Le coup d’Etat brésilien, qui n’a pas fini ses dramatiques effets, sombre déjà.
Le
Parti des Travailleurs, minoritaire à l’Assemblée, avait grâce à son
action et ses leaders charismatiques Lula et Dilma, emporté la
présidentielle fin 2014, pour la troisième fois de suite. La Gauche
démocratique s’installant en Amérique ? Insupportable pour Oncle Sam.
Problème
pour Dilma et chance pour Oncle Sam : pour gouverner, il ne suffit pas
d’être présidente, il faut une majorité parlementaire.
D’où la nécessité de s’allier avec ce désespérant mais incontournable PMDB, parti religieux et centriste, une sorte de grosse omelette.
D’où l’opportunité pour Oncle Sam : casser cette coalition (Au
passage : faute certaine de Lula d’avoir laissé ce régime des
coalitions parlementaires, qui tiennent le pouvoir, tu avais assez la
cote pour modifier la loi électorale parlementaire).
Oncle
Sam est passé par la Droite, défaite par les élections, sans programme
et sans leader, et l’a linkée à de grands groupes de presse, pour monter
de grandes manifs de manipulés heureux… sur fond d’une économie en
progrès mais fragile. Et Oncle Sam a excité les instances du PMDB : « Et
si, maintenant que Dilma vous a conduit à la victoire, pourquoi ne
pas devenir président à sa place ? » Le coup d’Oncle Sam, c’est
l’opportunité de prendre la place sans passer par le vote des électeurs,
en inventant une procédure de destitution : prendre le pouvoir contre
la volonté du peuple, ça s’appelle un coup d’Etat.
À la manœuvre, trois voyous.
1/ Oncle Sam, qui veut bloquer les poursuites contre Petrobras, pour récupérer la firme et s’assurer une maîtrise durable sur le Brésil
2/
Michel Temer, PMDB, 75 ans. Il était vice-président, et à ce poste
parce que Dilma l’avait nommé, et elle l’avait nommé parce que ce boss
de PMDB était un inconnu : 1% dans les sondages.
3/
Eduardo Cunha, PMDB, président de l’Assemblée nationale, mandaté pour
conduire la manip’ de la destitution. Un rôle parfait, parce que cet
évangéliste allumé représente tout ce qu’il y a de plus corrompu dans la
société brésilienne. Fragile, donc docile.
Début 2016, tout le monde
savait qu’avait été découvert son compte secret en Suisse, avec 5
millions de dollars, venant de Petrobras. Ce pour un mec qui n’a jamais
travaillé de sa vie. La justice allait donc bloquer ce corrompu ? Non,
elle lui a fiché la paix, le temps qu’il joue son rôle : écarter Dilma.
Le 17 avril,
Dilma, à l’encontre de laquelle aucune charge judicaire n’a été
notifiée, a été suspendue de sa fonction présidentielle par un vote de
l’Assemblée, pour un « pédalage budgétaire », le financement transitoire par un prêt bancaire, qui n’a rien coûté au contribuable.
Cunha ayant fait le job, il a alors été suspendu de ses fonctions
de président de l’Assemblée le 5 mai, par une décision de justice, qui
s’est soudain réveillée. Quel miracle… Lisons le Tribunal suprême
fédéral (STF), onze juges à l’unanimité : « Il n'existe pas le moindre
doute que le suspect ne présente pas les conditions personnelles
minimales pour exercer en ce moment, dans leur plénitude, les fonctions
de président de la chambre des députés ».
Incapable d’être président de l’assemblée... lui a conduit la chasse contre Dilma. Lamentable.
Le sort de Dilma est désormais entre les mains du Sénat, où elle est minoritaire à 70%. On
attend un vote le 4 août, par une commission d’instruction très hostile
au PT, puis un vote en formation plénière des 81 sénateurs, entre le 25 et
27 août. À ce jour, la majorité politique des deux tiers, soit 54 voix,
est acquise, et Dilma sera destituée, laissant la place à la
marionnette Temer. Oncle Sam apprécie.
Dilma a fait connaître sa défense : « Le
destin m'a toujours réservé de grands défis. Certains me paraissaient
insurmontables, mais j'ai réussi à les vaincre. J'ai déjà subi la
douleur indicible de la torture et ce qui me blesse le plus en ce
moment, c'est l'injustice, c'est de réaliser que je suis victime d'une
farce juridique et politique. Je n'ai commis aucun crime de
responsabilité budgétaire. Jamais je n'ai détourné un seul centime
public pour mon enrichissement personnel ou de tiers ».
Hier,
Cunha a démissionné de la présidence de l’Assemblée. Oncle Sam n’a plus
besoin de lui, et on va trouver un mec cool, ou mieux une femme cool,
pour le remplacer.
Commentaire de Dilma :
« La seule chose que je regrette, c'est qu'il soit parvenu à présider
ce lamentable processus d'’impeachment’ comme si de rien n'était. »
Dilma, je souhaite que le PT retrouve le pouvoir. Mais
cette fois-ci, ajustez un peu vos analyses sur le fonctionnement de la
justice. Ce n’est pas de la science pure. Oki ? Tu verras, ça vous fera
gagner du temps.
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