dimanche 11 juin 2017

Un perroquet s’en va, une perruche arrive

Vladimir Marciac

Il y a deux façons de traiter l’information : celle des domestiques qu’on jette comme des kleneex et celle des journalistes qui sauront ce qui leur en coûte sans pérorer pendant 15 ans au JT de 20 heures.
Un chouette mensonge de Pujadas qui n’a pas ému le CSA

Le lundi 8 octobre 2012, revenant sur ce qu’avait dit David Pujadas la veille, le journal télévisé de 20 h de France 2, faisait son mea culpa : « Contrairement a ce qui a été dit hier sur cette chaine, le taux de pauvreté au Venezuela n’est pas de 80%. Il était de 49% quand Chavez est arrivé au pouvoir et il est maintenant de 29%. De même contrairement à ce qui a été dit, il n’y a pas qu’une seule ligne de chemin de fer pour les voyageurs au Venezuela. Il y a plusieurs lignes qui relient les grandes villes ».
Entre l’information inventée et son rectificatif, avait eu lieu la réélection du président Hugo Chavez, le dimanche 7 octobre 2012.
Le scrutin clos, le mensonge n’avait plus d’utilité. De plus, il était si gros, que France 2 ne pouvait pas le laisser vivre la longue vie des mensonges journalistiques dont la particularité est de surgir, ça et là, à l’improviste, comme une taupe dans le jardin.

La vérité était tout autre 

Car la situation au Venezuela était tout autre : depuis l’arrivée de Chavez au pouvoir (1998), le taux de mortalité infantile avait été divisé par deux, l’analphabétisme éradiqué, le nombre de professeurs des écoles avait été multiplié par cinq (de 65 000 à 350 000). A ce moment là, le pays détenait le coefficient de Gini (qui mesure les inégalités) le plus performant d’Amérique latine. Dans son rapport de janvier 2012, la Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes (CEPALC, un organisme de l’ONU) établissait que le Venezuela est le pays sud-américain - avec l’Equateur - qui, entre 1996 et 2010, avait le plus réduit le taux de pauvreté. Enfin l’institut américain de sondages Gallup classait le pays d’Hugo Chavez, 6e nation « la plus heureuse du monde ».

La main de l’Elysée ?

Mais retenons bien ceci : si David Pujadas, fidèle perroquet des maîtres du CAC 40, est aujourd’hui brutalement évincé du JT de France 2 qu’il présentait depuis 2001 avec une audience croissante, ce n’est pas pour cette faute (vénielle aux yeux de la caste journalistique). Ni pour bien d’autres dont on ferait un livre. Les esprits mal intentionnés (et complotistes !) susurreront que, quelques jours à peine après l’élection de Macron à la présidence de la République, le limogeage de ce bon serviteur était nécessaire pour la promotion d’une amie à qui Brigitte Macron faisait ostensiblement la bise : Anne-Sophie Lapix, épouse d’Arthur Sadoun (photo), directeur de Publicis-Groupe. Ou pour une éventuelle insolence ancienne que l’Elysée n’aurait pas digérée. Bref, ironie du sort, Pujadas a été fichu à la porte comme un de ces vulgaires pue-la sueur qu’il savait si bien cuisiner.
Si Pujadas ne dit rien sur le pourquoi de son limogeage imprévu, c’est qu’une impertinence pourrait le priver d’un autre emploi bien rémunéré.

« Donne un cheval à l’homme qui a dit la vérité, il en aura besoin pour s’enfuir » (Proverbe arabe)

Pendant toute la campagne électorale (et, en fait, sans répit depuis des années), Jean-Luc Mélenchon a payé de ne pas rejoindre la meute des enfumeurs, les médiacrates, perroquets des oligarchies vénézuéliennes.
Y a-t-il eu une seule émission de radio de télé où les journalistes, Pujadas en tête, ne lui ont pas lancé au visage Chavez, Maduro l’Alba ?
Y en a-t-il eu une seule où les journalistes ont pareillement attaqué les hommes politiques qui se sont compromis avec l’Arabie Saoudite ?
Ont-ils une seule fois demandé des comptes à ceux qui ont accepté des chèques, des voyages offerts par le Qatar, dictature théocratique misogyne ? Nous avons publié des noms.
Juan Branco, avocat de Julian Assange et candidat de la FI dans le 93, a affirmé dans un débat télévisé que certains téléphonent à l’ambassade du Qatar pour recevoir une montre ou un billet d’avion. Des noms ! Des noms !
Le 8 juin 2017, séquence émotion dans le dernier JT de Pujadas. Ses complices des coups tordus (Nathalie Saint-Cricq et François Lenglet) étaient là, ainsi que son équipe, applaudissant l’homme à qui leur travail dans l’ombre a permis pendant plus de 15 ans d’empocher chaque mois dans les 18 000 euros, soit le salaire annuel des trublions à qui il demande de s’excuser de leur révolte.

Applaudir Pujadas, voter Macron, ô, travailleurs de France, qu’êtes vous devenus ?
 
Et lire absolument l’excellent article publié par ACRIMED http://www.acrimed.org/Supplique-pour-etre-interroge-par-David-Pujadas

Le Grand Soir

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