinationales qui avaient imposé Batista à Cuba comme on a adoubé Alan Garcia au Pérou.
Lors des événements de Cuba, la jeunesse du monde s’était enthousiasmée dès le début pour une révolution dont les symboles nourrissaient ses rêves et son romantisme, et qui soulevait un immense espoir chez les peuples d’Amérique latine.

Aujourd’hui, on a les mêmes rêves d’une révolution juste mais sans romantisme. Il ne s’agit plus de défendre de sordides intérêts matériels, il s’agit de sauver nos vies et celles de nos enfants en préservant l’avenir, ce que démontrent les manifestations des indiens du Pérou en s’opposant à la destruction des forêts.

Cuba n’a cessé d’être menacée, attaquée, soumise à un blocus économique asphyxiant, obligé de rester constamment sur le qui-vive. Aujourd’hui, elle est calomniée plus que jamais et on n’hésite pas de présenter l’île comme l’enfer malgré le peu d’informations consacrées à ce pays.

Aujourd’hui que les cubains enregistrent d’importants succès dans l’agriculture et l’industrie, et alors qu’ils ont résolu les plus urgents problèmes sociaux dont sont encore accablés leurs voisins, ce qui se passe dans l’île, ne semble plus intéresser grand monde. Quand je parle d’importants succès, il s’agit de succès relatifs bien sur, mais « cordonnier est maître chez soi ». J’aurai souhaité que les indiens du Maranôn vivent comme les cubains avec en plus leurs forêts sauvegardées.

Quant à la société cubaine, il suffit de regarder vivre Cuba, non pas nécessairement avec amour, mais simplement sans haine, pour constater que son peuple bénéficie des droits humains fondamentaux, le droit de l’éducation, au travail, à la santé, à la dignité que garantit l’absence de racisme dans un pays ou existe un grand métissage. Ce qui n’est pas le cas des indiens du Pérou. Sans doute, que Cuba n’a pas réalisé ses vœux de réussite, mais qui oserait prétendre que ce qui a été déjà réalisé n’est rien ? Et puis qu’est-ce que la liberté qui mène vers le système libéral vers une « anthropophagie » démocratique ? Ce qu’ont besoin les masses laborieuses c’est de l’égalité et du respect de leur mode de vie, la liberté ils l’ont.

A Cuba, on a toujours considéré les terres comme ressources naturelles non renouvelables. Depuis le début de la révolution, elles avaient été non privatisables, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui du Pérou, bien que les systèmes politiques sont autres et parce qu’ils sont autres, hélas. Mais pourquoi diable, dans un système libéral, ne pourrait-on pas légiférer et déclarer que des terres, des forêts ou un littoral est inaliénable, imprescriptible et invendable ?

Le peuple amazonien, doit être respecté et surtout que lui soit sauvegardé l’usufruit des terres ancestrales. C’est un comble, que les gens de la ville, ceux qui généralement, accèdent au pouvoir, puissent intervenir et légiférer sur des questions dont ils n’ont pas connaissance. Le minimum est de consulter ces populations et/ou de se faire conseiller par des spécialistes qui connaissent ces questions (sociologues, anthropologues, agronomes).

Chez nous en Algérie, et par comparaison, un tollé général s’est instauré en 2008 lorsque la population avait appris qu’un tracé d’autoroute passerait par une zone humide protégée (Lac Tonga et Oubeira à l’est du pays), ce qui risquait de détériorer l’écosystème (faune et flore). La pression des associations a fait que les ministères concernés ont été amenés à revoir leur projet en collaboration avec ces associations et leurs représentants spécialistes de ces questions.

Les populations indiennes des forêts amazoniennes ne pourraient-elles pas obtenir ce qu’ont obtenues les populations algériennes pour la sauvegarde des zones humides : écouter leurs doléances, respecter leur identité, respecter la nature. Mais surtout respecter la constitution laquelle leur accorde un droit de veto s’il est exprimé à plus de 60%.

Pour tout cela il faut se battre, sans haine, sans violence et, je dis à mes amis indiens que la forêt détient des gouffres végétaux qui ramènent à l’ordre la mesure humaine.

Je ne finirai pas sans rappeler le mot de José Marti : « Personne n’a le droit de dormir tranquille tant qu’il y aura un seul homme malheureux ».

Abderrahamane Zakad, Urbaniste, romancier algérien.

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