Raphaël Greggan
Ce dimanche, Jean-Michel Blanquer a fait une nième interview. Cette fois, il était au grand Jury RTL-LCI.
Pour une école Johnny Halliday
Répondant
aux questions sur sa présence aux funérailles de Johnny Halliday, J.-M.
Blanquer n’a pas réfuté l’idée de nommer des établissements scolaires
du nom de « l’idole des jeunes ». Sans jamais poser le problème de la
sous-représentation des femmes dans les noms des bâtiments publics. Mais
Monsieur le ministre n’en a cure.
Passant sur sa présence à
l’Eglise St Sulpice, J.-M. Blanquer en a profité pour affirmer la place
centrale de la laïcité à l’école. Il n’a pas soufflé un mot sur les 10
millions que l’Etat donne à l’enseignement privé (contre 4,5 millions à
l’enseignement public et 5 millions à l’enseignement supérieur). Par
contre, il réaffirme que les mères voilées n’avaient pas leur place pour
accompagner les sorties scolaires. On voit que son long discours sur la
laïcité n’est qu’un paravent pour réaffirmer ses combats islamophobes.
Il développe ainsi une école qui vit dans la peur et la haine de
l’autre, en particulier lorsqu’il ou elle est musulmanE.
Retour vers la 3e République
J.M.
Blanquer refuse d’endosser les déclarations de Marine Le Pen qui
constatait qu’il mettait en place le programme du Front National. Cela
ne l’empêche pas d’être pour un retour à l’uniforme. L’uniforme n’a
jamais supprimé les différences de classe sociale, ni même les rendre
invisibles. Au contraire, le seul objet de l’uniforme est de formater
les jeunes, y compris dans leur façon d’être. Il confirme qu’il est pour
une dictée par jour dans le primaire et il impose une méthode de
lecture à tous les enseignants. Il faudrait que ces derniers se mettent
aussi au garde à vous, et peu importe que de nombreuses études
contredisent le ministre.
Au passage, J.-M. Blanquer affirme qu’il
interdira les téléphones portables dans les établissements scolaires.
La méthode peut étonner. Avant tout, parce que cette recommandation
existe déjà. Mais surtout parce que cela est absurde. Soit on considère
qu’il y a un « problème » dans la façon dont les jeunes utilisent leurs
portables. Mais ce « problème » est-il seulement celui des jeunes ? Et
dans ce cas, une éducation particulière est nécessaire sur ce thème. Ou
bien, on doit accepter que le monde a changé et réfléchir collectivement
à des pédagogies qui prennent en compte ces évolutions. Mais, là dessus
le ministre ne veut surtout rien voir.
Que l’éducation nationale fonctionne comme une entreprise
J.-M.
Blanquer réaffirme la diminution de 20% du nombre de postes aux
concours d’enseignants, niant complétement l’augmentation du nombre de
professeurs contractuels et l’augmentation importante du nombre d’élèves
par classe. Et dans l’objectif d’améliorer la « gestion des ressources
humaines » (sic) du ministère, Blanquer propose de mettre en place des
primes au mérite. Comme si l’éducation relevait d’individus, et non de
relations sociales collectives ; comme si l’apport d’un enseignant
pouvait être mesuré sur le temps court, là où toutes les études montrent
que la pédagogie doit être évaluée sur le temps long.
Et sur les points chaud ? Un silence assourdissant
Par
contre, J.M. Blanquer n’a pas dit un mot sur le plan Vidal dans
l’enseignement supérieur ou sur « Parcours Sup » qui met en place la
sélection dans les universités (qui doit être votée courant décembre).
Pas un mot non plus sur la réforme du lycée qui doit pourtant se mettre
en place dès la rentrée 2018, ni sur la réforme du bac (dont il laisse
entendre, dans d’autres interviews que ce sera un changement majeur). Il
faut croire que sur ces sujets d’actualité le ministre n’a pas le temps
non plus.
La logique Blanquer
Il
serait faux de se limiter à l’incohérence de façade de J.-M. Blanquer.
En réalité, c’est la nouvelle façon de communiquer du ministère de
l’éducation nationale : multiplier les interviews et ne faire aucune (ou
presque) communication officielle. Les personnels doivent en comprendre
les sous-entendus. Mais au delà de ce coup de com’, le fond du ministre
reste de surfer sur le populisme et un fantasme de l’école de la 3e
République.
Il est urgent, face à cela de réagi collectivement,
pour mettre un point d’arrêt à ses réformes rétrogrades en cours. Il
s’agit de construire collectivement un mouvement d’ampleur qui met en
avant une école émancipatrice pour tous.
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