mercredi 26 février 2020

Élisabeth Borne, ou bornée ?


Olivier Cabanel

La nouvelle ministre du transport, cumulant le poste de ministre de la transition écologique et solidaire, part en guerre contre les éoliennes...

... alors que celles-ci sont l’une des portes d’entrée logique permettant la transition attendue depuis si longtemps.
On essaye de comprendre ?
Pourtant, tout semblait bien engagé, et la France donnait des signes encourageants propres à rattraper son retard considérable sur les autres pays européens en matière d’éolien.
En effet, depuis 2005, nous assistons à une lente progression du développement de l’éolien sur le sol national, passant de 2000 MW en 2007 à près de 16000 aujourd’hui... c’est bien, mais largement insuffisant par rapport à l’Allemagne... près de 60 000 MW... derrière l’Espagne près de 24 000 MW... et même dépassée par le Royaume-Uni.
On pourrait aussi évoquer la Suède, en progression de 350%, le Danemark, + 168%, l’Espagne, + 258%... lien
Pourtant l’effort le plus important que la France pourrait faire concerne le développement de l’éolien Offshore, d’autant que notre pays à un potentiel remarquable de côtes, et qu’il accumule beaucoup de retards, alors que les 6 parcs éoliens envisagés depuis 2011 sont à toujours en attente. lien
Or, avec nos 5 853 kilomètres de côtes répartis sur 5 façades maritimes, il y a en effet de quoi faire....sans parler des territoires hors métropole, soit 1380 km. lien
Sauf que la ministre de la transition a décidé que ça suffisait, jugeant le développement de l’éolien « anarchique »...
Elle suivait aussi l’avis de Macron, qui tout en tentant désespérément de se verdir, estimait que « la capacité à développer massivement l’éolien était réduite »...
Ce qui est totalement faux comme on l'a vu.
Il est aussi question d’aller dans le sens du vent des opposants à l’éolien, lesquels évoquent plus qu’à leur tour « la saturation visuelle ».... lien
N’est-ce pas étonnant que ces anti-éoliens partent en guerre contre ces moulins à vent des temps modernes, avec, entre autres, l’argument de la dévastation du paysage, mais ils n’ont jamais levé le moindre petit doigt contre les milliers de pylônes à très haute tension qui défigurent depuis longtemps la campagne française ?
Quelle est la réalité ?
On compte 8 000 éoliennes en France, de 100 mètres de haut en moyenne... contre 100 000 pylônes THT hauts parfois de 90 mètres de haut.
L’occasion de faire un sort à une légende urbaine qui voudrait que les éoliennes tuent des milliers d’oiseaux...
La réalité est tout autre.
C’est la ligue de protection des oiseaux qui a mené l’étude, laquelle a démontré qu’en 1 an, une éolienne tue entre 0,3 et 18,3 oiseaux, alors que les lignes à très haute tension tuent par an, aux USA, entre 130 et 174 millions d’oiseaux. lien
Au-delà de ça, les pires rumeurs circulent sur les réseaux sociaux : « il serait impossible d’organiser le recyclage des vieilles éoliennes... les éoliennes produisent de la radioactivité... le bruit qu’elles dégagent provoquent le cancer »...
C’est à Donald Trump qu’on doit cette dernière affirmation, lui qui est un farouche défenseur du charbon, du nucléaire, et bien sûr des gaz de schiste. lien
Quant au soi-disant impossible recyclage, il y a de quoi sourire... tous les matériaux qui la composent sont tous recyclables, quelle que soit la taille ou le modèle d’éolienne.
Béton, cuivre, plastique, pvc, polystyrène, métal, tissu, tous ces matériaux sont évidemment recyclables...lien
Ce qui n’est pas le cas des centrales nucléaires... puisque depuis des lustres on tente de trouver une solution acceptable pour se débarrasser des déchets hautement radioactifs, puisqu’ils restent dangereux pendant des milliers d’années.
La dernière trouvaille de nos énarques serait de les enterrer.
Ajoutons quand même que l’éolien géant n’est pas forcément la meilleure des solutions, car il oblige à transporter l’énergie, générant des problèmes de santé, puisque l’on sait que la pollution électromagnétique dégagée par la très haute tension peut provoquer des cancers...
De nombreuses études convergentes prouvent qu’il y a bien corrélation entre la pollution électro magnétique produite par les lignes THT, et le cancer.
Une étude réalisée récemment par le CRIIREM (Centre de Recherche et d’Information Indépendant sur les Rayonnements Electro Magnétiques) évoque des « problèmes de santé, trouble du sommeil, de la mémoire, de l’audition, maux de tête, irritabilité, états dépressifs  »... voire des maladies graves... des cancers.
L’étude précise avoir relevé des risques de leucémie qui augmenterait de 69% pour les enfants habitants à moins de 200 mètres d’une ligne THT. lien
Alors que l’électricité produite par les petites unités de production a vocation à être consommée sur place.
En effet, tout comme le photovoltaïque, l’éolien peut être destiné aux maisons, aux immeubles.
Il existe différents types d’éoliennes, à axe horizontal, ou vertical, produisant de l’énergie en quantité, sans pour autant avoir besoin de la transporter, ce qui génère habituellement un gros gaspillage énergétique.
C’est entendu, les plus courantes des éoliennes « ménagères » sont à axe horizontal, mais celles qui ont un axe vertical ne sont pas à dédaigner.
D’abord parce qu’elles s’intègrent plus facilement au paysage, ensuite parce qu’elles sont d’un encombrement plus faible.
N’oublions pas aussi les éoliennes à voilure tournante, qui s’orientent suivant la direction du vent.
Mais voilà, ce gouvernement veut freiner cette énergie propre et renouvelable.
Car c’est bien là toute la contradiction de Macron, et de son gouvernement, porté par le concept du « en même temps  ».
Il affirme vouloir faire la transition, mais alors qu’il va enfin fermer la vieille centrale de Fessenheim, fermeture actée il y a 8 ans, il freine l’éolien, et surtout il envisage 6 nouvelles centrales nucléaires, des EPR en l’occurrence, (lien) alors que celui de Flamanville affiche un budget qui a dépassé toutes les prévisions, passant de 3,3 milliards d’euros, à plus de 12..., pour l’instant, avec en prime des retards considérables, et des failles de conception. lien
Ajoutons pour la bonne bouche que le prix du KW nucléaire EPR atteint des sommets.
Comme son prix est de 7000 € le kW installé, (lien) le consommateur français devra bientôt débourser 120 € le MWh pour l’électricité nucléaire, façon EPR, contre 50/79 € le MWh éolien. lien
Cela est certainement dû au faible coût de construction d’une grande éolienne...500 000 €...bien loin des milliards gaspillés pour le nucléaire.
Finalement, ce gouvernement qui, à l’approche des municipales, avec les présidentielles en ligne de mire, tente de se faire passer pour le champion de la transition, reste toujours dans le domaine de la déclaration d’intention, juste histoire de séduire l’électeur.
Mais qui sera dupe ?
Hervé Kempf, dans les colonnes de Reporterre n’hésite pas à qualifier Macron de bouffon de l’écologie. Lien
Pas étonnant dès lors que 1000 scientifiques viennent de lancer un appel dénonçant l’inaction climatique du gouvernement, et appellent à la rébellion, à la désobéissance civile.
Comme ils l’écrivent : « pour ne parler que du climat, nous avons déjà dépassé le 1° C de température supplémentaire par rapport à l’ère industrielle, et la concentration de CO² dans l’atmosphère n’a jamais été aussi élevée depuis plusieurs millions d’années (...) cette inertie ne peut plus être tolérée (...) les observations scientifiques sont incontestables, et les catastrophes se déroulent sous nos yeux. Nous sommes en train de vivre la 6ième extinction de masse, plusieurs dizaines d’espèces disparaissent chaque jour,  ». lien

Comme dit mon vieil ami africain : « Celui qui désire la pluie doit accepter la boue  ».

agoravox.fr

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