Olivier Cabanel
Cette expression populaire est souvent utilisée pour signifier que « c’est foutu », et qu’il sera quasi impossible de s’en sortir…
À lire l’analyse que fait un spécialiste de la finance en France, on n’est pas loin de le penser…
Cet ex-gouverneur de la Banque de France s’appelle Jacques de Larosière, et il vient de publier un essai titré : « le déclin français est-il réversible ». lien
À l’en croire, c’est possible, mais la route sera longue et périlleuse, car l’expert en finances ajoute : « je doute que la France ait encore des dirigeants politiques capables de redresser la barre ».
Le plus intéressant de son analyse, c’est qu’il a mis en évidence les raisons de ce qu’il faut bien appeler un naufrage.
La première raison qu’il évoque, c’est la déplorable qualité de l’enseignement : « si les éléments actifs de la population ne sont pas dotés du minimum d’accès à la connaissance économique, le pays tout entier finit par sombrer » prédit-il. Il rappelle que la dernière étude Pisa classe la France au 26e rang des membres de l’OCDE, la baisse étant régulière depuis 2000.
En effet, une autre enquête nationale ne dit pas autre chose : 52,8 % des élèves de 4e ne maîtrisent pas un minimum de compétences en français, et 54,7 % en mathématiques…La raison est simple, ce serait consécutif au niveau médiocre des enseignants, sachant que, devant leur pénurie, certaines académies recrutent des enseignants ayant obtenus au concours des notes de 8 (et parfois moins) sur 20. Il faut en trouver l’explication sur la paupérisation des enseignants : il y a 30 ans, un instituteur débutant était rémunéré 1,8 fois le Smic, et un agrégé 2,3 fois...contre 1,5 et 1,8 fois aujourd’hui.
Il faut savoir que les salaires annuels des enseignants sont en chute depuis 40 ans, car le point d’indice n’a plus été revalorisé depuis 1983 au même rythme que l’inflation, puis gelé presque systématiquement entre 2010 et 2022 ainsi que l’a écrit Bernard Schwengler dans son ouvrage « salaire des enseignants, la chute » (éd l’Harmattan/2021). lien
C’est probablement la raison pour laquelle il manquait 3185 postes d’enseignants à la rentrée. Lien
On pourrait établir un parallèle avec le monde de la Santé, monde dans lequel les infirmiers(res) sont devenus de plus en plus rares...lien
Par contre, le personnel soignant est bien mieux salarié dans le secteur privé...lien
Nous sommes donc bien dans un système où l’abandon du service public est acté.
Mais revenons à l’analyse de Jacques de Larosière.
Une autre raison qu’il met en avant sur ce déclin français est consécutif à notre endettement. Alors que le ratio entre le taux d’endettement public et le PIB (Produit Intérieur Brut) était jusqu’en 2000 de 60 %, (comme en Allemagne), il dépasse aujourd’hui les 110 %, tandis que de l’autre coté du Rhin il est encore à 64 %…Quant à l’endettement des entreprises françaises il est en moyenne de 200 %...celui des autres entreprises européennes est autour des 60 %. De plus, rappelle l’expert, alors que notre capacité industrielle a fondu d’environ 30 %...nos voisins allemands ont maintenu la leur.
Il martèle « l’expansion continue du déficit budgétaire ne stimule pas la croissance », et finalement les consommateurs français achètent des produits étrangers, et les entreprises françaises se délocalisent. Et il ajoute « les économistes ont tort d’estimer qu’il est bon de s’endetter quand le taux d’intérêt réel est inférieur au taux de croissance ».
Alors que faire ?
L’ex-gouverneur de la Banque de France affirme que « pour économiser 200 milliards d’euros en dix ans, la solution passe notamment par une réduction de la fonction publique »…
Il est vrai que, si l’on en croit une étude de Fipéco, il est étonnant de constater qu’avec 5,662 millions de fonctionnaires, soit une hausse de 22 %, alors que la population n’a augmenté que de 13 %, il y aurait là comme un anachronisme, et il y aurait donc 2 millions de fonctionnaires de trop, ainsi que l’affirme Claude Goudron dans un article de « Contrepoints ». lien
Ensuite propose De Larosière, il faudrait que la France construisent ses budgets comme le font nos voisins scandinaves, en se posant la question : « a-t-on toujours besoin de telle ou telle dépense décidée l’année précédente ? ».
Il faudrait aussi demander au premier président de la Cour des Comptes de passer en revue chaque budget pour y dénicher éventuellement les dépenses superflues... « il suffit d’un peu de jugeote pour équilibrer un budget » assure-t-il. lien
Réflexion de LFI : dans les années 80, les gens travaillaient 4 jours par an pour les actionnaires...aujourd’hui, c’est 45 jours...en rééquilibrant la répartition de la contribution entre le capital et le travail, cela rapporterait 123 milliards par an. lien
La liste des économies possibles pourrait s’allonger si l’on regarde de plus près les fastes déployés par la présidence de la république lors des réceptions que l’on sait…lien
Et quid des 2208 voitures de fonction dédiées au personnel de la ville de Marseille, les plus de 8 millions que Montpellier destinés à sa communication ?..la suite sur ce lien.
Et quid du bilan financier des J.O. parisiens ?
On sait que les prévisions en matière financières ont toujours été largement dépassées...ceux d’Athènes sont passés de 5 à 10 milliards, ceux de Pékin de 2,6 milliards à 30 milliards, ceux de Londres de 5 à 11 milliards, ceux du Brésil de 9 à 13 milliards, de Tokyo de 5 à 12…lien. Paris ne devrait pas déroger à la règle, et passer de 3,3 milliards à 10 milliards. lien
Aux recettes d’économie proposées par De Larosière, on pourrait ajouter la lutte contre l’évasion fiscale, estimée à 80 milliards par an. lien
On sait qu’au début des années 80, le 1 % le plus riche captait 7,7 % de l’ensemble des revenus avant impôt et qu’en 2022 cette part atteignait 12,7 %. lien
Une mesure simple, juste et applicable tout de suite qui consisterait à augmenter les impôts des super-riches rapporterait plus de 6 milliards par an. lien. En effet, les français les plus riches sont moins imposés que les autres selon une étude de l’IPP (Institut des Politiques Publiques). Lien
Espérons que le ministre de l’économie démissionnaire en prendra acte, lui qui estime modestement qu’il a sauvé l’économie française...lien
Mais on peut logiquement en douter, pour l’instant, il cherche seulement à ne se fâcher avec personne...au centre, Bayrou menace...à droite, on le met en garde de ne pas privilégier les LR (lien)...les autres, à gauche, et à l’extrême droite, l’attendent au tournant…
Quant au Président, il reste…
Barnier aurait-il l’intelligence de recruter de vrais experts... L’avenir nous le dira, car comme dit mon vieil ami africain : « seul on va plus vite, ensemble on va plus loin ».
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