Régis de Castelnau
Inspiré d’une histoire pas vraie.
Ça se passe dans un pays où comment que la justice elle est pas impartiale.
Les choses se déroulent quelque temps avant l’élection du
personnage le plus important des institutions du pays. Il y a un petit
gars qui voudrait bien être élu. Intéressant le petit bonhomme, on
apprend aujourd’hui par son porte-parole (Benoit Raymond-Petit qu’il
s’appelle, je crois) qu’il guérit les écrouelles en touchant les gens.
En attendant, il est ministre de l’économie et s’efforce de fourguer les
fleurons industriels de son pays à ses copains. Il plaît beaucoup aux
oligarques qui vendent des armes et qui possèdent la presse. Il se
trouve que l’un de ces oligarques doit se rendre un salon de nouvelles
technologies au fin fond d’un désert américain où on joue avec des
machines à sous. Alors le ministre de l’économie il veut aller dans
cette ville du désert pour rencontrer l’oligarque histoire de lui
demander à lui aussi un coup de main et des stocks de fraises Tagada.
Il demande à Mariel Paniquo, une copine d’école, qu’il a fait nommer à
la tête d’une agence publique (France-start-up qu’elle s’appelle
l’agence, je crois) de lui arranger ses bidons et de lui organiser le
déplacement avec quelques potes. Les cadres de la boîte disent que c’est
trop tard pour respecter le Code des Marchés Publics et confier
l’organisation du déplacement à une agence spécialisée, après une
procédure (obligatoire) de mise en concurrence. Muriel est bien embêtée.
Elle demande au cabinet du ministre ce qu’il faut faire. « Passer outre
» lui répond-on. On ne sait pas exactement qui a donné l’ordre à
Mariel, mais pour connaître le fonctionnement des cabinets, on a bien
une petite idée. Aussitôt dit aussitôt fait, France-start-up passe un
marché de gré à gré avec la première agence de communication française,
l’agence Bavasse. Il y en a pour près de 500 000 balles, mais au
ministère, on les connaît bien Bavasse, ce sont des amis et on les gave
déjà de contrats. Alors un peu plus ou un peu moins, ça passera dans les
bruits de l’orchestre.
En interne, au ministère des finances il y a des mauvais coucheurs
qui font des histoires. Et un rapport qui dit que tout ça n’est pas bien
régulier. La presse en parle un peu, alors France-start-up pond un
communiqué pour dire que tout ça c’est vrai, qu’ils ont violé le code
des marchés et par conséquent commis le délit pénal de favoritisme, mais
qu’ils n’ont pas fait exprès, qu’il n’avait pas le temps, et que
c’était pour la bonne cause. Le Parquet National Financier sollicité
fait savoir qu’il a autre chose à foutre, et déjà assez de travail à
s’occuper des concurrents de l’ancien ministre des finances à l’élection
présidentielle, à savoir François Fuyons et Martine La Peine. Comme ça
grince quand même un peu dans l’opinion c’est le parquet de la capitale
qui s’y colle. Quelques fuites dans la presse plus tard, on apprend que
la seule question qui reste en suspens pour l’instant, c’est celle de
savoir qui au cabinet du ministre de l’économie a pris la décision.
Habitués aux rythmes fulgurants utilisés par le PNF de madame Roulette
et le Pôle Financier du juge Tournoyaire, on se dit que Mariel risque de
passer un été agité.
Eh bien pas du tout. Il faut rappeler qu’on est au printemps 2017, et
que c’est que le copain des oligarques, débarrassé par la justice de
son principal concurrent, qui a été élu. Alors Mariel va connaître une
certaine tranquillité estivale histoire de se préparer à sa mission
principale du mois de septembre, démolir le code du travail à l’aide des
ordonnances. Ça, c’est fait.
Bons alors après, on reprend l’instruction ? On demande à Mariel de
nous raconter comment elle a lâché un demi-million d’euros sans mise en
concurrence pour rendre service à son copain d’école? Houlà doucement,
chaque chose en son temps. Et c’est comme cela que l’on vient
d’apprendre qu’un an après l’aveu de France-start-up, sa patronne était
convoquée avec le statut de « témoin assisté ». Plus confortable bien
sûr, et en plus cela veut dire qu’en l’état de l’instruction il n’existe
pas d’indices « graves ou concordants » rendant vraisemblable le fait
que Mariel ait su que la société qu’elle dirigeait s’asseyait gaiement
sur le Code des Marchés en commettant une infraction pénale.
Comme je l’ai dit en commençant, cette histoire se passe dans un pays
où comment que la justice elle est pas impartiale. Et surtout un pays
où certains magistrats ne sont guère soucieux de la crédibilité de leur
institution. Ce n’est pas chez nous que ça arriverait.
Pour ceux qui ne prennent pas tout cela à la légère et voudraient en
savoir un peu plus, je renvoie à deux textes de l’année dernière. On
constatera que j’avais encore quelques illusions.
MURIEL PÉNICAUD ET SES DÉCODAGES. 2 juillet 2017
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