lundi 10 juillet 2017

Criminel du climat, Donald Trump doit être jugé

Valérie Cabanes, Emmanuel Poilâne, Marie Toussaint    


En menant des politiques climaticides, comme la relance de l’industrie du charbon, le président des États-Unis viole des principes du droit international, expliquent les auteurs de cette tribune. Une saisine juridique aurait, selon eux, un effet positif en obligeant les États du monde entier à lutter contre le changement climatique.

Donald Trump promouvra-t-il au G20, puis à Paris le 14 juillet prochain, ainsi qu’il le fait depuis son élection, la relance de l’industrie et de l’exportation du charbon ? Cette industrie, censée participer à la création d’emplois et à la relance de l’économie états-unienne, est décriée par de nombreux économistes comme moribonde et ne renaîtra pas de ses cendres. Mais surtout, sa relance entre en parfaite contradiction avec l’ensemble des derniers rapports scientifiques indiquant que la lutte contre le changement climatique requiert l’arrêt total de l’ouverture de centrales à charbon, tout au moins à partir de 2020, date minimale à laquelle les États-Unis pourront juridiquement sortir de l’accord de Paris.
Or, cet accord ne fait que reprendre les préconisations des scientifiques réunis au sein du Giec (le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) : un réchauffement climatique de 1,5 à 2 °C mettrait déjà en danger une grande partie de l’humanité et des espèces tandis que le changement amorcé a déjà de lourds impacts sur les conditions de vie des plus vulnérables, des insulaires du Pacifique aux populations côtières, des peuples arctiques aux populations subsahariennes.
En sortant de l’Accord de Paris, le président des États-Unis ne casse pas seulement une dynamique diplomatique majeure : il viole les principes du droit international. La Charte des Nations unies, à laquelle les États-Unis ont adhéré, établit comme objectif de « créer les conditions nécessaires au maintien de la justice et du respect des obligations nées des traités et autres sources du droit international ». Or, le changement climatique est une menace aux droits fondamentaux des citoyens du monde, il amplifie les inégalités et constitue de ce fait une menace à la paix. Toute politique anticlimatique menée de par le monde érode la capacité des États à protéger leurs populations et met, en définitive, en danger la survie de l’humanité tout entière.
De plus, l’émergence du droit international de l’environnement, dans ses grands principes traduits dans les Déclarations de Rio et de Stockholm, au sein des traités contraignants déjà adoptés, ou dans sa jurisprudence, établit la responsabilité des États vis-à-vis de l’environnement global et des communs planétaires. Si les outils pour rendre cette affirmation contraignante manquent encore, si nul n’a encore osé franchir le pas de « pénaliser » les atteintes graves à la nature, le principe juridique qui devrait empêcher Donald Trump de mettre à mal toute la politique environnementale de son pays existe.

Trump commet un crime contre la sûreté de la planète menaçant le droit à la vie des générations présentes et futures

Cela n’a pas échappé aux juges, avocats, professeurs de droit ou à la société civile qui ont notamment proposé le 24 juin dernier un Pacte mondial pour l’environnement ayant force obligatoire, ni au législateur, qui a souvent intégré cette responsabilité dans les droits étatiques, comme elle l’est en France au sein de la Charte constitutionnelle pour l’environnement.
Ainsi, aux États-Unis, des juges ont récemment reconnu le « droit à un environnement stable ». Au Pakistan, la Cour suprême a établi le devoir de l’État de préserver ce qui nous est commun. Aux Pays-Bas, le juge a défendu le devoir de l’État de préserver les droits et la santé de sa population. Et de telles initiatives se multiplient, tant et si bien que de nombreuses organisations proches des nôtres — comme Our Childrens’Trust aux États-Unis — travaillent sur l’opportunité d’un procès contre Trump pour mise en danger d’autrui. Trump, en ne respectant pas l’accord de Paris auquel il est tenu jusqu’en 2020, commet un crime contre la sûreté de la planète menaçant le droit à la vie des générations présentes et futures. Il se rend responsable de façon intentionnelle de l’écocide en cours.
Il est grand temps de faire advenir, dans chacun de nos États, des règles obligeant ces derniers à lutter contre le changement climatique. En pénalisant les écocides, les graves atteintes aux écosystèmes dont toute vie dépend, en reconnaissant des droits de l’homme transgénérationnels, ou en inscrivant dans nos Constitutions l’obligation de protéger le climat, nous empêcherions les décisions individuelles, dangereuses et rétrogrades qui menacent les conditions d’habitabilité de la Terre.

Si nous envisageons une saisine juridique, la reconnaissance de l’écocide dans le droit pénal international permettrait quant à elle de faire advenir avec sûreté une telle démarche. Il est encore temps de prendre en main notre destin. Utilisons tous les outils, dont le vecteur puissant du droit, pour faire appliquer réellement nos ambitions pour le climat !

Valérie Cabanes est porte-parole de End Ecocide on Earth ; Emmanuel Poilâne est directeur de la Fondation France-Libertés ; Marie Toussaint est présidente de Notre affaire à tous.

reporterre.net 

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