vendredi 27 septembre 2024

Gouvernement Barnier : quand le RN dicte le tempo

Nathan Deas

La nomination de Barnier avec l’aval du Rassemblement National marquait déjà un saut dans la collaboration entre Macron et l’extrême droite. Trois jours à peine après la constitution de son gouvernement, l’emprise de l’extrême droite sur ce nouvel exécutif saute plus que jamais aux yeux.

Episode 1 : le nouveau locataire de Bercy, Antoine Armand, mardi, place le RN hors de « l’arc républicain » (France Inter).

Episode 2 : Marine le Pen s’indigne.

Episode 3 : Michel Barnier lui téléphone pour la rassurer et recadre dans la foulée son ministre.

Episode 4 : en début d’après-midi, l’entourage de l’ancien député de Haute-Savoie fait finalement savoir que « toutes les forces politiques représentées au Parlement » seront reçues au ministère dans les prochains jours ; ce qui comprend donc la formation de Marine le Pen …

L’équipe Barnier, trois jours à peine après sa constitution, n’échappe pas aux premiers couacs. Et ne manque pas de mettre à nue les contradictions d’un gouvernement placé « sous surveillance du RN ». Quitte à tout à fait s’en accommoder.

Sur le plateau de TF1, Bruno Retailleau, le nouveau ministre de l’Intérieur, chef de chef de file des sénateurs LR et artisan du durcissement de la très raciste loi immigration cette année, n’avait certainement pas besoin d’un « coup de pression » de l’extrême droite pour se mettre à la tête de l’offensive réactionnaire du gouvernement, ni pour présenter une panoplie de mesures qu’il entend imposer pour fermer les frontières, supprimer l’AME et accélérer l’expulsion des étrangers.

Il n’en présente pas moins un programme que ne renierait pas Marine le Pen. Et dont Michel Barnier, lundi, devant les caméras de France 2, avait déjà annoncé la couleur, promettant des « ruptures » et citant la ministre de l’Intérieur allemande qui, début septembre, annonçait le rétablissement des contrôles systématiques sur l’ensemble des frontières. Sans doute inspiré de Sarkozy qui s’était appliqué en 2007 à reprendre les mesures du FN pour « siphonner » l’électorat de le Pen, les deux membres de LR cherchent tant bien que mal à contenir et à prendre de court le RN, qui se targuait d’avoir droit de vie ou droit de mort sur le gouvernement Barnier.

Une stratégie de course derrière l’extrême-droite qui non seulement illustre de manière toujours plus évidente la nature de leur « alliance », mais remet aussi sous le feu des projecteurs la fragilité du gouvernement. Alors que sa survie dépend de la complicité du RN, le parti de Marine le Pen se pose déjà en « faiseur de roi » depuis son quitus au nom de Michel Barnier. Quitte à susciter quelques contradictions nouvelles dans les rangs macronistes.

Quelques jours après qu’une première crise ait éclaté au sein même de l’arc LR-EPR sur fond de crise du budget et de désaccords au sujet du partage des portefeuilles ministériels, Barnier se retrouve à devoir gérer de nouvelles dissensions, à l’image d’Agnès Pannier Runacher qui prévoit « des frottements » avec les tenants de la ligne la plus « dure », ou encore des passe d’armes entre Bruno Retailleau et Didier Migaud, le nouveau garde des sceaux. 

Un signal que la fuite en avant réactionnaire du gouvernement Barnier pourrait à terme avoir un coût politique et accélérer l’épuisement du gouvernement le plus fragile de l’histoire de la Vème République.

Révolution Permanente

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