« La Russie soupçonnée d’ingérence électorale. Les Etat-Unis enquêtent sur un plan visant à semer le doute chez les électeurs »
Voilà le titre en première page du Washington Post,
le 6 Septembre. Pensez-y. L’élection que les Américains doivent
endurer, rouges de honte, et qui les fait envisager de déménager à
l’étranger, de renoncer à leur citoyenneté ; une élection qui provoque
des nausées chez les Pères Fondateurs qui se retournent dans leurs
tombes... parce que les Diables russes sèment le doute chez les
électeurs ! Qui l’eût cru ?
Bien-sûr, c’est ainsi que les
Communistes agissent - Oh, attendez, j’avais oublié, ils ne sont plus
communistes. Mais alors, que sont-ils ? Ah oui, ils sont toujours cet
horrible et vieil épouvantail digne d’une condamnation de tous les gens
honnêtes - Ils empêchent les Etats-Unis de dominer le monde. Quel
culot !
La première guerre froide a effectué une lobotomie sur les
Américains, en remplaçant leur matière cérébrale par de la matière
anti-communiste, produisant plus de 70 ans de stupidité nationale.
Pour
tous ceux qui ont raté cette époque amusante, j’ai une bonne nouvelle :
La Deuxième Guerre Froide est là, aussi grande et aussi stupide que
jamais. La Russie et Vladimir Poutine sont systématiquement, et
automatiquement, blâmés pour toutes sortes de malheurs. L’article qui
suit le titre du Washington Post mentionné ci-dessus ne prend
même pas la peine de faire semblant de présenter quelque chose qui
pourrait passer pour une preuve. Le quotidien se contente de l’affirmer,
tout en soulignant que « la communauté du renseignement ne dit pas
qu’elle a « des preuve concluantes » d’une telle ingérence, ni qu’il
existe des plans russes dans ce sens. » Mais le titre en première page a déjà rempli son objectif.
Hillary
Clinton, lors du débat avec Donald Trump, a également accusé la Russie
de tous types de piratages informatiques. Même Trump, qui n’est
généralement pas un maniaque de la précision, l’a mise au défi de
présenter le moindre élément de preuve. Elle n’avait rien.
En tout
état de cause, tout cela n’est qu’une diversion. Ce n’est pas le
piratage en soi qui gêne l’élite ; ce sont les révélations de leurs
mensonges qui les hérisse au plus haut point. Le piratage du Comité
National Démocrate à la veille du congrès du parti a révélé un certain
nombre de courriels internes embarrassants, forçant la démission de la
présidente du Comité, Debbie Wasserman Schultz.
Le 12 Septembre, nous pouvions lire dans le Post
qu’un célèbre médecin avait appelé à un examen médical de Clinton pour
vérifier un éventuel empoisonnement après une malaise à New York. Selon
le bon médecin : « Je ne fais pas confiance à M. Poutine et M. Trump. Avec ces deux-là, tout est possible. »
De nombreux autres exemples pourraient être donnés ici de parti pris anti-russe infantile de la part du Post.
L’un des sujets les plus courants a été la Crimée. "L’invasion" de
Moscou de la péninsule de Crimée en Ukraine en Février 2014 est à
plusieurs reprises avancée comme preuve de la politique étrangère
belliqueuse et expansionniste de Moscou et la nécessité pour Washington
d’alimenter une fois de plus son monstrueux budget de défense. Mais ils
ne rappellent jamais que la Russie réagissait à un coup d’Etat soutenu
par les Etats-Unis contre le gouvernement démocratiquement élu de
l’Ukraine sur la frontière de la Russie et qui a été remplacé par un
régime dans lequel les néo-nazis, au grand complet avec des croix
gammées et tout, se sentent très à l’aise. La Russie a "envahi" pour
aider les Ukrainiens de l’Est dans leur résistance à ce gouvernement, et
n’a même jamais franchi la frontière alors que la Russie avait déjà une
base militaire en Ukraine.
L’OTAN (càd les Etats-Unis) encerclent
la Russie depuis des décennies. Le ministre russe des Affaires
étrangères, Sergueï Lavrov, a capturé toute l’impudeur exquise de la
situation avec sa remarque du 27 Septembre, 2014 : « Excusez-nous d’exister au milieu de toutes vos bases. »
En revanche, voici le secrétaire d’Etat américain, John Kerry : « L’OTAN
n’est pas une menace pour personne. C’est une alliance défensive. Elle
est simplement destinée à assurer la sécurité. Elle ne vise ni la
Russie, ni quelqu’un d’autre ».
Les exercices militaires de
l’OTAN dans cette région sont fréquentes et à peu près permanentes.
L’encerclement de la Russie est pratiquement achevé, sauf pour la
Géorgie et l’Ukraine. En Juin, le ministre des Affaires étrangères de
l’Allemagne, Frank-Walter Steinmeier, a scandaleusement accusé l’OTAN de
« battre les tambours de la guerre » contre la Russie. Comment les
États-Unis réagiraient-ils à un coup d’Etat russe au Mexique ou au
Canada, suivi par des exercices militaires russes dans la même région ?
Depuis
la fin de la Première Guerre froide, l’OTAN cherche avec fébrilité une
justification de son existence. Le problème se résume à cette question :
Si l’OTAN n’avait jamais existé, quel argument pourrait être donné
aujourd’hui pour la créer ?
L’arrogance absolue de la politique US
en Ukraine est incarnée à la perfection par la désormais célèbre
remarque de Victoria Nuland, secrétaire adjoint au Département d’Etat,
en réaction à une éventuelle objection de l’Union européenne du rôle de
Washington en Ukraine : « Fuck l’UE », a-t-elle déclaré avec charme.
Contrairement
aux États-Unis, la Russie ne cherche pas a dominer du monde, ni même à
dominer l’Ukraine, chose que Moscou pourrait facilement faire si l’envie
lui en prenait. Pas plus que l’Union Soviétique n’avait entrepris de
dominer l’Europe de l’Est après la Seconde guerre mondiale. Il faut se
rappeler que l’Europe de l’Est est devenue communiste parce que Hitler,
avec l’approbation de l’Ouest, s’en était servie comme route pour
atteindre l’Union Soviétique et tenter d’éradiquer le bolchevisme pour
toujours ; et que les Russes dans les deux guerres mondiales ont perdu
environ 40 millions de personnes parce que l’Occident avait deux fois
utilisé cette route pour envahir la Russie. Il n’y a rien de surprenant
donc, qu’après la Seconde Guerre mondiale, les Soviétiques étaient
déterminés à fermer cette route.
La campagne du Washington Post pour présenter la Russie comme l’ennemi est implacable. Encore une fois, le 19, on pouvait y lire ce qui suit : « selon
des officiels du renseignement et du Congrès, les agences de
renseignement et des forces de sécurité des Etats-Unis enquêtent sur ce
qu’ils considèrent comme une vaste opération secrète russe aux
Etats-Unis pour semer le doute parmi le public envers la prochaine
élection présidentielle et les institutions politiques des Etats-Unis »
Et
ce n’est encore rien par rapport au discours du président Obama à
l’Assemblée générale de l’ONU (24 Septembre, 2014) où il a classé la
Russie parmi les trois menaces qui pèsent sur le monde, avec l’État
islamique et ebola.
Une guerre entre les États-Unis et la
Russie, tous deux dotés d’armes nucléaires, est « impensable ». Sauf que
les militaires américains, eux, y pensent, comme le général américain
de la guerre froide, Thomas Power, en parlant de la guerre nucléaire ou
d’une première frappe par les États-Unis : « Toute l’idée est de tuer
ces salauds ! ! A la fin de la guerre, s’il ne reste que deux
Américains et un Russe, nous aurons gagné ! »
À quoi l’une des personnes présentes a rétorqué : « Eh bien, faites en sorte que ce soit un homme et une femme ». […] (William Blum)
Traduction
"à force de mettre des points sur les i, on dirait la voie lactée" par
VD pour le Grand Soir avec probablement toutes les fautes et coquilles
habituelles.
Source : https://williamblum.org/aer/read/145
Le Grand Soir
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