Mark Steel Il apparaît clairement qu’il s’agit surtout de l’explosion de grille-pains piégés.
Ces dernières
années, l’humanité est devenue plus tolérante avec les groupes jadis
marginalisés par la société. Mais jusqu’à présent, on s’autorisait une certaine
agressivité contre une minorité
particulière : les tueurs d’enfants.
Dieu merci les temps
changent et nous commençons, enfin, à considérer le point de vue des tueurs
d’enfants.
Par exemple, le porte-parole
Uri Dromi, un esprit courageux qui n’hésite pas à s’exprimer, a expliqué hier,
sur Radio 4, qu’en fait, si le gouvernement israélien a bombardé une école tuant plusieurs
enfants, les véritables responsables de cette tuerie sont les gens vivant dans
la zone bombardée.
Quelle délicieuse
évolution depuis cette façon de pensée, vieillotte et dépassée, qui toujours
attribuait l’assassinat à l’assassin. Mister Drome, ancien porte-parole du
gouvernement israélien, a expliqué que les israéliens ont été « attirés
dans un piège, et maintenant le Hamas verse des larmes de crocodile sur les morts ».
Si seulement nous
étions plus nombreux à avoir ce regard sur les écoles bombardées. Nous sommes
toujours prompts à juger un pauvre gosse dans une école américaine qui
mitraille ses petits camarades, sans même prendre le temps d’envisager que les mioches
tués l’avaient probablement embobiné dans cette histoire. Et pour empirer le tout, les parents font
mine de pleurer.
Michael Oren,
l’ex-ambassadeur israélien aux USA a eu encore plus d’imagination, sur Channel
4 News. Il a expliqué que le Hamas devait être accusé de tout ce massacre,
parce que « les grille-pain et les réfrigérateurs ont été piégés ».
Cela montre bien
qu’on ne devrait jamais se faire une opinion trop vite. Nous sommes nombreux à
avoir vu les images des décombres de bâtiments avec une bombe qui dépasse, et,
à la hâte, nous en concluons que la bombe avait quelque chose à voir avec
l’explosion. Mais regardez attentivement et vous verrez bien que ce sont ces
imbéciles qui se sont fait sauter avec un grille-pain.
Je parie que si nous
retournions à Hiroshima pour vérifier plus précisément ce qui s’est passé, nous
découvririons que la déflagration n’avait rien à voir avec la bombe atomique,
la cause en étant une casserole piégée. J’espère qu’à Gaza les émissions de
consommateurs traitent de cette question, afin de prévenir les gens du danger.
Cette semaine, l’édition gazaoui de Watchdog devrait commencer ainsi :
« Nous avons reçu plusieurs plaintes de ceux parmi vous qui ont acheté au
Hamas l’un de ces grille-pain, et qui ont été surpris que ça fasse exploser
toute la rue ».
Benjamin Netanyahou
a défendu les droits civiques des tueurs d’enfants en nous informant que les
Palestiniens disposaient délibérément les « morts télégéniques » pour
qu’ils soient filmés, dans le but de provoquer la compassion. Il semble donc
que le Hamas se promène autour des sites bombardés, plaçant les plus jolis
cadavres bien en vue pour les équipes de télévision. Sans quoi nous penserions
tous, « ça n’a pas d’importance que les israéliens aient tué ce gosse, c’était
qu’un affreux moutard, de toute façon ».
D’autres
porte-parole ont répété cette idée, et ils passeront peut-être bientôt au stade
supérieur, affirmant que les Palestiniens que l’on voit pleurer douloureusement
leurs enfants assassinés ont été entraînés dans une école spéciale de comédie
du Hamas. Les réalisateurs hurlent, « Encore une répétition tout le monde,
puis, dès que nous avons fait sauter le grille-pain, tous les figurants à
genoux et en larmes, donnez tout ce que vous avez, mes chéris, tout, puis nous
ferons une prise ».
Avec la poursuite
des bombardements, nous devrions entendre de nouveaux arguments expliquant
pourquoi les Palestiniens doivent être incriminés de se faire bombarder. Un
ministre israélien dira, « Ces gens à Gaza se plaignent toujours de vivre
dans une zone trop densément peuplée, nous essayons donc de les aider à réduire
la population, tant que nous pouvons, pour leur donner plus d’espace. Mais ils se
plaignent encore. Il y en a, je vous jure, ils ne sont jamais contents ».
Les israéliens
insistent sur le fait qu’ils donnent des avertissement avant de bombarder
quelque part, et, en général, on pardonne toujours à quelqu’un qui bombarde une
école, du moment qu’il l’a prévenue cinq minutes avant.
Etant données la
surpopulation de la zone et les proportions des bombardements, tout
avertissement pourrait sembler inutile, à moins qu’il ne donne la recette pour
prendre son envol ou s’enfuir dans une autre dimension comme Doctor Who, mais
c’est l’intention qui compte.
Ils rappellent à
présent 16 000 réservistes de plus, mais s’ils pensent qu’ils ne font toujours
pas assez de dégâts, une meilleure stratégie pourrait être de remiser leurs
bombardiers F16 qui, à l’évidence, ne sont pas à la hauteur de la tâche, et de
les remplacer par quelques grille-pain piégés qui sont apparemment plus
efficaces.
En des temps moins
éclairés, les responsables de tels massacres se seraient fait cracher dessus
dans la rue et leur photo auraient été publiées dans les journaux sous des
titres incendiaires.
Mais, heureusement,
le libéralisme a fait des progrès et nous n’avons plus qu’à regretter de
n’avoir pas traité plus gentiment les assassins, par le passé.
Le malheureux Fred
West par exemple (tueur en série britannique ndt), plutôt que de
n’avoir que le droit de se défendre au tribunal, aurait pu passer à la
télévision, disant, « Bien sûr je regrette la mort de civils. Mais vous
devez comprendre que ces gens que j’ai tués pouvaient être sacrément dangereux.
J’ai été amené à les tuer par
fourberie mais je ne serai pas certain de les avoir tués tant que je n’aurai
pas fait ma propre enquête. Pour se faire plaindre, nombre d’entre eux se tuent
eux-mêmes en piégeant leur planche à repasser, vous savez ».
Avec l’évolution des
moeurs, Netanyahou et ses porte-parole prendront de l’assurance, ils
organiseront une “Child Murderer Pride” (Parade des Tueurs d’Enfants ndt), où
les tueurs d’enfants pourront se rassembler pour défiler comme au carnaval, où
ils pourront enfin se sentir en sécurité, et ne plus être méprisés pour avoir
exercé leur droit humain élémentaire de réduire une école en miettes sous un
tapis de bombes.
Traduction : Chris
Source : The Independant

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