mardi 9 août 2011

L’égalité française va-telle jusqu’en Nouvelle-Calédonie ?

Gilles Devers

Quatre compatriotes morts et vingt-trois blessés… Un drame ? Mais non, détendez-vous, ça se passe en Nouvelle Calédonie, et entre kanaks. Alors, pas de quoi se traumatiser. D’ailleurs, pour rétablir l’ordre public, le gouvernement s’en remet à des responsables religieux !

Ces faits dramatiques ont eu lieu samedi à Maré, l’une des quatre îles Loyauté qui dépendent de la Nouvelle-Calédonie.

Je cherche ces dernières années un bilan aussi lourd… Pas de souvenir pour ce qui me concerne, et pourtant la République n'en parait pas émue outre mesure... Les morts de Maré, c’est regrettable, mais bon, ils sont de Maré justement, alors pas de quoi faire descendre un ministre en vacances de son cocotier.

Les causes du conflit sont tout ce qu’il y a de plus social. Le prix des billets d’avion sur Nouméa jugés trop chers alors que la compagnie semi-publique est en quasi-faillite, et comme toile de fond des différends fonciers jamais réglés. L’aéroport était bloqué depuis quelques jours, et c'est la source des affrontements : une bagarre, des jets de pierre, puis une fusillade.

La solution ? Écoutons Marie-Luce Penchard la « ministre », qui est surtout la porte parole du directeur de cabinet installé par l’Élysée : « Il faut absolument une voie qui permettra d'établir le dialogue pour faire en sorte que le calme s'installe à l'île de Maré. C'est la raison pour laquelle nous avons proposé une médiation des autorités religieuses ».

Je résume : quatre morts, vingt-trois blessés, un conflit social majeur, une « ministre » qui n’a rien à dire, le haut-commissaire de la République placé en pointillé, des institutions politiques locales bloquées et pour régler la question… une médiation des religieux avec un prêtre et un représentant de l'Église évangélique.

Eh à propos, ils sont où, tous les bons frères la gratouille, les encanaillés du laïcisme militant ? À la plage? Allez, allez, on se bouge… De toute urgence, allez chercher le tablier et l’équerre pour inspirer une déclaration magistrale sur la violence des cités et le rôle indu du religieux. Sauf qu’il n’y aura rien car les vénérables trois points, rois de l’indignation à sens unique, sont les premiers à s’être assis sur le principe d’égalité. Rigolos, va…

Que les religieux fassent donc le job, vu qu’eux ont répondu présent et qu’ils ont l’estime de nos compatriotes.

Gilles Devers, avocat.

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