jeudi 14 décembre 2017

Blanquer œuvre pour une école au garde à vous


Raphaël Greggan

Ce dimanche, Jean-Michel Blanquer a fait une nième interview. Cette fois, il était au grand Jury RTL-LCI.

Pour une école Johnny Halliday

Répondant aux questions sur sa présence aux funérailles de Johnny Halliday, J.-M. Blanquer n’a pas réfuté l’idée de nommer des établissements scolaires du nom de « l’idole des jeunes ». Sans jamais poser le problème de la sous-représentation des femmes dans les noms des bâtiments publics. Mais Monsieur le ministre n’en a cure.
Passant sur sa présence à l’Eglise St Sulpice, J.-M. Blanquer en a profité pour affirmer la place centrale de la laïcité à l’école. Il n’a pas soufflé un mot sur les 10 millions que l’Etat donne à l’enseignement privé (contre 4,5 millions à l’enseignement public et 5 millions à l’enseignement supérieur). Par contre, il réaffirme que les mères voilées n’avaient pas leur place pour accompagner les sorties scolaires. On voit que son long discours sur la laïcité n’est qu’un paravent pour réaffirmer ses combats islamophobes. Il développe ainsi une école qui vit dans la peur et la haine de l’autre, en particulier lorsqu’il ou elle est musulmanE.

Retour vers la 3e République

J.M. Blanquer refuse d’endosser les déclarations de Marine Le Pen qui constatait qu’il mettait en place le programme du Front National. Cela ne l’empêche pas d’être pour un retour à l’uniforme. L’uniforme n’a jamais supprimé les différences de classe sociale, ni même les rendre invisibles. Au contraire, le seul objet de l’uniforme est de formater les jeunes, y compris dans leur façon d’être. Il confirme qu’il est pour une dictée par jour dans le primaire et il impose une méthode de lecture à tous les enseignants. Il faudrait que ces derniers se mettent aussi au garde à vous, et peu importe que de nombreuses études contredisent le ministre.
Au passage, J.-M. Blanquer affirme qu’il interdira les téléphones portables dans les établissements scolaires. La méthode peut étonner. Avant tout, parce que cette recommandation existe déjà. Mais surtout parce que cela est absurde. Soit on considère qu’il y a un « problème » dans la façon dont les jeunes utilisent leurs portables. Mais ce « problème » est-il seulement celui des jeunes ? Et dans ce cas, une éducation particulière est nécessaire sur ce thème. Ou bien, on doit accepter que le monde a changé et réfléchir collectivement à des pédagogies qui prennent en compte ces évolutions. Mais, là dessus le ministre ne veut surtout rien voir.

Que l’éducation nationale fonctionne comme une entreprise

J.-M. Blanquer réaffirme la diminution de 20% du nombre de postes aux concours d’enseignants, niant complétement l’augmentation du nombre de professeurs contractuels et l’augmentation importante du nombre d’élèves par classe. Et dans l’objectif d’améliorer la « gestion des ressources humaines » (sic) du ministère, Blanquer propose de mettre en place des primes au mérite. Comme si l’éducation relevait d’individus, et non de relations sociales collectives ; comme si l’apport d’un enseignant pouvait être mesuré sur le temps court, là où toutes les études montrent que la pédagogie doit être évaluée sur le temps long.

Et sur les points chaud ? Un silence assourdissant

Par contre, J.M. Blanquer n’a pas dit un mot sur le plan Vidal dans l’enseignement supérieur ou sur « Parcours Sup » qui met en place la sélection dans les universités (qui doit être votée courant décembre). Pas un mot non plus sur la réforme du lycée qui doit pourtant se mettre en place dès la rentrée 2018, ni sur la réforme du bac (dont il laisse entendre, dans d’autres interviews que ce sera un changement majeur). Il faut croire que sur ces sujets d’actualité le ministre n’a pas le temps non plus.

La logique Blanquer

Il serait faux de se limiter à l’incohérence de façade de J.-M. Blanquer. En réalité, c’est la nouvelle façon de communiquer du ministère de l’éducation nationale : multiplier les interviews et ne faire aucune (ou presque) communication officielle. Les personnels doivent en comprendre les sous-entendus. Mais au delà de ce coup de com’, le fond du ministre reste de surfer sur le populisme et un fantasme de l’école de la 3e République.

Il est urgent, face à cela de réagi collectivement, pour mettre un point d’arrêt à ses réformes rétrogrades en cours. Il s’agit de construire collectivement un mouvement d’ampleur qui met en avant une école émancipatrice pour tous.

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