Un hôpital associé avec Médecins Sans Frontières. Une école. Une
usine de chips. Selon les lois internationales, ces installations au
Yémen ne sont pas des cibles militaires légitimes. Cependant, elles ont
toutes été bombardées ces derniers jours par des avions de guerre
appartenant à la coalition menée par l’Arabie saoudite, et tuant plus de 40 civils.
Les États-Unis sont complices de ce carnage. Ils ont appuyé la
coalition de bien des manières, notamment par la vente d’armes aux
Saoudiens pour les apaiser après l’accord nucléaire avec l’Iran. Le
Congrès devrait mettre en suspens les ventes d’armes, et le président
Obama devrait informer discrètement Riyad que les États-Unis retireront
leur aide cruciale si les Saoudiens n’arrêtent pas de viser des civils
et s’accordent à négocier la paix.
Les frappes aériennes sont une nouvelle preuve que les Saoudiens ont
accéléré leur campagne de bombardements contre les milices houthies, qui
contrôlent la capitale, Sanaa, depuis que les pourparlers furent suspendus
le 6 août, rompant un cessez-le-feu qui avait était déclaré il y a plus
de quatre mois. Ils suggèrent également une des deux possibilités
désagréables suivantes. La première est celle que les Saoudiens et leur
coalition de partenaires principalement arabes sunnites n’ont pas encore
appris à identifier des cibles militaires autorisées. L’autre est que
tuer des civils innocents leur importe peu. Le bombardement de l’hôpital
qui, à lui seul, a tué 15 personnes, était la quatrième attaque sur un
établissement soutenu par Médecins Sans Frontières l’année passée, bien
que l’on ait indiqué l’emplacement des hôpitaux à toutes les parties en
conflit.
En tout, la guerre a tué plus de 6500 personnes, déplacé plus de 2,5
million d’autres, et a poussé l’un des pays les plus pauvres du monde
aux privations et à la dévastation. Un rapport récent de l’ONU
incriminait la coalition pour 60% des morts et des blessures d’enfants
l’année dernière. Les groupes des droits de l’homme et de l’ONU ont
suggéré que des crimes de guerre avaient été commis.
L’Arabie saoudite, qui débuta la guerre aérienne en mars 2015, a la
plus lourde responsabilité dans l’attisement du conflit avec les
Houthis, un groupe chiite autochtone avec de faibles connexions avec
l’Iran. Les Saoudiens sont intervenus au Yémen dans le but de défaire
les Houthis et de réinstaller le président Abdu Rabbu Mansour Hadi, que
les rebelles avaient évincé. Ils considèrent l’Iran comme leur ennemi
principal et redoutaient que Téhéran ne gagne trop d’influence dans la
région.
Bien que beaucoup d’experts pensent que la menace soit exagérée, M.
Obama accorda un soutien à l’intervention au Yémen – sans autorisation
formelle du Congrès – et vend encore plus d’armes aux Saoudiens, en
partie pour apaiser la colère de Riyad à propos de l’accord nucléaire
avec l’Iran. Cela dit, depuis son investiture, M. Obama a vendu aux
Saoudiens 110 milliards de dollars d’armes, dont des hélicoptères Apache
et des missiles.
M. Obama a également fourni à la coalition une aide inestimable en
renseignement, ravitaillement en vol d’avions et une aide dans
l’identification de cibles appropriées. Des experts déclarent que la
coalition serait clouée au sol si Washington retirait son soutien. Au
contraire, la semaine dernière, le département d’État a approuvé la
vente potentielle de 1,15 milliards de dollars de plus en chars et
autres équipements à l’Arabie saoudite, pour remplacer ses éléments
détruits dans la guerre. Le Congrès a le pouvoir de bloquer cette vente ;
le sénateur Chris Murphy, démocrate du Connecticut, dit qu’il discute
de cette possibilité avec des législateurs. Mais les chances sont
maigres, en partie à cause de la politique.
Au vu des pertes civiles, un soutien prolongé des Américains dans
cette guerre est indéfendable. Comme M. Murphy l’a déclaré sur CNN mardi
: « Il y a une empreinte américaine sur chacune des vies civiles
perdues au Yémen. »
Photo : Des travailleurs ramassent des restes humains dans un hôpital dirigé par
Médecins Sans Frontières après une frappe aérienne, mardi, au Yémen.
Abduljabbar Zeyad/Reuters.
Source : The New York Times, le 17/08/2016Les Crises
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