Avic
La France était restée un des rares pays européens à ne pas accepter, par la
loi, de sociétés de mercenaires, même si celles-ci existaient déjà sous une
forme ou une autre. Sarkozy, en fin de mandat, se préparait à ouvrir la porte à
de telles sociétés.
Occupé à d’autres urgences qui lui tenaient particulièrement
à cœur, comme le chômage, les retraites, le bien-être des français, tenir ses
promesses électorales…(si, si), ce n’est que maintenant que le gouvernement
Ayrault s’attèle à concrétiser le projet. Se basant sur un rapport réalisé en
2012 par les députés Christian Ménard (UMP) et Jean-Claude Viollet (PS),
Jean-Marc Ayrault a annoncé qu’un projet de loi sera bientôt déposé dans ce
sens.
Les différents commentateurs parlent surtout de création de sociétés privées
de mercenaires maritimes destinés à être embarqués sur des navires pour lutter
contre la piraterie. C’est le grand retour des corsaires.
Les corsaires, ces sortes de pirates légaux, étaient à l’origine de leur
création par Philippe Auguste au XIIème siècle des mercenaires
destinés à sécuriser les navires, en lieu et place d’une armée insuffisante. Peu
à peu, ils sont devenus ces grands coureurs des mers que nous connaissons, héros
pour les uns, pirates et pendables pour les autres, tant la législation
internationale à leur sujet était floue.
On retrouve aujourd’hui les mêmes difficultés à poser les conditions légales
à l’existence de sociétés militaires privées, car les buts qui se cachent
derrière leur création sont multiples. La protection des navires contre les
pirates n’est que le motif le plus acceptable par le public. Il fallait bien que
la piraterie serve enfin à quelque chose d’avouable. Déjà, dans le rapport
Menard/Viollet, on avait envisagé leur utilisation dans les opérations de
maintien de la paix ou de sécurité internationale. De nombreuses sociétés
anglo-saxonnes le font depuis longtemps, par des contrats ponctuels avec l’ONU.
C’est un marché plein d’avenir dont la France ne voudrait pas être écartée, mais
ce n’est pas la seule raison.
Ce que Sarkozy avait commencé, Hollande va le mettre en œuvre. On se doute
bien que la pression des armateurs et des assureurs, entre autres, n’est pas
étrangère à tout cela. En plus des acteurs économiques, étant donné la nature de
ces nouvelles futures sociétés, on ne peut s’empêcher de penser aux grands
acteurs géopolitiques habituels. Il suffit juste de retracer l’histoire des
guerres récentes avec leurs cohortes de mercenaires, d’opérations clandestines
et de coups fourrés pour comprendre à qui et à quoi je fais allusion.
Nul doute que, dans quelques années, nous entendrons beaucoup parler des ESSD
français. ESSD c’est Entreprises de Services et de Sécurité de Défense. Le
gouvernent a dû trouver que ça sonnait mieux et, surtout, que ça faisait moins
peur que SMP (Sociétés Militaires Privées).
Pour un gouvernement belliqueux, c’est une aubaine d’avoir à sa disposition
de telles entreprises. Ce sont généralement d’anciens militaires encadrés par
des officiers à la retraite ou ayant préféré quitter l’armée, mais tous
aguerris. Finis les OpEx officiels pour lesquels il faut rendre des comptes au
parlement ou à la nation et qui peuvent plomber une réélection. Avec les
mercenaires, il sera enfin possible de faire la guerre sans la faire
officiellement. Déstabiliser un pays en jouant l’innocent deviendra un jeu
d’enfant. Et, cerise sur le gâteau, on évite de se mettre les vrais militaires à
dos pour certains actes un peu délicats.
Mercenaires, corsaires, de vielles recettes qui ont fait leurs preuves dans
le voyoutisme. Le 21ème siècle est bien parti.
Réseau International

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