L'accord que les dirigeants européens et états-uniens envisagent de
signer en catimini est abracadabrantesque. Il prévoit l'intégration d'un
mécanisme juridique qui donne le droit à une multinationale de
poursuivre au sein d'un tribunal d'arbitrage privé, un état signataire
dont la politique aurait un effet négatif sur les activités de
l'entreprise.
Ce tribunal arbitral disposerait le pouvoir inouï
d'invalider des lois nationales ou des réglementations locales au seul
motif qu'elles constituent des obstacles aux sacro-saintes lois du
commerce et pourrait également faire payer aux états, des amendes
directement prélevées sur le trésor public. Ce mécanisme constitue une
réelle atteinte à la souveraineté des peuples et à la démocratie. Les
états renonceraient aux instances juridiques auxquelles elles ont
recours habituellement. Si le Tafta passe, l'arbitrage se fera dans la
confidentialité d'un cénacle d'experts grassement payés, entre gens du
même monde.
À titre d'exemple, plusieurs traités de libre échanges
ont déjà inclus ce mécanisme et il existe de nombreux cas de poursuites
d'un état par une multinationale : L'entreprise Lone Pline, dont le
siège est au Canada, a porté plainte via sa filiale états-unienne, a
exigé 250 millions de dollars à la suite de l'adoption d'un moratoire
sur l'exploitation des gaz de schistes adopté au Québec. Aux états unis,
plus de 400 millions de dollars ont été versés aux multinationales en
compensation de mesures prises par l'état fédéral pour encadrer les
produits toxiques, l'exploitation de l'eau, du sous sol ou des sous
bois.
Avec le Tafta, l'UE pourrait se trouver dans l'obligation
d'importer des bœufs aux hormones, des poulets lavés au chlore ou des
porcs élevés à la ractopamine.
Alors que la France cherche timidement à
réduire le recours aux antibiotiques dans les élevages, la baisse des
droits de douane va inonder le marché européen de produits de piètre
qualité. Ceci va condamner les agriculteurs à se convertir à
l'agriculture intensive. Il est inquiétant de voir que sur un espace
géographique similaire, les agriculteurs états-uniens ne sont que 2
millions alors qu'en Europe ils sont 10 millions. L'interdiction des OGM
en France pourrait également être remis en cause, sous pression de
certaines multinationales qui seront tentées de remettre en cause le
plan Ecophyto.
Ce traité se donne pour objectif d'ouvrir les
marchés publics à toutes les strates des collectivités territoriales. En
effet les collectivités locales seraient obliger de lancer des appels
d'offres internationaux dont le seul critère serait le prix, limitant
les exigences sociales et écologiques qui seraient perçus comme des
aides déguisées. Les cliniques seraient en droit de réclamer les mêmes
avantages que les hôpitaux. Les écoles privées verraient comme du
favoritisme le traitement des écoles publiques. Les assurances privées
étrangères pourraient attaquer en justice les caisses d'assurance
maladie pour concurrence déloyale. Les retraites par répartition
pourrait être démantelées au profit des compagnies d'assurance.
S'opposer à la privatisation de l'eau et de l’énergie pourrait être
considéré comme une entrave à la liberté du commerce. L'objectif de 20 %
de produits bio introduits en restauration collective pourrait être
considérés comme une mesure discriminatoire.
L'harmonisation par
le bas des normes adoptées en matière de produits chimiques tels que les
pesticides et les perturbateurs endocriniens pourrait remettre en cause
le règlement REACH qui permet d’évaluer la nocivité des substances
chimique (bisphénol A, glyphosate, néonicotinoïde).
Mais de manière
générale c'est le principe de précaution lui-même qui volerait en éclat à
la faveur du règlement à posteriori, avec toutes les conséquences
sanitaires induites. C’est-à-dire que ce seraient les consommateurs qui
s’essayeraient au rôle non enviable de cobaye.
Les tribulations de l'écolo économe
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