mardi 26 juillet 2016

Les désanalyses. Chapitre 3 : la vérité sur les Jeanne-d’Arc du vert

Bouchon-circulationGaëtan Pelletier                

Si j’avais un char, ça changerait ma vi-e J’irais m’ promener su’ l’ bord d’ la Gaspésie Si j’avais un char, ça changerait ma vie J’aurais l’ nez dehors et toi aussi ma jolie

Chanson de Steven Faulkner
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Si Henry Ford était encore de ce monde, il aurait obtenu une trentaine de doctorats. On peut arrêter un bandit, mais pas une usine à fabriquer des voitures. On ne lâche pas le magot. Et c’est à ce point sophistiqué qu’on peut maintenant s’asseoir dedans et de profiter de toutes les commodités. En améliorant un peu ce produit d’une civilisation en bouchon de circulation, on finira par ne plus avoir les moyens de s’acheter une maison. Une voiture, oui. On en fait des performantes qui bouffent de moins en moins d’essence. Le ridicule ne tue pas… Si elles bouffent moins d’essence, elles bouffent tellement d’espace qu’elle finit par se déplacer à la vitesse d’un cheval. Mais elle ne fournit pas de compost ni de viande. Toutefois, elle participe à l’industrie de l’asphaltage qui contribue à détruire une colonne de jardins pour y planter du bitume. L’auto a faim : elle dévore des centaines de kilomètres, maintenant par nécessité de travail. L’auto sert également à se déplacer d’un rang social à un autre. Plus elle est belle et performante, plus vous avez par graffiti, inscrit votre rang social. Pour déceler un pauvre, louchez la rouille au bas des portes….
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En 1957, j’avais dix ans. On partait du petit village de Sully  pour se rendre à Rivière-du-Loup par une route gravelée qui soulevait tellement de poussière qu’il aurait fallu des masques pour se protéger. On avait du sable dans les dents.
On allait pique niquer au bord du Fleuve Saint-Laurent. Air salin, faux amérindiens, air climatisé, et boissons qui faisaient ronfler.  De temps en temps, on rencontrait une voiture. On était si contents qu’on s’arrêtait pour parler aux conducteurs. Maintenant, en ville, on s’arrête pour lui donner un coup de poing. Et l’autre conducteur aussi…
La voiture ne veut tellement pas mourir qu’on veut maintenant la fabriquer avec des moteurs électriques. Ce qui ne règle en rien son appétit pour  d’asphalte. En un sens, c’est vert. Mais dans l’autre, il faudra tellement d’électricité pour faire téter ces machines qu’on ne nous dit pas où nous la prendrons. Quant aux batteries, oups ! On ne saura qu’en faire. À moins qu’un ingénieur trouve le moyen de fabriquer des maisons avec des batteries éteintes.
Il faut aimer les gens qui recyclent. Notre  industrie de recyclage des matières bio compostables a coûté 28$ millions de dollars pour produire du biogaz. Elle cueille les déchets de table – certains doivent être gardés au congélateur – pour produire un gaz qui fera rouler 600 camions.
La seule chose qui fonctionne dans ce grand projet est que les investisseurs sont, pour la plupart, des subventions de l’État. Étant donné qu’il n’y a pas suffisamment de matières recyclables, on … les brûle.  28$ millions pour faire rouler 600 camions… Sans compter ceux qui vont livrer le biogaz.

Le génie dans tout ça c’est que si vos carottes, vos choux, votre viande, vos pelures de légumes, vos sandwich, ne vous mènent nulle part, c’est qu’il ne sert à rien d’imiter un génie d’il y a un siècle. Rouler électrique ou rouler à carottes tient de l’arnaque du concepteur avaleur de subventions. Nous sommes le gros pique-nique de ces ingénieurs qu’il faudrait flanquer dans les bacs bruns de recyclage. Et le brûler…

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