Il n’y a pas de moyen d’agir pour une justice sociale en Israël tant qu’elle est broyée jusqu’à la poussière au-delà de la Ligne verte.

Le nouveau voisin à la jeep a été choisi en 2e position, il est beau, il dit shalom à tout le monde, il est poli et il a un grand sourire, c’est pour ça qu’il a été élu. La seule démocratie du Moyen-Orient est allée aux élections, le sujet était : Rien, et ils ont donné naissance à : Rien. Le premier citoyen du pays Shimon Perez est allé loin dans ses compliments : Un Etat spécial qui ne renoncera jamais à sa liberté, un Etat qui construit, qui combat et qui pense. En effet c’était de bonnes élections pour un nouveau conseil syndical. Les gens qui pensent dans « l’Etat qui ne renoncera jamais à sa liberté » veulent du jardinage, ils ont rêvé d’un interphone, et ils ont choisi le voisin poli. Même l’ancien président du conseil syndical, celui qui veillait au calme entre deux heures et quatre heures a été réélu; les voisins qui vivent dans une négation incompréhensible ont caché à nouveau la triste vérité : l’immeuble tout entier à des fondations pourries. Ni l’ancien président du conseil syndical ni le nouveau voisin n’auront assez de courage pour s’occuper des fondations.
Si Yair Lapid avait été courageux, il aurait tenté de constituer un coalition de centre gauche, avec les arabes, et les orthodoxes. Ce n’est pas une hallucination mais à la grande surprise déjà hier il a écarté cette possibilité en aspergeant de la boue raciste : il n’y a aucune chance qu’il aille avec cette Hanin Zoabi. On doute qu’il ait le courage d’être premier ministre. Il considère peut être que le costume est trop grand pour lui. Alors pourquoi est-il allé à la politique, pourquoi n’essaierait-il pas ? Parce qu’il faut avoir beaucoup de courage pour s’occuper d’un autre but, qui est de traiter de la pourriture de la fondation de l’immeuble qui le menace d’effondrement. Quand les choses sont ainsi, il ne sert à rien de s’occuper du jardinage et de l’interphone. Mais jusqu’ici Lapid a choisi de ne s’occuper que de cela. Le partage des charges et la classe moyenne.
Il n’y a pas de moyen d’agir pour une justice sociale en Israël tant qu’elle est broyée jusqu’à la poussière au-delà de la Ligne verte. On ne peut pas agir pour la classe moyenne, en ignorant la pauvreté ici et les réfugiés la bas. On ne peut pas fortifier la démocratie tant qu’elle englobe l’occupation. On ne peut pas sauvegarder le système juridique tant qu’il est basé sur la pourriture. À savoir une justice militaire scandaleuse, et une discrimination prouvée dans la justice civile. On ne peut pas soigner l’économie sans arrêter le gaspillage et l’injection de fonds dans budget militaire et l’injection scandaleuse d’argent pour les colonies. On ne peut pas améliorer la situation internationale de l’Etat sans libérer le peuple palestinien de son emprise. On ne peut pas soigner les maladies de l’Etat, sans prendre au préalable la décision principale : la fin de l’occupation. Il n’y a plus de temps pour encore un gouvernement de maintenance, qui agisse encore comme un conseil syndical. Le sort de ce gouvernement est qu’il s’évapore, l’échec du Likoud le prouve.
La majorité des Israéliens ont prouvé dans ces élections qu’ils marchent vers Rien. Vers la maintenance, la négation, et l’enfoncement de leur tête dans le sable. Benjamin Netanyahu l’a prouvé pendant son mandat. Lapid a prouvé pendant la campagne électorale qu’il n’a pas lui non plus un autre but. Il l’a encore prouvé hier (en refusant la coalition centre-gauche ndlt)
« Nous sommes venus pour changer » (slogan de la campagne ndlt) ? C’est l’occasion de sa vie. Il a déjà commencé à la rater. J’ai exagéré mes espérances en lui ? C’est à cause du désespoir.
Gideon Levy : Né en 1955, à Tel-Aviv, journaliste israélien et membre de la direction du quotidien Ha’aretz, Gideon Levy dénonce inlassablement les violations commises contre
les Palestiniens
et le recours systématique
à une violence
qui déshumanise
les peuples dressés l’un contre l’autre.
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