La majorité des 140 000 tonnes de charbon de bois brûlées chaque année en France provient d'un pillage des pays du Sud.
À priori, il n’existe pas de rapport évident entre la pratique
intensive du barbecue d’été et la disparition d’un certain nombre de
forêts dans les pays du Sud. Il suffit pourtant de jeter un œil sur les
énormes sacs de charbon de bois actuellement en promotion dans les
grandes surfaces, alimentaires ou vouées au bricolage, pour se rendre
compte que dans la plupart des cas, l’origine géographique du matériau
de base de cette activité champêtre n’est pas mentionnée. Pourtant, en
France, la majeure partie des 140 000 tonnes de combustible à cramer
côtelettes et saucisses dans les jardins provient d’Afrique. Même quand,
par extraordinaire, il est signalé comme venant de Belgique, des
Pays-Bas ou de Pologne, pays où le charbon de bois débarqué par
containers est souvent « naturalisé » après mise en sacs. Il en arrive
aussi en France et l’impression d’un drapeau tricolore suffit alors pour
tromper le consommateur. Si tant est que celui-ci se pose des
questions.
Origine inconnue...
Le charbon de bois utilisé en France provient essentiellement du
Nigeria, d’Éthiopie, des deux Congo et aussi de la Somalie où nulle
autorité n’est en mesure d’exercer un contrôle. D’autant plus que, dans
ce dernier pays, les différentes factions politiques qui s’affrontent
violemment depuis les années 1990 sont elles-mêmes organisatrices de la
collecte puis de l’exfiltration des trafics vers les pays limitrophes.
Des trafics qui ne concernent pas que la France et ne sont pas seulement
originaires d’Afrique. Un rapport publié récemment par Earthsight,
une association anglaise environnementale, explique que tous les sacs
de charbon de bois en vente dans les stations-services américaines et
anglaises sont produits dans la forêt paraguayenne de Chaco, l’un des
plus vastes massifs forestiers après l’Amazonie. Conséquence, il a perdu
200 000 hectares au cours des dix dernières années. Diminution
préjudiciable aux peuples indigènes qui y vivent, à la faune, à
l’agriculture et aux conditions climatiques.
Déforestation
La déforestation des pays exportant massivement du charbon de bois
vers les pays du Nord est la première conséquence de cette activité qui
mobilise des centaines de milliers de personnes pour des profits qui ne
changent pas leurs conditions de vie. Les femmes – souvent elles – et
les agriculteurs s’épuisent et épuisent leurs forêts pour transporter
puis vendre, à quelques centimes le kilo en bord de route ou sur les
marchés, un produit revendu en France entre 2 et 10 euros le kilo.
Femmes, enfants et vieillards sont partout le long des routes rurales
africaines, attendant les ramasseurs. Le profit maximum étant réalisé
ensuite par les stations-services et les grandes surfaces ou directement
sur Internet. Dans 90 % des cas sans la moindre mention d’origine.
La situation des forêts est d’autant plus tragique pour de nombreux
pays du Sud que, faute d’énergie disponible, la population doit aussi
recourir massivement au bois ou au charbon de bois pour la consommation
familiale. Au point, comme par exemple à Haïti, de réduire les arbres de
l’île à quelques dizaines d’hectares. Au point aussi que, le long des
routes, le charbon de bois, tiré des vieilles souches arrachées aux
bulldozers, est souvent la seule ressource pour la cuisine. Même
situation autour des camps de réfugiés africains où les aliments
distribués par le Haut Commissariat aux personnes déplacées doivent être
préparés avec des combustibles glanés à l’extérieur ; dans des zones
déjà en voie de désertification comme au Tchad.
politis.fr
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