« Les messages sont simples et répétitifs »,
explique la mère d’un élève de Première de la région centrale. « Tous
les Arabes nous haïssent, en fait le monde entier ou presque nous
hait ».
Les élèves qui veulent prendre part aux délégations partant à
l’étranger sont obligés de suivre un cours du gouvernement en ligne que
des parents et des professeurs décrivent comment ayant « un agenda
politique flagrant ». Le cours consiste en des vidéos dans lesquels
plusieurs intervenants s’adressent aux élèves pour les coacher sur les
messages qu’ils devraient communiquer à l’étranger.
Les élèves arabes doivent aussi suivre ce cours.
« Les messages sont simples et répétitifs », explique la mère d’un
élève de 1ère de la région centrale ». « Tous les Arabes nous haïssent,
en fait le monde entier ou presque nous hait ».
En juin 2016, le ministère de l’enseignement a envoyé des
instructions détaillées aux écoles sur la préparation des délégations
pour les voyages scolaires à l’étranger. « Les élèves et les jeunes
participant aux délégations à l’étranger représentent Israël et sa
société et servent d’ambassadeurs », disent-elles. « Les élèves
représenteront Israël en se servant des principaux messages enseignés
dans le cours », continue cette directive, indiquant que le but est « de
cultiver la fierté d’être israélien et le sentiment d’une mission chez
ceux se rendant à l’étranger. »
La directive s’adresse aux lycéens prévus pour participer à des
délégations à l’étranger, que ce soit pour des conférences ou des
concours internationaux en mathématiques, sciences et technologie. Elle
s’adresse aussi aux délégations participant à des programmes pour
établir des relations avec des communautés juives dans le monde, des
villes jumelées, des échanges pour la jeunesse, etc. Les cours ne
s’appliquent pas aux délégations allant en Pologne.
Les sources du ministère de l’enseignement disent que le projet pourrait inclure 220 000 élèves annuellement.
Le cours, qui fait partie d’une session d’entraînement plus globale
et obligatoire de 30 heures, consiste en 11 unités, chacune composée
d’une vidéo durant plusieurs minutes. Passer d’une étape du cours à une
autre requiert de valider un petit test de quatre ou cinq questions. À
la fin de chaque vidéo, les élèves doivent remplir un test sous forme de
questionnaire à choix multiples. S’ils échouent ou s’abstiennent, ils
seront disqualifiés pour participer au voyage.
Le premier intervenant du cours en ligne est le ministre Naftali
Bennett. Il insiste sur l’entrepreneuriat et l’innovation. (« Israël est
un pouvoir pour faire le bien de milliards de personnes dans le
monde ».) Il dit que les Arabes votent et sont élus à la Knesset,
indiquant qu’« en Israël seulement, il y a une telle démocratie.
Insistez là-dessus, parce que parfois [ils] vous jetteront un mot comme
apartheid. Quel apartheid ? » Il laisse de côté le fait que ce terme se
rapporte principalement aux droits des Palestiniens au-delà de la Ligne
verte.
« Les États arabes ne veulent pas que la minuscule démocratie juive
survive », dit Bennett. « Ces types assis à Londres ou aux États-Unis
doivent savoir que nous sommes l’avant-poste du monde libre dans la
campagne globale contre l’islam radical ».
Interrogé sur ce qui est la partie la plus importante de la promotion
d’Israël, Bennett dit : « Les gens pensent que le contenu compte. Je ne
suis pas d’accord. Ce n’est pas le contenu, mais le sourire, la
politesse, l’écoute ». Mais à la fin de l’unité, quand les élèves sont
interrogés sur la question « Selon Bennett, quelle est la chose la plus
importante pour promouvoir Israël ? », le sourire et la politesse ne
sont pas des options. La réponse correcte, issue d’une autre partie de
la vidéo, est « la mise en scène, la manière dont vous mettez en scène
l’histoire ».
Dans le chapitre « Israël dans le Moyen-Orient », Dr. Uri Resnik,
conseiller juridique pour la ministre déléguée aux Affaires étrangères
Tzipi Hotovely, dit « … L’histoire d’Israël dans cette région ne
commence pas au vingtième siècle, mais dans des temps anciens, ceux de
la Bible et des patriarches, il y a environ 4 000 ans ».
La Bible joue aussi un rôle central dans l’unité dédiée à
l’antisémitisme. Gideon Bachar, directeur de la campagne contre
l’antisémitisme au ministère des Affaires étrangères, dit aux élèves que
« l’antisémitisme existe certainement depuis l’aube du christianisme il
y a quelque 2000 ans, mais il existait aussi avant. Certains affirment
que le désir d’Haman de détruire tous les Juifs - pensez à cela - est
aussi une sorte d’antisémitisme. D’autres citent la haine du Pharaon
vis-à-vis de la nation d’Israël, une nation d’esclaves, comme une sorte
d’antisémitisme ».
Poussant la connexion entre Islam radical et extrême-gauche, Bachar
dit que les principales racines de l’antisémitisme moderne sont
« l’antisémitisme musulman, la droite radicale et l’extrême-gauche ». Le
lien qu’il fait entre « les organisations de la gauche radicale en
Europe » et l’ « islam radical » est un des points principaux d’une
conférence sur BDS de Tali Gorodos de l’institut Reut.
Dans une autre unité du cours, « Israël dans les médias
internationaux », le porte-parole du ministère des Affaires étrangères,
Emmanuel Nachshon, déclare : « Ils empoisonnent les enfants avec leur
haine vis-à-vis d’Israël et des Juifs… Les enfants sucent ce poison
depuis l’âge zéro. » Plus loin, Nachshon parle de la prétendue intifada
du loup solitaire, sur fond d’un mélange d’enregistrements de la
sécurité israélienne sur des sites d’attaques au couteau, d’émissions de
Hamas et d’exécutions d’ISIS. Quelques-unes de ces vidéos et photos
apparaissent encore dans d’autres parties du cours.
En dehors de l’insistance sur la haine des Arabes et des Musulmans (y
compris une supposée menace iranienne), les conférenciers disent aux
élèves de souligner l’énergie créatrice d’Israël, ses développements et
ses inventions dans les domaines des nouvelles technologies, de la
médecine, de l’agriculture et d’autres domaines.
Une des questions du test, « à quels défis êtes-vous confronté en
Israël ? », a quatre réponses possibles : la menace iranienne ; la
délégitimation ; les organisations terroristes de l’Ouest, de l’Est, du
Nord et du Sud ; « tout ce qui précède ». La réponse correcte est « tout
ce qui précède ». Une autre question est « Contre qui l’antisémitisme
est-il dirigé ? » et la réponse correcte est « seulement contre
Israël ».
« Les messages disent que tout le monde nous déteste, depuis l’époque
de la Bible, qui est aussi la seule légitimation d’Israël mentionnée
dans le cours », dit la mère d’un élève de Première. « Le conflit
israélo-palestinien est présenté sans aucun contexte —aucune explication
n’est donnée pour la haine des Arabes et il n’y a aucune distinction
entre Israël et la Cisjordanie », ajoute-t-elle.
Un autre parent dit : « Nous sommes habitués à une vision du monde
issue de la droite, dans les cours d’éducation civique ou d’histoire...
Maintenant nous avons à accepter un agenda politique flagrant pour que
notre enfant puisse participer à une compétition de science ».
Un enseignant accompagnant ces délégations remarque : « Il est
difficile d’imaginer ce que les élèves arabes et leurs parents
ressentent. Les Arabes apparaissent presque exclusivement dans des
contextes négatifs. Il n’y a aucune réflexion sur la coexistence. Le
message de Bennett dans sa vidéo est : les Arabes doivent être
reconnaissants pour le droit de vote et se taire ».
Un fonctionnaire du ministère de l’enseignement a déclaré :
« Beaucoup des leçons jouent sur les peurs et les préjugés des élèves et
les intensifient ».
Le porte-parole du ministère Amos Shavit n’a pas répondu aux
questions sur le cours, déclarant : « Il a été construit en prenant en
compte la variété des populations en Israël, avec l’intention
d’entraîner les élèves allant à l’étranger. L’affirmation selon laquelle
le cours reflète une vision politique est sans fondement ».
Or Kashti pour Haaretz
aurdip.fr
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