jeudi 3 mai 2018

Israël prépare une guerre totale au Moyen-Orient, et consolide une législation fasciste à l’intérieur


Europalestine

Lundi soir, alors que dans l’enceinte du ministère de l’armée à Tel Aviv, Netanyahou attisait le feu d’une guerre contre l’Iran, à quelques dizaines de kilomètres de là, au Parlement de Jérusalem, les députés adoptaient une série de lois fortifiant l’apartheid et le racisme du régime israélien.

À Tel Aviv, Netanyahou, qui dirige le seul pays de la région disposant d’un arsenal atomique,— dont il a toujours refusé l’inspection— s’est livré à un grand speech pour affirmer que l’Iran ne respectait pas l’accord signé avec les grandes puissances en 2015, qui a pour objet de « verrouiller » les possibilités pour l’Iran d’éventuellement développer son nucléaire à des fins militaires (sachant que l’Iran n’a pas la bombe, et a toujours affirmé ne pas la vouloir, les Etats-Unis ayant eux-mêmes reconnu que la République Islamique avait abandonné toute velléité dans ce domaine depuis 2003 au plus tard).
Présentés comme « un exploit du Mossad », les documents secrets supposément iraniens brandis par Netanyahou ne contiennent en réalité rien qui ne soit déjà connu de l’Agence Internationale de l’Energie Atomique (AIEA), l’organisme chargé de surveiller l’industrie nucléaire iranienne, et qui continue d’estimer que le gouvernement de ce pays continue de respecter les clauses de l’accord de 2015, très contraignantes au demeurant.
Le discours de Netanyahou était principalement destiné à « booster » la volonté de Donald Trump, déjà bien chauffé par le lobby israélien, pour qu’il prononce déchire le 12 mai prochain l’accord international de 2015. Le twitteur de la Maison-Blanche a dans un premier temps applaudi au discours de Netanyahou, avant de se rétracter une heure plus tard, quand des conseillers lui ont fait remarquer que les « révélations » de Netanyahou étaient en réalité bidon.
Il n’en reste pas moins que le patron du gouvernement israélien, ne serait-ce que parce qu’il fait face dans son pays de possibles mises en examen pour diverses turpitudes personnelles, a un besoin effréné de guerres supplémentaires.
Tandis qu’elle apporte en sous-main son concours à des groupes djihadistes, l’armée israélienne a intensifié ces derniers mois ses attaques aériennes sur le sol syrien, que ce soit contre des installations du régime, ou des bases de l’Iran et de ses alliés du Hezbollah officiellement présentes dans le pays pour appuyer l’armée de Bachar al Assad.
Mais Tel Aviv veut plus et prépare son opinion publique à faire face une nouvelle fois à un « danger existentiel » fantasmatique, eu égard à la disproportion flagrante des forces militaires en présence. Les dirigeants israéliens préféreraient qu’une attaque générale contre le régime iranien –y compris sur le sol iranien et pas seulement en Syrie ou au Liban-, émane de l’armée américaine. Mais à défaut, ils préparent une attaque de grande envergure de leur propre cru, prétendant interdire à la Syrie et à l’Iran de se doter de systèmes de défense contre avions, de fabrication russe, plus performants que ceux dont ils disposent actuellement (les multiples frappes israéliennes contre des objectifs en Syrie n’ont pour le moment coûté qu’un seul F-16 à « Tsahal », pour des destructions adverses considérables).
Ces bruits de botte ont aussi pour effet de reléguer au deuxième, voire au troisième plan, le massacre de la population palestinienne à Gaza, où des jeunes désarmés sont tirés comme des lapins par de courageux snipers tout fiers de leur immunité et de leur impunité.
Mais si la presse israélienne en a fait des tonnes sur les « révélations » de Netanyahou et l’ingéniosité du Mossad qui aurait réussi à voler des milliers de dossiers secrets en plein Téhéran, elle n’a quasiment pas couvert les lois liberticides votées le même jour à la Knesset, observe le journaliste du Haaretz Bradley Burston, un sioniste américain émigré en Israël, qui désespère de l’avenir de son nouveau pays.
« Sous couvert de dossier iranien, Netanyahou vient juste de franchir trois étapes qui nous amènent au fascisme », écrit Burston.
« Avec les textes votés, nous avons là trois bombes à retardement qui nous conduisent droit à la dictature et au facisme », écrit-il.
Il y a d’abord l’adoption, en première lecture, de la loi sur " l’Etat-Nation Juif ", qui va torpiller, en droit et plus seulement en pratique, l’égalité théorique des droits entre tous les citoyens d’Israël. Parmi les dispositions avancées : la suppression de l’arabe en tant que deuxième langue officielle du pays, ce qui était pourtant son statut depuis la proclamation même de l’Etat d’Israël il y a 70 ans, et qui est la langue maternelle d’un habitant sur cinq ! De même, la ségrégation géo-spatiale va être renforcée par la loi, en interdisant en droit et pas seulement en fait la possibilité pour un « goy » d’accéder à un logement dans une communauté « réservée aux Juifs ».
Netanyahou-Napoléon ? La Knesset a aussi approuvé un amendement à la loi fondamentale sur le gouvernement qui autorisera désormais un Premier ministre à déclarer tout seul une guerre, sans avoir besoin d’une autorisation de son gouvernement.
Enfin, une troisième loi fait obligation aux tribunaux de privilégier " la loi et la tradition juive " au détriment de la législation civile, dans des affaires où une contradiction apparaîtrait quant à l’interprétation entre les deux corpus !
Le public israélien aura du mal à prendre connaissance de ce hara-kiri parlementaire. Le quotidien à grand tirage a consacré mardi ses 15 premières pages au show de Netanyahou sur l’Iran, avec seulement un quart de page insipide sur les décisions du parlement. Même topo dans le gratuit pro-Netanyahou Israel Hayom du milliardaire des casinos (sponsor de Trump et Netanyahou) Sheldon Adelson.
Et le pire est sans doute à venir, prévient Burston. C’est le projet dit du « Passage en force ». Si le texte est adopté, une simple majorité parlementaire (61 voix sur 120) suffirait à passer outre des jugements de la Cour Suprême. À court terme, la majorité parlementaire y voit un outil appréciable pour des milliers de demandeurs d’asile –principalement soudanais et érythréens- dont la juridiction a interdit la déportation (en pratique, vers l’enfer des sables libyens ou les eaux de la Méditerranée) en raison des risques que courent ces hommes et ces femmes s’ils étaient renvoyés dans leur pays d’origine.

La dépossession de la Cour Suprême faciliterait également l’annexion pure et simple à Israël des colonies juives implantées dans les territoires palestiniens occupés.

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