Alors que beaucoup discutent de la fin de Nuit debout, plus d’un
mois et demi après le début du mouvement lancé le 31 mars après la
manifestation contre la loi travail, il est inutile de nier que le
mouvement s’essouffle. Mais loin d’être mort, pour lui cette semaine
sera décisive...
Les deux dernières semaines ont vu la place
de la République se désemplir de quelques milliers de personnes : nous
étions certains jours seulement quelques centaines, et si c’est
évidemment loin d’être ridicule, force est de constater que c’est loin
d’être suffisant pour gagner contre la loi travail, et encore moins
contre le monde qui l’a engendré... Cette essoufflement est dû
principalement à deux facteurs : d’une part la répression policière
violente, et d’autre part le manque de perspectives.
L’État et sa police contre Nuit debout
Nuit
debout n’a pas été épargné par les violences policières. L’escalade de
la répression a atteint des sommets avec le mouvement sur la loi
travail. Un rapport d’une commission de l’ONU en témoignait il y a
quelques jours. Nous avons appris samedi que des militantEs et même un
journaliste ont été interdit individuellement de se rendre aux
prochaines manifestations. Le 28 avril, puis le 1er Mai, la violence
avec laquelle a été évacuée la place était inouïe. Le simple fait
d’occuper une place ou de s’y rendre en manifestation est maintenant
devenu dangereux : certains manifestantEs ont été blessés, d’autres
mutilés (perte d’un œil, de doigts, etc.).
Dans ce cadre-là, la
manifestation du 18 mai appelée par le syndicat policier Alliance et
soutenue par l’extrême droite, y compris par la LDJ, est une véritable
provocation à laquelle le mouvement n’a pas encore su répondre. De
manière générale, c’est l’ensemble du mouvement ouvrier, traditionnel ou
non, qui n’arrive pas à répondre à la répression policière de l’État
qui joue sur la division. Et la question de la violence divise Nuit
debout, ainsi que (et c’est bien plus problématique) celle du rôle de
l’État et de sa police.
Entre tendre la main à celui qui te la matraquera ou au contraire dénoncer les violences policières et organiser la riposte, Nuit debout n’arrive pas à trancher. Pourtant le dimanche 7 mai, à l’initiative du collectif « Urgence, notre police assassine », il y avait 200 personnes en marge de l’assemblée populaire pour discuter d’une possible riposte...
Entre tendre la main à celui qui te la matraquera ou au contraire dénoncer les violences policières et organiser la riposte, Nuit debout n’arrive pas à trancher. Pourtant le dimanche 7 mai, à l’initiative du collectif « Urgence, notre police assassine », il y avait 200 personnes en marge de l’assemblée populaire pour discuter d’une possible riposte...
Nouvelle démocratie ?
Depuis
le début du mouvement, Nuit debout défend la perspective de créer une
nouvelle forme de démocratie, se dotant notamment des codes des
indignéEs. Loin d’être un calque de ce mouvement au contraire de ce que
voudraient nous faire croire les médias, la question démocratique est un
des enjeux auquel tente de répondre à raison le mouvement. En plein
cœur d’un état d’urgence, quand l’État et ses structures de répression
se durcissent, alors même que le gouvernement vient d’utiliser le 49-3,
poser la question de la démocratie directe, de l’auto-organisation d’un
mouvement, de l’autogestion, poser la question du pouvoir en somme n’est
pas seulement légitime mais nécessaire.
Cependant, un des
problèmes de Nuit debout est parfois de tenter de prendre des
raccourcis. Réfléchir à une nouvelle société est nécessaire... mais il
faut d’abord réfléchir à comment détruire celle-ci, en commençant par
dégager le gouvernement et sa loi travail. Et ces nouvelles méthodes de
votes ne prennent pas en compte le besoin de réactivité, de s’organiser
pour construire le rapport de forces contre le gouvernement.
Trouver des perspectives, se tourner vers l’action
Ce
qui a fait la force de Nuit debout existe toujours. Faire converger les
luttes, essayer de réorganiser la classe ouvrière éclatée, de faire
vivre un lieu de centralisation de la contestation est plus que jamais
nécessaire. Mais depuis le début, il y a une difficulté réelle à trouver
des perspectives, à se tourner vers l’action. Il est évident que Nuit
debout est plus qu’une mobilisation contre la loi travail, elle est
contre un système qui a fait de nous une génération de précaires, mais
un mouvement qui ne se dote pas d’objectifs ne permettra pas d’inverser
la vapeur.
Rien n’est perdu et cette semaine est décisive comme
pour le reste du mouvement. Il faut tourner notre énergie, nos
discussions et nos capacités d’action pour gagner sur la loi travail en
réussissant les journées de grèves, s’appuyer sur les possibilités de
reconduction, être massivement dans la rue. Nuit debout peut bien être
le début d’autre chose. Mais pour cela, nous devons gagner.
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