Le président reçoit demain matin le patron des chasseurs.
Le 31 août dernier, Willy Schraen a été élu président de la Fédération nationale des chasseurs. Il était depuis 2010 président de la Fédération départementale des chasseurs du Pas-de-Calais. Connu pour être un partisan de Nicolas Sarkozy, ce proche du maire du Touquet et ami du président du Sénat, Gérard Larcher, a été porté à la tête du million de chasseurs français grâce à l’appui remarqué du parti Les Républicains. Pas seulement ceux du nord de la France. La philosophie de celui qui se revendique comme un « politique » de la chasse est simple, si l’on en croit l’une de ses dernières déclarations :
La chasse est une très jolie fille prête à se donner au plus offrant.
Outre le parfum machiste de cette profession de foi, cette « belle » phrase est parfaitement illustrée par le fait que le jeudi 27 octobre il sera officiellement reçu pendant une heure à l’Élysée par François Hollande.
Cette audience « de travail » devrait interpeller Ségolène Royal. Le nouveau patron des chasseurs a fait partie des responsables de la chasse qui ont bataillé pendant des années, appuyés par de nombreux sénateurs et parlementaires de gauche et de droite, pour que l’Office national de la chasse et de la faune sauvage ne compte pas parmi les nombreuses institutions et associations contraintes par la loi d’unir leurs efforts au sein de l’Agence française de la biodiversité. Un organisme promis depuis 2012, mais créé seulement le 8 août de cette année.
Spécialiste de l’immobilier et de l’importation des fleurs depuis le Kenya, commerce qui a entraîné la ruine de nombreux producteurs français, Willy Schraen se vante, en privé comme dans toutes ses réunions, de posséder le numéro de portable de la plupart des femmes et des hommes politiques français qui sont supposés être favorables à la chasse ou avoir une influence dans les décisions de la protection de la nature en France. Il est d’ailleurs connu pour ses efforts en faveur de la prolongation des périodes de tir aux gibiers d’eau. Y compris pour le maintien des autorisations de chasser au-delà des périodes légales imposées par la règlementation européenne qui veut préserver ce type d’oiseaux. Le jour de son élection, il a ainsi adressé un courrier à la ministre de l’Écologie pour protester contre la non parution d’un arrêté autorisant la chasse des « espèces non indigènes » comme la Bernache.
Willy Schraen a aussi une marotte : que les dégâts occasionnés aux cultures par les animaux chassables ne soient plus seulement à la charge des agriculteurs et des chasseurs mais également remboursés par le ministère de l’Écologie. C'est-à-dire par l’État. Et il revendique la chasse comme une nécessité écologique. Dans un entretien publié à la fin du mois d’août par le quotidien La Voix du Nord, il expliquait que « les chasseurs [avaient] une vraie vocation à œuvrer sur le territoire ».
J’irais même plus loin : il faut arrêter cette vision réductrice qui dit que l’animal est l’égal de l’homme. C’est stupide, même dangereux de parler comme ça. Il y a des hommes et des animaux. Dire que parce que l’on est intelligent, on ne peut plus tuer un animal, ou arrêter de manger un morceau de bœuf, ce serait renier notre origine et les fondamentaux qui font l’espèce humains et, là, ça devient extrêmement dangereux. (…) Il y a un moment où il ne faut plus avoir honte. Moi, je suis chasseur, j’en suis extrêmement fier car tous les jours je travaille pour l’avenir des territoires français. Je sais que ce que l’on fait est bien pour la nature et on va le dire avec nos preuves, notre bon sens de terrain.
Il n’est pas prévu que la ministre de l’Écologie et la secrétaire d’État à la biodiversité, transfuge d'EELV, Barbara Pompili, assistent à l’entrevue. Dommage, cette chasse aux voix promet une conversation passionnante entre les deux présidents…

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